La décision du gouvernement de permettre l’importation de 70 000 t de sucre passe mal, du côté de Richard-Toll. Lors d’une grande marche organisée hier, les populations ont étalé leurs craintes et brocardé le gouvernement.

‘’La Css, notre bien commun’’ ; ‘’Vous avez vos Dipa (déclaration d’importation de produits alimentaires), on a nos cartes d’électeur’’ ; ‘’Ne me cherche pas président, 2019 n’est pas loin’’ ; ‘’Protège mon emploi président, sinon’’ ; ‘’Alioune Sarr démission’’. Voilà un florilège des messages contenus dans des pancartes que les populations de Richard-Toll ont voulu faire passer, hier, lors de leur marche de protestation contre la décision gouvernementale d’autoriser l’importation du sucre.

La manifestation a drainé un monde fou. Du stade municipal à la mairie, sur une distance de près de 4 km, femmes, jeunes, vieux, éleveurs, agriculteurs, syndicalistes et cadres de la Css ont bravé la chaleur pour montrer leur amertume au chef de l’Etat. Ils protestent contre la décision autorisant l’importation de 70 000 t de sucre.

Au terme de leur marche de protestation, Louis Lamotte, conseiller du Dg de la Css, a fait face à la presse pour brocarder le régime actuel et les ‘’magouilleurs’’ à qui on a donné les quotas d’importation. ‘’La Css décaisse, par mois, 1 milliard, pour payer des salaires ; 2 milliards, par an, pour donner de l’eau gratuitement aux agriculteurs. Nous avons amélioré le plateau technique de notre poste de santé au profit des populations de Richard-Toll et environs. Nous donnons aussi aux éleveurs de la paille, alors que ces gens-là, à qui on a donné le quota d’importation, cherchent du gain pour leurs propres intérêts’’, s’est désolé Louis Lamotte.

En sueur, du fait de la canicule, Lamotte a apostrophé le régime. ‘’La Css est à l’article de la mort. Elle est en train d’être sacrifiée à l’autel des appétits des Dipa qui sont devenues des monnaies fiduciaires, qui peuvent rendre riches. On est en train de sacrifier des familles entières, pour engraisser des amis. Mais nous osons croire que Macky Sall a été lourdement trompé’’, a-t-il dit.

Le conseiller de rappeler au chef de l’Etat sa récente décoration à Paris pour ses mérites dans l’industrie. ‘’Le meilleur signal pour justifier ce prix est de dire que les importations tuent la Css et cela équivaut à tuer des milliers de pères de famille’’.

En effet, il ne peut comprendre que le président Sall, qui aspire à un second mandat, puisse se comporter de la sorte.   Pour M. Lamotte, ce qui se passe est une catastrophe économique qui va engendrer un péril social et qui mène directement vers un chamboulement politique. Il pense que, s’il y a un gap, c’est à l’industriel, qui détient ce monopole, d’importer et non à des ‘’baana-baana’’. Avant de rappeler que le gouvernement n’a pas respecté sa promesse vis-à-vis de la Css qui consiste à ne pas importer du sucre jusqu’au mois de juin 2019. 

La lettre de la Primature

‘’Une lettre nous a été adressée pour ça par la Primature et le ministère du Commerce’’, renseigne Louis Lamotte. Le conseiller du Dg de la Css trouve injuste que les gens se précipitent à importer du sucre, alors que 11 000 t produites par des Sénégalais sont en souffrance dans leurs magasins.  Il en profite pour réfuter les supputations selon lesquelles le sucre est cher. ‘’Le problème, c’est l’incapacité du gouvernement a donné du travail aux citoyens. Il avait promis 200 000 emplois, mais on est désolé de voir qu’il est incapable de respecter ses promesses’’, charge-t-il.

Très en verve, Louis Lamotte avertit : ‘’Tout ce monde, dehors, tire son revenu de la Css. Si l’Etat veut l’affronter, il n’a qu’à continuer sur le chemin choisi.’’  ‘’Si le Walo vit, c’est grâce à la Css. Tout se centralise autour de la compagnie et si elle plie bagage, c’est la mort de la région du Nord. Nous sommes le poumon de cette région’’, martèle-t-il. 

Après avoir fini son réquisitoire sévère contre l’importation du sucre, Louis Lamotte a cédé sa place au secrétaire général de la Cnts-Css, Makhary Samb dit ‘’Poker’’ qui, au nom des centrales syndicales, a fait la lecture du mémorandum. ‘’Nous allons faire face à ce péril par tous les moyens appropriés pour contrer ce gouvernement et son ministre du Commerce dont les errements et les ambitions électoralistes aboutiront à sacrifier 8 000 travailleurs’’.

Makhary Samb de se rappeler la fermeture de beaucoup de sociétés très compétitives et pourvoyeuses d’emplois, à cause des importations sauvages et de la fraude : Sotiba, Icotaf, Senembal, Sotexka, Amerger, Sapal, Senepeska et autres. Poursuivant la lecture du mémorandum, le syndicaliste a demandé, au nom des travailleurs, à l’Etat du Sénégal de rétablir les conditions et l’environnement aptes à favoriser le fonctionnement correct de la Css, en vue de la réalisation de l’autosuffisance en sucre du pays. Ceci, dit-il, n’est possible que par une moralisation de la délivrance des Dipa.