Publié le 26 Jun 2015 - 13:31
MILIEU SCOLAIRE AU SENEGAL

Près de 2 000 grossesses précoces, entre 2010 et 2014

 

La situation sur les grossesses précoces  est très préoccupante. Une étude a montré que 1 971 grossesses sont survenues en milieu scolaire entre 2010 et 2014. La région de Sédhiou enregistre le plus grand taux avec 30%.

 

Les grossesses précoces sont devenues monnaie courante dans les établissements scolaires du Sénégal. Le phénomène a pris de l’ampleur, ces dernières années, et inquiète les parents. Une étude sur ces grossesses initiée par le Groupe pour l’Etude et l’Enseignement de la population  (GEEP), en collaboration avec le Fonds des Nations unies pour la population (UNFPA), présentée hier, sur le territoire national, renseigne que 1 971 grossesses sont survenues en milieu scolaire, entre 2010 et 2014. Ces grossesses concernent des filles âgées de 13 à 19 ans. Pour parvenir à ces résultats, l’enquête a ciblé, entre autres, les autorités scolaires, les responsables des structures sanitaires, les parents d’élèves, les élèves filles tombées enceinte.

Pire, Mamadou Khouma, inspecteur de l’enseignement moyen secondaire à l’inspection de Diourbel et présentateur du rapport, renseigne que la majorité des grossesses recensées concernent des filles qui fréquentent les classes entre la 6ème et la 3ème, soit 71,9%. ‘’28,1% des grossesses concernent des élèves qui sont entre la Seconde et la Terminale. C’est à partir de la classe de 4ème que le nombre de grossesses concernent les filles entre 18 et 19 ans’’, a souligné M. Khouma. Le rapport renseigne aussi que la majorité des filles-mères est constituée de célibataires, soit un pourcentage de 60,8%, contre 39,2% de filles mariées au moment de la grossesse. ‘’La répartition du statut matrimonial, selon la localité, révèle des disparités. Ainsi, dans les régions de Ziguinchor, Sédhiou, Tambacounda, 60,75% des grossesses concernent des célibataires. Par contre à Kaffrine, Thiès, Louga et Diourbel, les filles-mères constituent en général des filles mariées.

Sédhiou, région la plus touchée avec 30% de grossesses

La région de Sédhiou est la localité où on enregistre une plus grande proportion de grossesses précoces. Elle est de 30%, suivie de la région de Ziguinchor qui est à 19% et Kolda à 9%. ’’Les cinq autres régions : Matam, Thiès, Kédougou, Saint-Louis et Fatick enregistrent entre 5 et 6% chacune.   Pour Kaffrine, Dakar, Diourbel, Louga, Kaolack, le taux se situe entre 4% et 2%’’. En outre, à l’intérieur des régions, souligne M. Khouma, les statistiques obtenues montrent des disparités en fonction des départements. Ainsi pour la région de Ziguinchor, le département de Bignona enregistre le plus grand nombre de grossesses précoces, suivi du département d’Oussouye. A Kolda, c’est le département de Vélingara qui vient en tête suivi de celui de Médina Yoro Foula. Pour Fatick, c’est Foundiougne qui a le plus grand nombre de cas. ‘’Le nombre de grossesses constatées, entre 2011 et 2013, a connu une augmentation. Mais si l’on tient compte de la localité, on constate une baisse, entre 2013 et 2014, sauf à Kolda, Fatick, Diourbel et Tambacounda’’, a expliqué Mamadou Khouma.

Les élèves sont les principaux auteurs des grossesses

L’étude s’est également intéressée aux auteurs présumés des grossesses des filles célibataires. Ceux-ci, selon l’étude, appartiennent à toutes les catégories socioprofessionnelles. Contrairement à ce que l’on aurait pu imaginer, les résultats révèlent que la moitié des cas sont l’œuvre des élèves eux-mêmes. ‘’49% des cas sont l’œuvre des élèves. Les étudiants arrivent en seconde position, avec un pourcentage de 11,12%. Les jeunes des villages sont également cités parmi les principaux auteurs, avec 8,60%. Ainsi les élèves, étudiants et les jeunes des villages constituent 70,95% des auteurs de grossesses’’, révèle Andréa Wojnar Diagne, représentante de l’UNFPA au Sénégal.

A l’en croire, les adultes, enseignants ou autres ne sont pas acteurs majoritaires dans le phénomène des grossesses en milieu scolaire. Les enseignants représentent 2,02%.

La vulnérabilité, principale cause

L’objectif de cette étude, explique Mamadou Khouma, est de mieux comprendre le phénomène des grossesses précoces en milieu scolaire, dans la perspective de faire des propositions allant dans le sens d’une politique efficace de prévention et de prise en charge de ce phénomène. Les grossesses résultent de plusieurs facteurs liés à la situation de vulnérabilité des jeunes filles. Celle-ci est en relation avec l’environnement social et scolaire, explique l’enquête. Certaines filles sont victimes d’atteintes et de pressions à caractère sexuel provenant à la fois de leurs pairs et d’adultes qui profitent de leur manque de maturité. En outre, l’éducation sexuelle au sein des familles et à l’école n’est pas suffisamment développée. La sexualité demeure un sujet tabou.

Cette situation n’est pas sans conséquences. Elle rejaillit sur les performances scolaires des élèves filles. 54,43% des filles tombées enceintes abandonnent leur scolarité. 39,39% redoublent leurs classes. Seules 15,16% parviennent à reprendre leurs études. 

VIVIANE DIATTA

Section: