Publié le 27 Aug 2015 - 01:40
MOUSSA DIAW, ENSEIGNANT-CHERCHEUR EN SCIENCES POLITIQUES

‘’Le Pds n’a plus l’énergie pour s’opposer au camp présidentiel’’

 

Après l’échec des manifestations organisées par le Parti démocratique sénégalais (Pds) et ses alliés du Front patriotique pour la défense de la République (Fpdr), Moussa Diaw, enseignant-chercheur en sciences politiques, diagnostique la situation actuelle du parti de Me Abdoulaye Wade.

 

Le Pds et ses alliés du Fpdr n’ont pas réussi à mobiliser beaucoup de monde lors de leur dernier meeting. Quelle lecture en faites-vous ?

C’est vrai que le Pds et le Fpdr ont pris l’initiative de tenir une manifestation pour soutenir Karim Wade et en même temps demander sa libération. Mais leur entreprise ne pouvait en aucun cas réussir à cause des circonstances. D’abord, le contexte social fait que les gens ne sont plus enclins à aller dans des manifestations. Les Sénégalais sont plus préoccupés par les difficultés qu’ils sont en train de vivre. En outre, les militants se fatiguent au fur et à mesure que les manifestations se déroulent.  A force de marcher, les militants vont lâcher. Il y aura peu de personnes. Le meeting de vendredi dernier montre bien que les capacités de mobilisation du Pds se sont affaiblies au regard de la situation qui prévaut dans cette formation politique. Ensuite, le décès du tambour-major Doudou Ndiaye Rose fait que ce n’était pas le moment propice pour organiser des manifestions. D’ailleurs je ne comprends pas pourquoi le gouvernement a tendance à  interdire les marches  puisque c’est un droit conféré par la constitution.

Est-ce que les libéraux ont les moyens pour faire face au camp présidentiel ?

Le Pds d’aujourd’hui n’est plus ce qu’il était avant. Parce que le Pds qui était au pouvoir était un parti qui avait des ressources et par ricochet avait une capacité de mobilisation. Le parti était plus ou moins uni malgré quelques dissensions mais, maintenant, le parti est éclaté. Il n’a plus de force même s’il y a quelques leaders, comme Oumar Sarr, qui tiennent un discours très belliqueux mais le Pds n’a plus l’énergie nécessaire pour s’opposer à la majorité. Ça, c’est indéniable. Maintenant que lui reste-t-il à faire ? Peut-être resserrer les rangs et puis mener la résistance comme le dit l’ancien président Abdoulaye Wade. Cependant la tâche sera très difficile. 

Pensez-vous que c’est une bonne stratégie que d’organiser des meetings pour réclamer la libération de Karim Wade ?

Je ne sais pas. Tout ce que je peux dire, c’est que le Pds traverse une crise qui est liée à la situation politique du pays. Il y a une possibilité d’éclatement du parti même si on ressent une forme de solidarité par rapport à la situation de Karim Wade. Sur ce cas, Abdoulaye Wade s’est mis à la tête de la résistance mais sa démarche cache mal les difficultés auxquelles est confronté le Pds aujourd’hui. Le parti est, en partie, laminé par des dissensions internes et par un manque de leadership même si Wade est là et maintient les rênes du pouvoir au sein de cette formation politique.

 Quelles sont les conséquences de la décision de la Cour suprême sur le fonctionnement interne du Pds ?

Il y a la confirmation du jugement de la Cour de Répression de l’Enrichissement illicite (Crei) qui a condamné Karim Wade à six ans de prison. On entend des leaders dire qu’ils vont continuer le combat à l’extérieur, qu’ils vont internationaliser le combat judicaire, mais cela n’aura pas d’effet. La Cour suprême a rendu son arrêt, maintenant le seul salut qui lui reste, c’est une grâce présidentielle. Seul le président de la République peut le faire sortir de prison et cela dépendra de la situation politique du pays. Ce qui veut dire que le Pds n’a plus les mêmes forces. Il est tiraillé dans des querelles intestines entre les différents leaders. Chacun essaye de se positionner. Ça m’étonnerait qu’il puisse tenir une mobilisation à la hauteur des enjeux. En tout état de cause, le prolongement de la détention de Karim aura des conséquences parce que le Pds l’avait symboliquement choisi comme candidat à la prochaine élection présidentielle. Bien entendu, il faudra trouver une alternative et c’est cette alternative qui risque encore d’aggraver les querelles au sein du Pds.

EL HADJI FALLILOU FALL (STAGIAIRE)

 

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