Publié le 20 Jul 2017 - 13:49
MEURTRE AVEC ACTES DE BARBARIE ET DE TORTURE

Elias Samb encourt la perpétuité, Gora Ndir risque 3 ans pour non dénonciation de crime 

 

Les accusés du meurtre d’Omar Barry ont comparu, hier, à la barre de la Chambre criminelle de Dakar. Si Elias Samb est en route pour les travaux à perpétuité, Gora Ndir encourt 3 ans de ferme pour non dénonciation. Délibéré, le 8 août prochain.

 

La scène est effrayante. Le corps sans vie d’Omar Barry est couché sur le dos à même le sol dans le couloir de son domicile sis au quartier Darou Khoudoss à Pikine. La bouche, les narines et les yeux sont couverts de sable. Les poches de son pantalon sont retournées et vidés de leur contenu. Le constat fait froid dans le dos. Il va l’être encore plus avec les résultats de l’autopsie. Car, le professeur Gisèle Wato Guèye souligne que la victime est morte par strangulation et suffocation avec des lésions traumatiques associées à la présence de sable obstruant les voies respiratoires. Les présumés responsables de cette atrocité sont Gora Ndir et Elias Samb. Ils ont comparu devant la Chambre criminelle de Dakar pour meurtre avec actes de barbarie et torture. Mais, il a fallu du chemin pour les appréhender.

Dès que le cadavre a été découvert, le 23 février 2011, les enquêteurs se sont mis en action. Des personnes ont été interpellées, notamment, le voisin de la victime, Mame Cheikh Diop.  Interrogé, il a déclaré avoir entendu des cris de douleur durant la nuit. Mais, il a eu peur de sortir, puisque que le quartier regorge de malfrats. Le lendemain, Pape Guèye l’a informé du drame. Ce dernier a raconté, qu’avoir avoir dîné ensemble, Omar Barry est parti avec Gora Ndir et Elias Samb. Sa déclaration a été confirmée par 2 autres témoins, Cheikh Diouf et Mamadou Faye qui ont signalé avoir croisé la victime avec les inculpés. Les policiers ont entrepris des recherches et su qu’Omar Barry était en état d’ébriété pour avoir bu de la bière  au bar ‘’Bon coin’’ puis au  ‘’Saf bar’’’ en compagnie de ses compagnons. Des pistes les ont conduits au village de Séwou (Kébémer) où Ndir s’était terré.

‘’ Du sable mis dans la bouche, le nez et les yeux de la victime pour l’empêcher de crier’’

Appréhendé, il a expliqué qu’au bar, Omar a commencé à casser des verres. Il s’est battu avec Elias Samb. Ensuite, il a révélé aux limiers que son co-accusé se trouvait chez un ami à Touba au quartier Darou Salam. Dans la ville sainte, Saliou Wade a renseigné que son hôte était retourné à Rufisque et qu’il ignorait qu’il avait commis un crime. A Dakar, les enquêteurs ont fait une descente au domicile d’Elias. Son grand-père a accepté de collaborer avec eux. Ainsi, l’accusé a été livré à la police. Entendu, Elias Samb a reconnu avoir perpétré le meurtre d’Omar Barry, de concert avec Ndir. Il a affirmé avoir suivi les instructions de son co-accusé. Ce dernier, a-t-il relaté, l’a assisté en maintenant les jambes de la victime, en s’asseyant sur sa poitrine et en mettant du sable dans sa bouche, son nez et ses yeux pour l’empêcher de crier. Toujours dans ses aveux, il a argué avoir remis à son copain la somme de 2000 FCFA sur les 5000 qu’il a volé à Barry. Ensuite, Elias Samb est revenu sur ses déclarations pour soutenir avoir agi seul. Que c’est à la suite d’une bagarre l’ayant opposé à Omar Barry qu’il l’a étranglé pour l’obliger à lâcher prise, car il l’avait mordu à la main. Quant à Gora Ndir, il a toujours contesté les faits.

