Publié le 8 Feb 2017 - 14:25
MEIWAY A DAKAR

‘’Ce qui manque à certains musiciens sénégalais’’

 

La star ivoirienne de la musique, Meiway, était à Dakar. Il a animé le défilé et la soirée caritative organisés par la styliste Emma Adjovi. Avant de monter sur scène, il a accepté de donner les secrets de la longévité de sa carrière musicale, son avis sur la musique africaine en général, et celle sénégalaise et nigériane en particulier.

 

Créateur du ‘’Zoblazo’’, un style musical inspiré des rythmes folkloriques du sud de la Côte d’Ivoire, Meiway est un artiste indémodable. De 1989 à nos jours, il a réussi à tenir le flambeau haut et à rester dans l’actualité musicale. Tous les âges peuvent écouter la musique de l’auteur du ‘’Professeur Awolowoh’’. Chacun de ses albums contient au moins un tube. Au Sénégal, pour animer la soirée caritative organisée par la styliste Emma Adjovi, il est revenu, dans un entretien, sur les raisons de sa longévité sur la scène et comment il fait pour rester ‘’in’’.

‘’J’ai souvent fait des mises à jour. Je fais comme les ordinateurs. Je suis un artiste qui a toujours dit qu’il faut se maintenir et non pas faire un tube, car c’est facile cela. Le plus difficile, c’est d’arriver à en refaire. Il faut toujours se remettre en question pour se maintenir. Il faut écouter tout le monde, s’en inspirer. Cela fait grandir. C’est ce que je fais’’, révèle-t-il. Une ouverture musicale qui manque à certains de ses pairs sénégalais.  Pourtant, cela ne leur ferait pas trop de mal car, considère le chanteur ivoirien, le ‘’mbalax’’ est ‘’l’une des plus belles musiques d’Afrique’’.

Elle arrive à s’exporter aussi : ‘’Je l’ai découvert en dehors du Sénégal. J’ai connu Youssou Ndour, Ismaïla Lo, Baaba Maal, Doudou Ndiaye Rose en Côte d’Ivoire, avant d’arriver ici. Leur musique a bercé mon enfance’’, indique-t-il. ‘’Je connais également Thione Seck, et je sais que son fils a pris le relais, Oumar Pène et le Super Diamono, Assane Ndiaye. Alioune Mbaye Nder est quelqu’un que j’aime beaucoup.

C’est un showman’’, ajoute-t-il. Seulement, même si les musiciens sénégalais sont connus et appréciés en dehors du Sénégal, ils pourraient faire bien mieux. ‘’Il y a un travail à faire par les Sénégalais eux-mêmes. Il faut qu’ils apprennent à écouter les autres. Ainsi, ils pourraient aller au-delà de ce qu’ils font. Mais si ça reste sectaire, ça reste sénégalais et si, au-delà du ‘’mbalax’’, on n’écoute pas les autres, forcément ça tourne en rond’’, analyse-t-il. S’appuyant sur son expérience personnelle, il résume : ‘’C’est à force d’écouter les autres que nous sommes arrivés à vendre notre musique hors des frontières ivoiriennes. En écoutant les autres, vous arrivez à trouver des voies et moyens pour imposer votre musique aussi.’’

Ceux qui connaissent la musique de Meiway savent qu’ils croient en ce qu’il dit. C’est un véritable cocktail qu’il propose en usant de diverses sonorités du continent. Et pour matérialiser cette philosophie, il a baptisé son dernier album ‘’Illimitic’’. ‘’J’ai choisi ce titre, pour dire que ma musique est illimitée, qu’elle ne doit pas se cantonner qu’aux décibels de mon pays. On a toujours dit que la musique est universelle. Il faut qu’on le prouve et c’est ce que j’ai toujours fait dans ma musique. Depuis le début de ma carrière, je traverse toutes les frontières sans visa’’, affirme-t-il sur un ton enthousiaste. Dans cette dernière production, il n’a pas invité de chanteurs, mais bien des instrumentistes, à l’instar du bassiste camerounais Etienne Mbappé, de l’Ivoirien Gueï Thomas, des Français Thomas Christian, Martinez, etc. Comme pour chacun de ses albums presque, celui-là aussi est accompagné d’une danse dénommée ‘’Illimitec’’. Il faut bouger le corps, brandir des mouchoirs blancs, se baisser et remonter pour la danser. ‘’C’est de l’aérobic’’, définit son inventeur.

‘’Cultivez-vous musicalement avant d’entrer en studio’’

Par ailleurs, parlant de la musique africaine, Meiway affirme que cette dernière ‘’se porte bien’’. ‘’De plus en plus, elle gagne de place sur l’échiquier international. Il y a les petits nés en Europe qui font ce qu’ils appellent  l’afro trap. On note un retour vers les origines, c’est au bénéfice de l’Afrique. On commence à reconnaître que l’Afrique est la vraie mère patrie.

Il faut qu’on cultive cela dans la durée’’, estime-t-il. En outre, quand on parle de musique africaine, aujourd’hui, on pense forcément à la musique nigériane qui semble prendre le dessus sur toutes les autres du continent. Meiway relativise cette suprématie. ‘’Je suis un puriste, et quand on est puriste, on doit faire attention à la musique nigériane. La musique nigériane que j’ai connue, ce n’est pas celle-là. Ce n’est pas la musique des ordinateurs. Ce n’est pas ce que j’ai connu avec Féla, Sonny Okusun qui sont des chanteurs de très haut niveau’’, décortique-t-il. Même s’il est d’accord quand même que ‘’la nouvelle vague nigériane fait la fierté de ce pays, de l’Afrique, grâce aux médias’’.

‘’Mais, poursuit-il, est-ce que dans le fond il y a de la matière, c’est la question à se poser. Je recommande aux plus jeunes de s’en inspirer, mais en trouvant le compromis pour faire la musique vraie’’. A cet effet, les jeunes doivent un peu plus penser à la formation, apprendre au fur et à mesure. ‘’J’ai une culture musicale qui n’est pas usurpée. Rien ne m’est extraordinaire. Cultivez-vous musicalement avant d’entrer en studio. J’ai été très connu sur le plan amateur. Pendant 8 ans, j’ai passé mon temps à chercher un producteur en vain. Heureusement, j’avais de petits jobs à Paris qui m’ont permis de faire un prêt à la banque et d’entrer en studio’’, conseille-t-il. 

BIGUE BOB

 

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