Publié le 12 Feb 2018 - 22:14
METIER DE COURTAGE

Dites, messieurs commissions !

 

C’est un monde en profonde mutation. Professionnels et amateurs s’y côtoient. Tous sont des intermédiaires évoluant dans la location d’immeubles ou dans le domaine des assurances. On les appelle courtiers. Hier dominé par l’informel, le secteur tend, de plus en plus, à la formalisation. Clients et bailleurs préférant les agences pour diverses raisons, notamment la sécurité. Mais pour autant, les ‘’informels’’ ont encore leur chance de survie. Ils ont fini de s’adapter à la nouvelle situation, en s’érigeant apporteurs d’affaires desdites agences de courtage.

 

Ils sont presque partout. Dans les compagnies, les institutions, les agences d’assurances, les cabinets et même dans les rues. Eux, ce sont les courtiers. Ou messieurs commissions. Loin de désigner une assemblée, permanente ou non, composée de personnes chargées d’une étude collective en vue d’effectuer une enquête pour délibérer sur les affaires publiques (commission d’enquête parlementaire) ou de connaître une action disciplinaire (commission de discipline), ces commissions sont tout autre. Ici, elles représentent la rémunération propre aux intermédiaires du commerce. Cette appellation provient ‘’du langage de la technique juridique et celui de la pratique commerciale. Elle est généralement calculée en fonction de l'importance de l’affaire traitée par leurs soins. Parmi les personnes percevant des commissions, figurent les courtiers, les apporteurs d’affaires, les commissionnaires et, d’une manière plus générale, les agents commerciaux’’, lit-on sur le Net. De plus, ils sont dans tous les domaines. Qu’ils soient maritimes, matrimoniaux, mobiliers et immobiliers.

En fait, les courtiers ont une fonction d’intermédiaire entre le propriétaire d’un bien et le client. Parfois même, ce dernier est une banque. Mais pas toujours le cas. ‘’Le rôle du courtier n’est pas seulement d’être un intermédiaire entre deux ou plusieurs parties. Il a également un rôle d’écoute, d’analyse et de conseil afin de trouver le meilleur financement et surtout le plus adapté à sa situation’’, fait savoir le responsable technique de Vip Assurances situé sur la route du Front de Terre. Un cabinet de courtage en assurances qui a ouvert ses portes en 2015. Ibrahima Mbaye d’indiquer que leur entreprise a obtenu son agrément avec une caution de 10 millions de francs Cfa et les documents y afférents auprès de la Direction des assurances du ministère de l’Economie, des Finances et du Plan, depuis un an. Auparavant, l’entreprise était une agence générale. Laquelle est différente d’un cabinet qui est une structure qui travaille pour son propre compte.

Concernant leur activité, il déclare : ‘’Nous intervenons entre le client et la compagnie. On essaye de les démarcher, avant tout, de les conseiller à propos du produit le plus adapté qu’il soit. En somme, nous travaillons sur les différentes branches en assurance’’. Toutefois, l’assureur et non moins courtier signale que 80 % de leur portefeuille, c’est en assurance automobile.

‘’Des apporteurs d’affaires’’

Mais difficile a été de faire parler les responsables des agences de courtage en immobilier. Comme s’ils s’étaient donné le mot d’ordre : silence. Les plus courtois laissaient entendre : ‘’Nous sommes désolés, mais le directeur est absent des lieux’’ ou qu’’’Il est en voyage.’’ Lui, Ibrahima Mbaye, a bien voulu répondre à nos questions, alors que son chef est hors du pays. Le responsable technique nous plonge dans l’univers de leur métier. ‘’Généralement, dans l’immobilier, c’est une personne qui veut un local ou un bailleur qui s’attache nos services.

Nous nous chargeons de leur trouver des clients ou des immeubles, selon les cas. Pour ça, il faut des personnes qui ont une proximité avec les gens et qui pourront essayer de trouver des clients. Ainsi, le courtier joue le rôle d’intermédiaire entre le client et le bailleur’’, avance-t-il. Mais aussi, poursuit-il, il y a l’agent général qui agit pour le compte de la société, alors qu’un courtier agit pour son profit. ‘’L’agent général travaille pour une agence. Et c’est la société qui le paie. Quant au courtier, il apporte des affaires moyennant commissions. Pour chaque affaire apportée, il gagne une commission qui dépend de la convention signée avec la compagnie’’, explique-t-il. En effet, le taux de la commission varie d’un contrat à un autre. ‘’Parfois, ce sont des taux de 20 % en automobile sur les contrats d’assurances’’, confie-t-il.

Et pourquoi l’acquéreur ou le locataire ont-ils besoin de s’attacher les services d’un courtier ? Ibrahima Mbaye rétorque : ‘’Peut-être le client n’a pas le temps d’aller tout le temps vers les compagnies. Dans le cadre de l’immobilier, une personne qui veut un local, elle n’a pas tout le temps d’aller dans ces endroits pour trouver un appartement. Elle préfère aller voir un courtier qui s’en chargera.’’

