Publié le 5 Jul 2018 - 21:27
PENURIE AU CENTRE DE TRANSFUSION SANGUINE

20 à 30% des dons réalisés en cas d’urgence

 

A Dakar comme dans les régions, la transfusion sanguine par voie sécurisée demeure un véritable casse-tête pour les professionnels du secteur. Une situation qui cause souvent des pertes en vies humaines, car 12% des poches collectées sont détruites car contenant de l’hépatite B. Sédhiou, Matam et Louga sont les plus déficitaires.

 

Depuis quelques semaines, les poches de sang font cruellement défaut dans les structures de santé. Le Centre de transfusion sanguine (Cnts) s’est vidé de son sang. La situation est d’autant plus préoccupante qu’elle a causé la mort d’une sage-femme sur le point d’accoucher. En outre, elle a poussé le Président Macky Sall à lancer un appel aux populations à donner du sang. Cette situation est causée, selon les médecins, par le Ramadan. Après chaque fin de mois de jeûne, les structures sont confrontées à une pénurie. Mais celle de cette année est la plus frappante, parce que le déficit de stocks est de 60 000 poches. Le paradoxe est bouleversant. Chaque année, les dons de sang augmentent de manière considérable au Sénégal. Et malgré la hausse du nombre de donneurs, le sang ne satisfait pas la demande annuelle nationale de 150 000 poches. Selon un document du Cnts, 88 905 dons ont été enregistrés en 2017. Les donneurs sont à 75% de sexe masculin, alors que les femmes ne représentent que 25%, bien qu’elles soient les principales bénéficiaires. L’âge moyen des donneurs est de 25 ans.

Toutefois, selon toujours le document, le Sénégal est largement en dessous des normes de l’organisation mondiale de la santé en ce qui concerne le don de sang (voir également Itw). A ce rythme, c’est dans huit bonnes années que nous pourrons remonter la pente. Au Sénégal, les anémies et les hémorragies constituent une des plus grandes causes de morbidité et de mortalité, aussi bien en gynécologie obstétrique où les hémorragies sont la première cause de mortalité maternelle (28%) qu’en chirurgie, médecine interne et pédiatrie, selon le document de politique nationale de transfusion sanguine du ministère de la Santé et de l’Action sociale de 2017.

Selon le directeur du Cnts, professeur Saliou Diop, ‘’il faut avoir beaucoup plus de donneurs de sang et nous avons vu une augmentation régulière, ces 10 dernières années, soit 13% la moyenne par an’’, renseigne-t-il dans le document. Les spécialistes veulent dépasser ce nombre, car en 2014, il y avait 69 295 dons et, en 2015, 78 540 dons. Le professeur souligne qu’il ne s’agit pas uniquement de donner du sang. Car chaque année, 12% des poches collectées sont détruites, parce qu’elles ont l’hépatite B. ‘’13% des poches ne seront pas utilisés également parce que contenant des résidus’’.

Sédhiou, Matam et Louga, les régions les plus dépourvues

Les Sénégalais aiment apparemment les urgences. Beaucoup attendent qu’on sonne l’alerte pour réagir. De l’avis du directeur du Cnts, dans le document parvenu à EnQuête, 20 à 30% des dons sont réalisés en cas d’urgence. ‘’C’est ce qu’on appelle des dons familiaux. Ils sont de 40% dans les régions et 1% à Dakar’’, explique-t-il. A l’en croire, il y a beaucoup de situations d’urgence, principalement des femmes qui saignent après accouchement, avec des anémies sévères. Il y a aussi les accidentés de la circulation. ‘’Il y a beaucoup de conséquences, car dans ces situations, les familles se mettent à chercher des donneurs de sang pour régler les problèmes de leurs patientes. Et on n’est pas dans les conditions d’une bonne qualité de prise en charge.’’

Cela est une façon pour le professeur de rappeler la responsabilité que les uns et les autres ont de donner du sang de façon régulière afin d’assurer la disponibilité d’un stock suffisant pour une meilleure gestion des situations. Pour le professeur, Dakar, Diourbel et Thiès sont les régions les mieux approvisionnées en sang. Par contre, Sédhiou, Matam et Louga sont les plus dépourvues. La construction de trois centres prévue d’ici 2021 pourra peut-être régler le problème, surtout avec une multiplication des dons. 

VIVIANE DIATTA

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