Publié le 10 Apr 2019 - 02:22
NOUVELLE MINISTRE DU COMMERCE ET DES PME

Assome Aminata Diatta liste les priorités de son équipe

 

Choisie par le chef de l’Etat Macky Sall pour diriger le ministère du Commerce et des Petites et moyennes entreprises (Pme), lors de son dernier quinquennat, Assome Aminata Diatta se prononce sur les priorités de son équipe pour mener la mission qui leur est confiée. Dans cette interview, elle revient également sur sa rencontre avec son mentor et l’équation des grandes surfaces.

 

De la Direction du Commerce extérieur, vous êtes nommée ministre du Commerce et des Pme. Est-ce que vous pouvez revenir sur votre cursus ?

Je suis dans le département du Commerce depuis 2006, plus précisément au mois de juillet, dès notre sortie de l’Ecole nationale d’administration. C’est un département que je n’ai quitté que pour une courte période ; d’abord, pour une formation en gestion de la politique économique à l’université de Cocody, à Abidjan. Ensuite, pour travailler comme conseillère de Mme le Premier ministre Aminata Touré d’abord, et ensuite de Mouhammad Boun Abdallah Dionne. C’est un ministère où j’ai quand même effectué l’essentiel de mon service. Aujourd’hui, ma nomination à la tête du ministère n’est qu’un prolongement. 

Parlez-nous de votre rencontre avec le chef de l’Etat. Est-ce que vous vous êtes connus à Fatick où vous étiez chef du Service régional du commerce en 2012 ?

(Rire) Non, Monsieur le Président de la République, je ne l’ai pas rencontré à Fatick. Il est vrai qu’une de nos relations communes, Makhtar Diouf, a essayé plusieurs fois d’organiser la rencontre. Mais compte tenu des charges du président et du besoin qu’il avait de faire le tour du territoire national, elle n’a pas eu lieu. Donc, ma première rencontre avec lui date de 2016, à l’occasion de la visite du directeur général de l’Organisation mondiale du commerce, Roberto Azevêdo, lors de l’audience que le chef de l’Etat lui a accordée. Le ministre du Commerce, Alioune Sarr, a bien voulu que j’accompagne la délégation. Et c’est ainsi que je l’ai rencontré. Mais, avant cela, nous étions sur le terrain politique, plus particulièrement à Ziguinchor, où nous étions investis pour mobiliser les populations, en vue du référendum de 2016. Mais aussi pour fidéliser les militants du président de la République.

Comme vous l’avez déjà évoqué, vous êtes en terrain connu. Donc, quelles sont les priorités pour votre équipe ?

Il y a déjà un travail entamé. Aujourd’hui, nous ne pouvons pas parler du commerce en ignorant la Zone de libre-échange continentale africaine (Zlecaf). Qui, d’ailleurs, a réuni le nombre de ratifications nécessaires pour son entrée en vigueur. Donc, il faut considérer que cette zone de libre-échange est une priorité pour notre pays. D’autant plus que le Sénégal réalise plus de 40 % de ses exportations sur le continent africain. Il y a également d’autres priorités. Parce qu’elles vont naturellement dans le sens des orientations du président de la République. Le chef de l’Etat accorde une importance particulière à l’emploi des jeunes. Et nous avons entamé, depuis quelques mois, des travaux en vue d’élaborer deux stratégies. Une sur le commerce des services et l’autre sur celui électronique.

Le commerce de services est un secteur extrêmement important de notre économie. Plus de 59 % de notre produit intérieur brut (Pib) est constitué de services. C’est aussi un secteur qui emploie plus de 40 % de notre population. Donc, ce n’est pas négligeable. Et à chaque fois que l’emploi quitte le secteur primaire, il ne transite pas vers le secondaire. Il va directement vers le tertiaire. Ce qui signifie qu’il est essentiellement absorbé par les services. Aujourd’hui, pour créer beaucoup d’emplois, il faudrait s’intéresser au secteur des services. Il y a également un secteur qui est un grand pourvoyeur d’emplois dans les services. Il s’agit de celui des services fournis aux entreprises. Dans un pays comme la France, qui dispose déjà des statistiques, c’est un secteur qui emploie 3 millions de personnes. Donc, c’est extrêmement important. Puisque l’objectif du président de la République, c’est de créer au moins un million d’emplois durant ce quinquennat. Donc, nous voulons beaucoup nous appuyer sur ce secteur pour l’aider à concrétiser cette ambition.