Face au président de la Chambre criminelle, les accusés, placés sous mandat de dépôt depuis six ans, ont tenu une nouvelle version des faits. Le juge à Gora Ndir : ‘’Cheikh Diouf et Mamadou Faye ont dit que vous étiez dans un taxi avec Elias Samb, lorsque vous rameniez Barry chez lui…’’. Il rétorque : ‘’ Omar m’a donné deux téléphones pour que je les vende pour lui. Il était ivre et fatigué. Il a demandé à Elias de l’accompagner. C’est le lendemain que j’ai été informé de sa mort. J’ai appris qu’ils se sont bagarrés, parce qu’Omar Barry lui réclamait un des téléphones qu’il m’avait remis’’. Il ajoute : ‘’Je n’ai pas fui.  Si j’ai voyagé, c’est parce que j’avais prévu d’aller acheter et revendre de la marchandise à Kébémer. Lorsqu’Elias m’a dit qu’il l’avait tué, je lui ai dit d’aller à la police avec ses parents et expliquer les faits. Je ne savais pas que je pouvais le dénoncer dans n’importe quelle police. C’est avant d’arriver à Dakar que j’ai été arrêté. Omar était mon ami. Depuis 2008, on partage la même chambre’’.

Réfutant la thèse selon laquelle du sable a été mis dans des organes de la victime, Elias a déclaré que, lors de leur altercation, il l’a fait tomber et le sable est entré dans ses yeux, ses narines et bouche. ‘’Ensuite, je l’ai laissé là. Je suis reparti au bar. Avec Gora Ndir, nous sommes allés ‘’Chez André’’ pour danser. Je lui ai dit que je me suis battu avec Omar et il m’a répondu qu’il était juste ivre. C’est le matin que j’ai appris la nouvelle. Je suis allé avec lui dans la maison. Là, j’ai trouvé le corps sans vie Sur le coup, je n’ai pas parlé à la police de la bagarre’’, dit-il. Avant de poursuivre : ‘’Je suis allé à Touba. Gora y était déjà. Il m’a laissé chez son ami Saliou et il est parti à Kébémer. Quelques jours après, je me suis dit que je n’avais pas à fuir’’.

Me Dieng : ‘’Mon client a étranglé Omar Barry, parce que ce dernier l’avait mordu’’

Mais selon la parquetière, Ramatoulaye Ly Ndiaye, Elias n’a jamais cessé de tergiverser, tout au long de la procédure. Soutenant que son comportement est ‘’effarant’’, vu qu’il n’a rien regretté de son acte, elle a requis les travaux forcés à perpétuité.  Concernant Gora Ndir, le parquet a indiqué qu’il était au courant de la mort de son ami, mais n’a pas dénoncé le meurtrier. Ainsi, elle a demandé la disqualification les faits retenus contre lui en non dénonciation de crime et de le condamner à 3 ans et à une amende d’un million de FCFA. Venant à plaider, le conseil de Gora Ndir a déclaré que le ministère public, malgré son enquête ‘’savamment’’ menée n’a apporté aucune preuve tendant à asseoir la culpabilité de son client. Il a sollicité l’acquittement pur et simple.

‘’Ici, il n’y a qu’un prétendu acte de torture et de barbarie. Le certificat médical met en première position l’asphyxie et la suffocation dues à des coups et blessures. Les supposés actes de torture et de barbarie n’ont pas été directement visés’’, a fait remarquer l’avocate de Samb. Sur ce, Me Marguerite Dieynaba Fall a demandé à la Chambre de disqualifier les faits en coups et blessures volontaires ayant entrainé la mort sans l’intention de la donner. Son confrère se veut plus explicite. Me Moustapha Dieng  avance que le certificat de genre et mort ‘’ne nous renseigne sur rien’’. ‘’Il parle de lésions traumatiques associées à du sable obstruant les voies respiratoires. Mon client vous dit qu’il l’a étranglé, parce que c’était le seul moyen pour lui d’arrêter la douleur de la morsure. Même cette description ne prouve pas l’élément intentionnel. L’expert ne nous dit pas la cause précise de la mort. C’est la rigueur scientifique qui doit nous éclairer sur la cause exacte de la mort. Elias Samb vous dit qu’il pense qu’il était en vie en le quittant’’, a-t-il souligné.   

La Chambre criminelle va se prononcer au 8 août prochain.   

AWA FAYE

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