Publié le 5 Jan 2019 - 09:50
NOTE DE LECTURE ‘’SEN NJAXASS’’

Diagnostic et thérapie du G8 pour un Sénégal différent

 

‘’Sen Njaxass’’ (Cocktail Citoyen) est un petit livre de 106 pages qui a les allures d’un manifeste citoyen. Publié aux éditions L’harmattan par le G8, qui est un collectif composé de 8 jeunes intellectuels sénégalais, le livre fait une radioscopie presque exhaustive des maux dont souffre le Sénégal. Il sera présenté au public ce samedi 5 janvier, à la maison d’édition L’Harmattan. La cérémonie sera suivie du lancement du mouvement citoyen Sen Njaxass.

 

Conscients des périls qui guettent l’Afrique, le Sénégal en particulier, huit jeunes, dans un élan de patriotisme, décident de mettre en commun leurs idées, forces et savoir-faire pour impacter la marche de la République. ‘’Y allant de leur propre feeling iconoclaste et innovant, leur capacité d’indignation donne un patchwork fait d’étoffes colorées et de gammes différentes. Des textes rivalisant de rigueur et de frivolité’’, écrit le préfacier Elimane Haby Kane dans la quatrième de couverture. C’est ce qui explique d’ailleurs le titre ‘’Sen Ndjaxass (Cocktail Citoyen)’’ : un mélange de folie, d’humour, de sérieux, d’activisme, de bureaucrate, d’universitaire…. Njaxass, c’est tout ça à la fois.

Malgré le pessimisme ambiant qui gagne de plus en plus la jeunesse africaine, sénégalaise, le livre renseigne qu’il est bien possible de renverser la tendance, sortir le continent de la misère et l’installer définitivement sur une rampe de développement.  Il suffit d’y croire et de s’en donner les moyens, renseigne Bachir Coly dans ‘’La fierté nationale face aux temps embrumés’’.

‘’Deuk bi doudem’’. Cette phrase anodine qui, selon Bachir, revient souventefois dans les discussions, révèle la profondeur du mal : le désespoir du peuple et le découragement de ses élites. A l’en croire, la pire arme contre le développement de notre pays, c’est le renoncement, les attitudes défaitistes... Et Le directeur des opérations à L’harmattan croit ferme que la fierté nationale doit être mise en avant dans tous les secteurs : diplomatie, économie, gouvernance, partout.

Mais la fierté sans l’engagement ne servirait pas à grand-chose, semble dire Mame Ngoné Faye dans ‘’Ce que les ventres gargouillent’’. Mlle Faye, à travers la liberté de ton et d’esprit de l’artiste, montre ce que l’engagement patriotique, la défense de la vérité et des valeurs doivent être pour tout un chacun. Elle met en scène un artiste en pleine conférence publique de conscientisation des masses, le maitre qui incarne le pouvoir, le public dont une jeune dame qui est la seule à partager les convictions de l’artiste ‘’impétueux’’. Interrompu net par le maitre qui lui demande : ‘’Dis-moi, fou, poète, artiste, qu’importe d’ailleurs ! Dis-moi que signifie tout ceci ?’’ Il rétorque : ‘’Ceci est une causerie pour tenter de réveiller l’inconscience collective et ainsi mettre les pieds dans le plat. Les pieds dans le plat d’une société indisciplinée et déviante  qui s’acoquine avec la fange, qui est en pleine aliénation culturelle et comme si cela ne suffisait pas, est victime d’un Pantagruel gourmand, traine-savate, narcissique, mégalomane et j’en passe.’’ Le maitre est dans tous ses états. Il tente de se contrôler tant bien que mal, face à l’artiste qui persiste et signe. Il se fait alors plus menaçant devant les vérités crues qu’on lui crachait à la figure, en invitant le ‘’rebelle’’ à ranger son mégaphone pour avoir la vie sauve. La leçon de l’artiste est simplement admirable. ‘’Que serait une vie sans risque ? Il faut se battre pour obtenir ce que l’on veut. Et surtout se battre pour ce en quoi l’on croit’’, lui dit-il comme pour appeler les citoyens à accepter même de mourir pour les grandes causes, pour l’amour de leur pays, de la vérité.

