Publié le 27 Mar 2014 - 09:42
MARCEL MENDY SUR L’INSTRUCTION DU DOSSIER HISSSEIN HABRE

 «Arrêtons de fantasmer sur Deby» 

 

Entre la «volonté de diversion» des avocats de l’ex-président tchadien et la «virulence verbale» de Mme Raymonde Habré contre Macky Sall, le coordonnateur de la communication des Chambres africaines extraordinaires a jugé «ahurissante» l’idée d’impliquer Idriss Deby Itno dans la procédure alors que «aucune victime ne l’a mis en cause à ce jour».

 

«Installer Idriss Deby Itno dans la procédure, en l’état actuel de l’instruction, serait ahurissant.» Le coordonnateur de la Cellule de communication des Chambres africaines extraordinaires (CAE) s’est inscrit dans la lignée de la «doctrine» qui écarte (pour le moment) le Président tchadien des enquêtes sur «les crimes commis sous le régime de Hissein Habré entre le 7 juin 1982 et le 1er décembre 1990». 

C’était au cours d’une conférence de presse conjointe tenue samedi matin à N’Djamena, avec la cellule de communication en charge du dossier Habré au ministère tchadien de la Justice.

Selon Marcel Mendy, «en matière pénale, il n’y a pas d’accusation sans preuve, avec des éléments objectifs, matériels et précis qui la fondent». Depuis l’ouverture de l’instruction, a-t-il ajouté, «pas une seule victime (n’ayant) mis en cause l’actuel Président Deby, comment un juge d’instruction pourrait-il l’incriminer», s’est demandé M. Mendy. Qui a néanmoins précisé : «L’instruction n’est pas encore terminée. Si à un moment ou à un autre, Deby est mis en cause, les juges aviseront. Mais arrêtons de fantasmer à ce niveau !»

A propos des «agitations stériles» des avocats de Hissein Habré, le coordonnateur de la cellule de communication des CAE a indiqué que la position du Parquet général est de ne pas les suivre sur «ce terrain». Explication : «A travers une stratégie bien orchestrée, ils veulent nous faire commettre des erreurs. (Mais) nous ne leur accordons pas la moindre attention», a souligné Marcel Mendy. Au passage, il a appelé les journalistes en général à «faire attention car les avocats de Hissein Habré sont forts en manipulation».

«Agitations stériles»

Dans un communiqué publié la semaine dernière à Dakar, l’Union des magistrats du Sénégal (UMS) avait invité les Chambres africaines extraordinaires (CAE) à porter plainte contre Me El Hadj Diouf. Ce dernier avait traité les magistrats et policiers de «voleurs» et de «corrompus» après la perquisition faite aux domiciles de Hissein Habré. Si la posture du Parquet général est claire, en revanche, «je ne connais pas la position des (autres) magistrats».

Dans le même ordre d’idées, Marcel Mendy a dit son incompréhension face aux sorties virulentes de Mme Raymonde Habré contre le Président Macky Sall. «Je ne vois pas dans quel pays autre que le Sénégal une femme (étrangère) a une telle liberté» de ton et de parole contre un chef d’Etat.

Par ailleurs, Marcel Mendy a indiqué que les avocats de l’ex-chef d’Etat ont été invités, à travers le Greffe des CAE, à se rendre au Tchad, avec prise en charge totale de leur séjour afin de leur permettre de faire leurs propres investigations sur place. «Mais il n’ont jamais daigné nous répondre.» Ce qui n’empêche pas l’instruction de se poursuivre, à N’Djamena et en d’autres endroits du Tchad.

A cet effet, Marcel Mendy a dressé un «bilan à mi-parcours» de la troisième Commission rogatoire internationale qui a bouclé sa première semaine d’activités au Tchad. «En raison du rush constaté avec 300 à 400 personnes (inscrites), les auditions qui devaient être arrêtées ce week-end pourraient être prolongées», a-t-il expliqué. La Chambre d’instruction va procéder à l’évaluation (statistique) du nombre de plaignants et de témoins. Et « à l’issue du processus, (elle) aura sans doute assez d’éléments pour étayer son accusation».

A partir de ce lundi, les enquêteurs se rendent dans  l’Est et le Centre du Tchad pour l’identification de charniers présumés, un travail entamé en décembre 2013 dans le Sud et le Nord, lors de la deuxième Commission rogatoire internationale. 

MOMAR DIENG (Envoyé spécial au Tchad)

 

 

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