Publié le 22 Sep 2014 - 10:23
PENURIE DE BANANE, D’ANANAS ET D’AVOCAT

andiniéry étale sa  colère

 

La fermeture des frontières avec la Guinée du fait de la menace Ebola n’est pas sans conséquence. A la rue Sandiniéry, la pénurie de banane, d’ananas et d’avocat a entraîné une hausse sur les prix de ces fruits du reste très prisés. Au grand dam des commerçants qui accusent les importateurs de profiter du malheur des autres pour fortifier leur business. Face à cette dure situation, certains vendeurs ont même  commencé à fermer boutique. Reportage.

 

L’endroit ressemble à un village fruitier. Des cartons vides sont jetés un peu partout dans la rue. Sachets, zeste d’orange, de melon  et de banane jonchent l’allée. Une seule allée rendue étroite par les camions qui disputent la rue avec les piétons. C’est un vrai melting-pot dans cet endroit niché au cœur du marché ‘’Sandaga’’ de Dakar : Nous sommes à la rue Sandiniéry. Un lieu très couru par les vendeurs et amateurs de fruits. Il est 9 heures en cette matinée de Samedi où Dakar la capitale s’est réveillée sous une pluie battante. 

Suffisant pour transformer ce haut lieu de vente de fruits en ‘’rivière’’. Mais les flaques d’eau ne semblent pas déranger les camionneurs qui déchargent leur cargaison de fruits. Les charretiers entrent eux aussi dans la danse, histoire de se remplir les poches. L’odeur nauséabonde des ordures titille les narines. C’est un jour sans pour les vendeurs de fruits qui d’ailleurs ne se frottent pas trop les mains depuis quelques jours. Ce, à cause de la fermeture des frontières d’avec la Guinée,  suite à la menace Ebola, causant du coup une pénurie de banane, d’ananas et d’avocat.

Couvert d’une toile noire, on voit à peine ses yeux. Abdoulaye Diallo, la quarantaine déjà sonnée, tire le diable par la queue. Depuis deux semaines, dit-il, il est en rupture de banane. D’ailleurs sa table est presque vide. On n’y voit que des mangues et des oranges. Ce dernier ne compte pas acheter les bananes qui viennent de la Côte d’Ivoire. Car soutient-il, celles qui viennent de la Guinée sont meilleures. ‘’Les bananes nous viennent maintenant de la Côte d’Ivoire depuis quelque temps. Non seulement elles sont chères parce que les prix ont été revus à la hausse, mais ce n’est pas de la bonne qualité. Dès qu’elles passent deux jours ici, elles commencent à pourrir’’, soutient M. Diallo.

Ce dernier a donc décidé d’attendre la réouverture des frontières pour continuer son commerce. ‘’Dès que je termine mon stock, je reste à la maison en attendant la réouverture des frontières. On est très fatigué. Cette situation est très dure. Nous n’avons plus d’économie. On fait de notre mieux pour vivre’’, se plaint-il.

Assis à quelques mètres de lui, Idrissa Diallo égrène difficilement son chapelet. Les mains tremblantes de froid, il cherche en vain quelque chose de lourd pour se couvrir. Il aide son voisin à écouler ses fruits. Lui, il n’a plus rien et ne veut pas vendre uniquement des oranges et des mangues. ‘’J’ai fermé ma cantine depuis une semaine. Je n’ai pas les moyens pour acheter les bananes venant de la Côte d’Ivoire. Le kilogramme est vendu entre 850 et 900 F. A ces prix, je ne pourrai pas les revendre à 1000 F le kilogramme. Les clients ne vont pas acheter à ce prix, c’est pourquoi j’ai  préféré fermer boutique’’, explique-t-il.

Manque d’organisation

A la rue Sandiniéry, la banane n’est pas le seul fruit rare, même si les lamentations des commerçants sont plus axées sur ce fruit car étant le plus prisé.  L’avocat aussi est absent sur ce lieu. Et sa cherté fait que les commerçants ne s’amusent même pas à l’acheter ni à marchander avec les propriétaires des camions transporteurs. ‘’On nous vend le kilogramme à 1 200 F. Ce n’est pas normal.

Les transporteurs profitent de la situation pour hausser tous les prix. Même s’il nous vient de la Gambie, ce n’est pas une raison. La  Gambie est très proche du Sénégal, donc je ne vois pas la raison de l’augmentation des prix’’, dénonce Seydou Dia commerçant. Une thèse défendue par sa collègue Oulèye Sy. Aux dires de cette dernière, les gros transporteurs ont toujours agi de la sorte. ‘’Ils  ne profitent que du malheur des autres pour s’enrichir.

On est tous des commerçants et je ne vois pas les raisons de cette méchanceté. Oui ça, c’est de la méchanceté. Même le prix de la banane est exagéré. Un fruit peut venir de l’Europe et coûter moins cher. Nous devons nous dire la vérité et arrêter de nous voiler la face’’, peste-elle. Poursuivant son réquisitoire contre les importateurs véreux, la dame Sy est d’avis que le secteur de la vente des fruits est rempli de ‘’méchanceté gratuite’’ et d’égoïsme’’.

‘’Ce qu’ils n’ont pas eu depuis plusieurs années avant l’arrivée de cette maladie qui a occasionné la fermeture des frontières, ce n’est pas aujourd’hui qu’ils l’auront. Nous devons nous constituer en comité pour organiser ce marché. Chacun y dicte sa loi et ses prix. C’est le résultat d’une manque d’organisation et rien d’autre’’ tonne Oulèye Sy.

L’ananas se fait aussi rare à la rue Sandiniéry. Et   même si sa pénurie n’est pas trop sentie par les commerçants, elle reste tout de même déplorable.

VIVIANE DIATTA

 

 

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