Publié le 27 Mar 2019 - 15:17
MATCH AMICAL

Messi, la plaie du Maroc

 

C’était censé devenir l’événement de l’année au Maroc, et cela se transforme petit à petit en déception nationale. À la suite de l’aggravation d’une blessure au pubis face au Venezuela, Leo Messi n’a pas pris pas part au match amical face au Maroc, ce mardi soir à Tanger. Avant cette rencontre orpheline de sa grande star, l’heure est à la colère.

 

Lorsqu'il s'agit d'évoquer Lionel Messi et la sélection argentine, il est souvent question de souffrance. Pour ne pas dire tout le temps. De retour samedi dernier avec l'Albiceleste après plusieurs mois à digérer la défaite face à la France en huitièmes de finale de la Coupe du monde (4-3), la Pulga n'a rien trouvé de mieux que de perdre à Madrid face au Venezuela (1-3). Le quintuple Ballon d’or aurait pu battre le fer pendant qu'il était encore tiède, ce mardi soir à Tanger face aux Lions de l'Atlas. Il n'en sera rien, puisque Messi, blessé au pubis face au Venezuela, a annoncé son forfait face au Maroc. Une décision reçue de façon très amère de l’autre côté de la Méditerranée.

La mauvaise blague de Tofoni

À vrai dire, ce Maroc-Argentine avait tout pour plaire sur le papier. Deux équipes séduisantes et qualifiées au précédent Mondial, une affiche sans réelle concurrence médiatique un mardi soir et la grande star planétaire que tout le monde vient admirer au Grand Stade de Tanger. Et puis la blessure a tout fait capoter. « Tout s’est réellement enclenché à la suite du communiqué de la Fédération argentine, publié au lendemain du match contre le Venezuela, explique Mehdi Mahmoud, journaliste pour Telquel, basé à Casablanca. La Fédération marocaine s’est rendu compte de la situation, puis a demandé dans la foulée des explications à Hernán Tofoni, un agent délégué à l’AFA qui travaille pour l’agence World Eleven. C’est notamment lui qui était aussi à l’origine de l’organisation d’Israël-Argentine, finalement annulé, ou Irak-Argentine. » Débute une rixe diplomatique entre les deux institutions, où la Fédération royale marocaine de football (FRMF) se sent prise pour le dindon de la farce.

Dans les textes, l’accord passé avec World Eleven consiste à ce qu’une somme d’un million de dollars soit versée à la Fédération argentine pour la rencontre, en plus de la prise en charge du voyage et de l’hébergement. En revanche, une clause interne au contrat affirme que la non-participation de Lionel Messi à la rencontre diminuerait cette somme de moitié. En clair, si l’Argentine perd 500 000 euros dans l’histoire, le Maroc se retrouve sans aucune grande star à présenter à son public et fait la moue. Hier en conférence de presse, le sélectionneur argentin Lionel Scaloni a révélé ses onze titulaires : Andrada, Montiel, Pezzella, Kannemann, Acuña, Pereyra, Guido Rodríguez, Paredes, De Paul, Dybala et Lautaro Martínez. Une banane. « Au moment où le contrat est signé, la Fédération argentine évoque aussi les grands noms de la sélection : ça parlait d’Agüero, Higuaín, Di María, des anciens finalistes de Coupe du monde, détaille le journaliste. Le Maroc souhaitait avoir ces grandes stars présentes à Tanger. » Hélas, le renouvellement générationnel est passé par là.

« Au Maroc, Messi, ce n’est vraiment pas n’importe qui »

Pour le peuple marocain, Messi était perçu comme l’attraction principale d’un match où le numéro 10 argentin allait être accueilli en demi-dieu. « Notre pays est un grand suiveur de la Liga espagnole, décrypte Mehdi. Au Maroc, Messi, ce n’est vraiment pas n’importe qui... Il est venu deux fois pour jouer au football : l’été dernier en Supercoupe d’Espagne contre le FC Séville, et surtout l’été 2012 quand le Barça avait rencontré le Raja Casablanca. Messi avait marqué un triplé, et tout le stade chantait à sa gloire. En France, tu peux voir des survêtements de Chelsea, de l'AC Milan ou autre. À Casablanca aussi, mais tu vas en avoir beaucoup plus du Barça ou du Real. (...) Quand un Marocain va se passionner pour un joueur, il va très mal vivre une éventuelle trahison. » Alors voilà, le déroulement de cette affiche initialement prévue à Casablanca va sans doute descendre d’un cran en matière de ferveur, mais cela ne signifie pas pour autant que l’absence du Barcelonais sera pleurée par la foule, bien au contraire.

« Aujourd’hui, les interrogations sur Messi perdurent toujours : par exemple, le voir aller au baptême de Fàbregas à Barcelone alors qu’il était censé rester en équipe nationale, cela laisse un goût amer dans la bouche des fans, avance Mehdi. Au Maroc, il y a eu un réel changement de mentalité sur le sujet. Avant, certains joueurs comme Marouane Chamakh ou Adel Taarabt ne venaient même pas faire constater leur blessure à la Fédération pour confirmer leur indisponibilité. Aujourd’hui, Hakim Ziyech ne pourra pas participer à la rencontre car il s’est blessé.

Pourtant, il sera en tribunes pour supporter lui aussi l’équipe nationale. » Au moment de comparer l’intention de Messi à celle du milieu offensif de l’Ajax Amsterdam, également qualifié pour les quarts de finale de la C1, il y a forcément de quoi grincer des dents côté marocain. De son côté, le Maroc est prêt à rendre la pareille à Messi. « Si l’Argentine venait à perdre la rencontre face au Maroc, la réaction locale pourrait être importante, car le peuple marocain est taquin, conclut Mehdi. Dans ce cas-là, les Marocains vont chercher à décrédibiliser l’Argentine et Messi à travers l’ironie, du genre "tu as voulu nous snober, voilà ce que tu as récolté". » La preuve que Messi n'a même pas besoin de jouer pour faire parler de lui.

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