Quand on parle du commerce et de Pme au Sénégal, on parle d’informel. Comment comptez-vous vous y prendre pour la formalisation du secteur ?

L’idée que nous avons, c’est de continuer de nous appuyer sur les services. Parce que celui des services fournis aux entreprises est un secteur qui permet d’appuyer les entreprises. Donc, les aider à être plus performantes. L’idéal, pour nous, c’est non pas de limiter l’action d’appui aux Pme, à travers le travail des structures étatiques - ainsi, il sera assez difficile de couvrir toutes les entreprises - mais plutôt d’encadrer les entreprises de services. Ce sont elles qui vont aider d’autres entreprises à se développer. Elles vont servir également, quelque part, d’interface entre l’Administration et une partie des entreprises. Par la même occasion, ce sont des entreprises qui vont se formaliser et ainsi, nous pensons que nous pourrons réduire le taux d’acteurs informels noté dans le secteur.

Il y a aussi le débat sur les grandes surfaces qui a fait couler beaucoup d’encre, l’année dernière, et même un décret a été signé par le chef de l’Etat pour réglementer le secteur. Quelle analyse en faites-vous ?

La chance que nous avons déjà pour ce secteur de la distribution, c’est que le Sénégal, en prenant ses engagements à l’Omc, n’a pas consolidé ce domaine. Il y a beaucoup de dispositions sur lesquelles le Sénégal peut revenir. C’est la raison pour laquelle nous avons beaucoup plus de flexibilité, pour mieux réglementer ce secteur. Mais le secteur de la grande distribution n’est pas mauvais en soi. Il peut permettre de booster les entreprises. Parce que si on prend les entreprises de grande distribution qui sont là, ce sont les multinationales. Elles sont aussi présentes sur le marché international. Donc, il ne faudrait pas ignorer la possibilité pour nos entreprises de s’appuyer sur ces multinationales pour intégrer la chaîne de valeur mondiale.

Ce qui est important, c’est de veiller à ce que cela ne tue pas nos petites entreprises, notamment la petite distribution. Mais, également, organiser nos commerçants pour qu’ils soient propriétaires de grandes surfaces. Parce que nous allons vers la zone de libre-échange continentale. Peut-être ce que nous refusons aujourd’hui à ces grandes surfaces des pays européens, il sera difficile à notre pays, à long terme, de le refuser à ceux d’Afrique. Parce que l’ambition des chefs d’Etat africains, c’est de libéraliser le commerce entre pays africains. Il faut rappeler que l’Afrique est le seul continent où le Sénégal réalise des excédents en matière d’exportation. Donc, nous n’avons pas intérêt à ce que les autres pays aussi appliquent des mesures de rétorsion. Ce que nous pouvons faire, c’est organiser notre secteur privé, faire en sorte qu’il soit performant, afin que le Sénégal puisse disposer de grandes marques de distribution. Ce qui pourrait nous aider à aller vers la conquête de ce grand marché qu’est le continent africain.

Donc, vous prônez l’organisation des acteurs sur ce point, pour faire face aux défis de l’heure ?

Oui.

Vous êtes originaire de la Casamance. Qu’avez-vous à dire par rapport à cette région naturelle ?

Je suis originaire de la région de Ziguinchor, plus précisément du département de Bignona et dans la commune de Kartiack. Donc, je remercie la population casamançaise. Mais, au-delà de celle-ci, le Sénégal. Parce que bien qu’étant ressortissante de la Casamance, nous avons toujours travaillé pour tout le Sénégal, aussi bien du point de vue technique que politique. Pour la politique, nous avons un mouvement national qui s’est beaucoup investi à travers toutes les régions du Sénégal, en particulier celles de Ziguinchor, Dakar et Thiès. Je ne voudrais pas uniquement me limiter à Ziguinchor, bien qu’étant très fière de cette région et acceptant le fait de représenter cette région au gouvernement. Mais je voudrais magnifier le rôle que nos camarades ont joué à travers toutes les régions du Sénégal. Nous sommes d’abord ministre de la République du Sénégal et nous sommes au service du pays.

MARIAMA DIEME

 

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