Publié le 13 May 2019 - 19:17
NOTE DE LECTURE

Les dures réalités de la polygamie

 

Et de deux pour l’avocat Me Serigne Amadou Mbengue ! Après ‘’La Persévérante’’, le juriste-romancier sert à ses lecteurs un nouvel ouvrage qui parle essentiellement de la polygamie : ‘’La rivale’’.

 

Tristesse, désolation, amertume, plein de rancœur et de rancune dans ‘’La rivale’’. C’est le titre du dernier ouvrage de Me Serigne Amadou Mbengue, édité par L’Harmattan. L’auteur vous conduit dans un voyage très tumultueux, dans le monde de la polygamie, avec ses polémiques, ses disputes, ses peines, ses supplices, bref, ses dures réalités capables de tourmenter même les plus forts. Après une première parution intitulée ‘’La Persévérante’’, Me Mbengue sort ce roman.  Dans les deux ouvrages, l’héroïne s’appelle Mamy Diop.

Le deuxième livre publié n’est, en effet, que la continuité du premier. Femme de presse, elle est brave, coquette et a du caractère, sans être belliqueuse. Un beau jour, elle décide de quitter le journalisme pour terminer ses études de Maitrise et embrasser un nouveau métier. Son mari, par jalousie, est réticent ; mais hypocrite, il ne dit rien. Lui qui n’a jamais pu obtenir le Bac, malgré moult tentatives. Il n’empêche qu’à force de persévérer et en partie grâce à l’entregent de son père, il a pu devenir un comptable réputé et respecté dans le monde des affaires.

Modou, le mari jaloux, tentera ainsi de masquer tant bien que mal son sentiment. Bien que parfois confondu par son humeur non entièrement dissimulable. C’est le début d’une crise latente dans le ménage. Au grand désarroi de Mamy la battante.

 Après un premier mariage qui n’a pas marché, Mamy fondait beaucoup d’espoir sur cette nouvelle union avec un riche fils d’un ‘’expert  dakarois’’, Modou Mbaye, son amour d’adolescence. Naïve, elle ne s’est pas rendue compte que son macho de mari n’était pas au fond d’accord sur sa décision de retourner à l’université. Ainsi, fonce-t-elle pour réaliser son rêve. Et après 9 mois de parcours, à un rythme infernal, elle réussit avec brio son examen.

Le précieux diplôme en poche, Mamy, dans sa voiture, dans une course folle, s’impatiente. Elle veut que son mari soit le premier avec qui elle va partager son bonheur. Mal lui en a pris. "Le visage rayonnant de Mamy, écrit l'auteur, ne pouvait passer inaperçu. Avec une euphorie indomptable, elle annonça la nouvelle à son époux, mais a failli tomber des nues, tétanisée par la réaction indifférente de son époux, l’une de ces réactions qui vous laisse sans mot’’. Les lignes glacent même le lecteur.

Comme dans un roman d’Agatha Christie, après le premier malheur, les déceptions vont crescendo. Après la désillusion suite à l’obtention du diplôme, elle devra faire face au parti pris manifeste de son époux à l’égard de sa ‘’rivale’’. La dernière en date, la plus dure à digérer, restera sans doute le choix de Modou de rejoindre son nouveau travail à Paris avec sa première, Fanta et ses enfants. Celle-là même qui, dans la maison, de connivence avec ses rejetons, les seuls de Modou, fera subir à Mamy toutes sortes d’épreuves. Sans être mauvaise, Fanta considère en fait cette dernière comme une intruse dans son foyer jusque-là très paisible. ‘’Dans les tréfonds de sa pensée, dans les abysses de sa logique, dans les profondeurs de sa conscience, Mamy était perçue comme un élément d’extranéité dans la vie du mari d’alors’’. Elle n’hésitait pas à faire usage de cette arme qui a souvent été fatale à Modou.

Le livre est aussi un condensé des mille et une difficultés qui rythment la vie professionnelle. Surtout dans le milieu concurrentiel de la presse et de la télévision. Les petites querelles, les scènes de médisance, les coups de couteau dans le dos, l’auteur, avec son style, vous plonge dans le quotidien des entreprises de presse.

Si vous avez été étudiant, le voyage avec Amadou Mbengue vous rappellera sans doute plein de beaux souvenirs du campus. Soucieux du détail, l’avocat vous transporte à nouveau dans les allées bondées de l’université Cheikh Anta Diop de Dakar, de la faculté de Droit, avec son décor presque inchangé depuis belle lurette : les deux bâtiments en bleu-blanc, le grand qui abrite les amphis de 1re et 2e année, le jardin… Puis, il vous ramène au campus social avec son ambiance habituelle : les visites inopinées dans les chambres, les discussions puériles, les séances de thé, la perte énorme de temps... Maitre Mbengue ne se limite pas à cela. Il emmène le lecteur dans la vieille ville de Rufisque, avec ses endroits mythiques comme Cèdres, la salle des fêtes qui étaient des lieux de rencontre par excellence de tout Rufisquois bon vivant à l’époque.

Le juriste-écrivain vous fait également découvrir pleine de notions dans les domaines notamment du journalisme, de la médecine ainsi que dans divers autres secteurs. Sans oublier sa description très incitative de Paris et de ses nombreuses merveilles. Avec lui, on fait le tourisme sans bouger d’où l’on est.

Ironie de l’histoire : Modou va contracter une maladie mystérieuse dans la capitale française où il a été affecté. Fanta, opportuniste, le rapatrie au Sénégal, après avoir convaincu Mamy de s’en occuper. Or, cette dernière avait déjà entamé une procédure de divorce. Mais elle a tout abandonné pour le bien de son époux alité.

Comment Fanta a-t-elle réussi cette prouesse ? Mamy parviendra-t-elle à sauver son mari ? Et s’il meurt, qu’adviendrait-il de son riche héritage ? Fanta a-t-elle dit son dernier mot ?

MOR AMAR

 

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