En outre, reconnaît ce diplômé en Master Assurance, même s’ils sont dans le milieu professionnel du courtage, il leur arrive de collaborer avec les courtiers qui sont dans le secteur informel. ‘’C’est ce qu’on appelle en assurance les apporteurs d’affaires’’, dit-il. Ce sont des gens qui ont une petite agence, qui sont près d’un garage ou sur une voie qui a beaucoup de véhicules ou des habitations en location. ‘’Là, on leur demande de prospecter les propriétaires pour nous apporter des affaires. Nous, en retour, nous leur proposons 18 %. C’est facile de travailler avec eux, dans la mesure où ils respectent leurs engagements’’, déclare-t-il.

Caution ou garantie

Chaussures bien cirées, pantalon gris assorti d’une chemise bleue avec des rayures, 2 téléphones portables à la main gauche, Seydou Diack s’active dans le secteur informel du courtage. Surpris en train de deviser avec ses amis au rez-de-chaussée d’un immeuble situé au rond-point Case-bi, il se définit tantôt agent commercial, tantôt courtier. Toutefois, il gagne désormais sa vie avec les commissions en pourcentage. Seydou Diack explique : ‘’Il suffit de savoir, dans tel ou tel endroit, s’il y a une chambre ou une maison à louer. Le propriétaire pose ses conditions. Supposons qu’il demande 2 mois d’avance, un troisième en guise de caution et de commission ; celle-ci étant non remboursable. Si le locataire est d’accord avec les conditions, le tour est joué. Nous percevons notre pourcentage. Généralement, c’est au terme des marchandages que nous arrivons à trouver un terrain d’entente.’’

Ainsi, si le client, après visite des locaux, conclut le marché, il ne va pas payer les frais de déplacement. Il ne paie que la commission. Au cas contraire, ‘’il paye la somme de 2 000 F Cfa et, avec cela, le courtier va acheter ses crédits téléphoniques ou assurer la dépense quotidienne’’, indique Seydou Diack, non sans affirmer que le métier nourrit bien son homme. ‘’Il peut arriver de gagner 30 000 F Cfa, rien qu’en début de mois. Il peut aussi y avoir des périodes de vaches maigres où on peut rester pendant 2 mois sans pouvoir finaliser un contrat’’, informe le jeune courtier. La cause ? Il laisse entendre que, souvent, ‘’le client lui-même préfère aller dans les agences pour verser 3 mois sur le même produit. Alors que nous, nous percevons même parfois 5 000 F Cfa. Ils nous sous-estiment. Alors que les courtiers sont là avant les agences et sans nous, ces dernières ne marchent pas. Il n’y a aucune agence qui a un produit et qui n’appelle pas un courtier pour l’en informer. Et là, le courtier a un pourcentage de 20 ou 30 % de commission’’.

Le courtier est également revenu sur le rôle des agences : ‘’Quand un propriétaire a fini de construire sa maison, il peut la confier à une agence immobilière. Il signe avec elle un mandat de gérance. Dans ce cas, il n’a plus de pouvoir sur la gestion de l’immeuble. Il est comme le locataire. A la fin de chaque mois, il va à l’agence pour récupérer son argent, en leur versant leur commission. Cela suppose que le locataire a déjà payé. Car si ce dernier ne s’acquitte pas de son devoir, l’agence ne pourra pas remettre au propriétaire son argent’’, explique-t-il.

Rappelant que les 2 mois d’avance sont une garantie ou une caution, l’agent commercial explique qu’ils se présentent en général sous la forme d’un dépôt de numéraires consignés chez le bailleur par le locataire et vise à garantir, en fin de bail, le paiement des charges susceptibles d’incomber à ce dernier. Il doit être limité à 2 mois de loyer sans les charges et est restituable en fin de bail. Et seuls les frais éventuels de remise en état des lieux susceptibles d’incomber au locataire peuvent être déduits de cette garantie.

Plus explicite, Seydou Diack dit : ‘’Le mois d’avance représente le dernier mois de paiement.  En sus, le client, après avoir quitté et remis les clefs, il faut faire l’état des lieux avec les propriétaires ou l’agence pour voir si le locataire n’a pas laissé des factures d’eau ou d’électricité impayées ou causé des dégâts matériels. Si rien de tout cela n’a pas eu lieu, l’autre mois étant une caution, on lui rembourse son argent.’’

Tout comme Seydou Diack, Makhfouss Bayo souligne que le courtage est une activité florissante. Avec beaucoup d’opportunités. ‘’L’immobilier rapporte gros et on peut y tisser beaucoup de relations humaines. On y rencontre beaucoup de gens. Il y a plein de choses à apprendre dans ce secteur’’, assure l’agent immobilier.

Pourtant, Ibrahima Mbaye de Vip Assurances relativise. Pour lui, le métier n’est pas si lucratif. ‘’Nous ne sommes pas comme les gens qui sont dans les rues. En tant que professionnels, nous avons beaucoup de charges. Aussi, se fixe-t-on des objectifs qu’on doit impérativement atteindre’’, lâche le spécialiste.

AWA FAYE

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