Dès lors, il devient un danger aux yeux du maitre qui réclame sa mort. Le ‘’peuple’’, dans sa naïveté légendaire, cria ‘’A mort !’’…

Chez nous, on a l’habitude de prendre les dirigeants comme responsables de tous les maux dont souffrent les populations. Pour Alassane Alioune Fèré Mbaye, il serait réducteur de tout mettre sur le dos des dirigeants. Le mal, selon lui, est profond et n’épargne aucune couche de la population : les marabouts, les hommes d’affaires… C’est l’homosenegalensis  tout simplement qui doit être remodelé, si l’on en croit Alassane. Il déplore : ‘’Nous avons pris un mauvais départ qui montre une fois de plus que nous ne sommes pas prêts à souffrir pour nous fabriquer un destin moins tragique.’’ La société sénégalaise, selon lui, n’est pas prête à emprunter l’allée épineuse de son rendez-vous avec l’émergence. L’auteur d’exposer la population dans toute sa vilenie : le charlatanisme, la quête du gain facile, l’incivisme, l’indiscipline caractérisée, rien n’est laissé au hasard par le journaliste au quotidien national ‘’Le soleil’’. Pour soigner le malade de ces multiples pathologies, il prescrit un changement de paradigme.

‘’Une alternative citoyenne’’, dira Papa Matar Diallo dans sa contribution du même nom. Le chroniqueur de la Sen Tv peint dans un tableau très sombre le bilan des différents régimes qui se sont succédé à la tête du Sénégal depuis les indépendances. Il met en exergue : le manque de courage, l’absence de vision, de volonté, les mauvaises orientations politiques, les institutions budgétivores et inutiles, les recrutements clientélistes, la corruption, la cupidité des dirigeants, j’en passe. Pour lui, le mot qui sied le mieux pour caractériser la trajectoire de notre nation, c’est l’‘’échec’’. Un changement de système s’impose, de l’avis de PMD.

Mor Amar, dans sa contribution sous forme de nouvelle, semble dire la même chose. Il appelle la jeunesse à prendre ses responsabilités et à ne pas laisser son avenir entre les mains de politiciens véreux. Car, écrit-il, le changement ne vient jamais d’en haut, mais des populations elles-mêmes. Dans ‘’Le mur des lamentations’’, le journaliste de ‘’EnQuête’’ dénonce la passivité de la couche juvénile, levier incontournable pour le changement. Il met en scène Badolo, symbole du Sénégalais pessimiste qui ne croit plus au développement, et Albert, homme optimiste, qui jure de ne jamais baisser les bras. ‘’La lutte pour l’émancipation et le développement, indique ce dernier, ne se gagne pas en un jour… Les souffrances des populations ne se panseront pas en une élection’’.

Pour sa part, Dieynaba Sarr, juriste spécialisée en relations internationales, a salué les performances du Sénégal en matière diplomatique, non sans décliner sa vision pour une diplomatie encore plus forte et performante. ‘’Quelle posture du Sénégal en Afrique après 2019 ?’’, s’interroge-t-elle dans ‘’Vol Sn Sénégal 2019 : Pour un Sénégal fort et dynamique à l’extérieur’’. Pour Mlle Sarr, le Sénégal à l’horizon 2019 doit non seulement se pencher sur la réévaluation de ses relations avec la France, mais aussi essayer de s’ouvrir davantage au reste du monde.

Pendant ce temps, Thierno Niang prône un smart  power fait d’un soft et hard power pour résoudre définitivement la question casamançaise. Quant à Aboubacar Sadikh Top, il appelle de tous ses vœux l’avènement, au Sénégal, d’une presse libre et indépendante. A l’en croire, le principal problème des organes de presse, ce sont les moyens financiers. Il faut donc embellir l’environnement, permettre aux médias de s’assurer une autonomie financière en vue de jouer pleinement leur partition.

Les jeunes du G8 vont lancer le même jour le mouvement Sen Njaxass pour apporter leur pierre à l’édification d’un Sénégal prospère.

Mame Talla Diaw

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