Publié le 5 Apr 2019 - 18:32
POLLUTION MARINE

Les résultats inquiétants de l’expédition scientifique suisse 

 

Sur 22 000 Km en mer, soit 12 000 nautiques, des Philippines à Dakar, pour la première fois au monde, on a exactement la quantité de gaz à effet de serre à la surface de la mer, dans un contexte marqué par l’acidification des océans et le réchauffement climatique, grâce au voilier Suisse Fleur de passion. Qui fait escale à Dakar, depuis le 28 mars, pour partager ses résultats sur la pollution marine.

 

Le voilier suisse Fleur de passion a réussi son pari. Celui d’obtenir des données scientifiques quant à la pollution marine à l’échelle mondiale. L’engin de 33m muni de toute la logistique nécessaire a fait le tour du monde, dans le but de mesurer l’impact humain sur les océans. Une initiative de la Fondation pacifique Suisse dénommé « the Ocean mapping expedition » qui a démarré le 13 avril 2015 à Genève. En effet, l’étude s’est faite suivant trois angles. Tout d’abord, les onze membres de l’équipage ont désormais des données quant à la pollution plastique des océans. Sur les 194 échantillons d’eau prélevés, il s’avère que 91% contiennent de la matière plastique.

Un problème global, véritable danger pour la survie de la faune et de la flore marine. « Toute les régions traversées par the ocean mapping expedition sont affectées par la pollution marine », a déclaré Pascal Hagmann responsable du programme. En outre, l’Asie du Sud Est bat tous les records, avec une pollution moyenne de 551g/km carré. Cette forte présence de déchets plastiques s’explique par les mouvements des eaux de surface qui transportent et dispersent les déchets flottants.

Le deuxième aspect aborde la quantité de gaz à effet de serre contenue dans l’espace marin. Le dioxyde carbone et le méthane sont présents respectivement à 40 et 200% dans les eaux marines. Principaux acteurs du réchauffement climatique, l’expérience a révélé qu’ils présentent de faibles concentrations en milieu marin, même dans les pays fortement pollués par les activités industrielles. « Plus on s’éloigne des villes et des côtes, les concentrations de ces gaz, le dioxyde de carbone, baissent. Ce qui signifie que les océans constituent des réservoirs de gaz à effet de serre », explique le professeur Daniel McGinnis, chef du département scientifique de l’université de Genève. 

Ainsi les océans absorbent une forte quantité de ces gaz, tout en étant des émetteurs. Les données de l’expédition révèlent aussi une émission de méthane plus élevée que celles préalablement établies par des chercheurs. Sur 22 000 Km en mer, soit 12 000 nautiques, des Philippines à Dakar, pour la première fois au monde, l’on a exactement la quantité de gaz à effet de serre à la surface de la mer, dans un contexte marqué par l’acidification des océans et le réchauffement climatique. Pour le professeur McGinnis, il urge de reconsidérer le rôle de la mer dans le cycle du carbone. Il estime que ce problème ne sera résolu que lorsque l’homme arrêtera d’utiliser les sources d’énergies fossiles telles que le pétrole et le gaz.

La pollution sonore, très souvent oubliée par plus d’un, a elle aussi des effets néfastes. En effet, l’équipe de scientifiques dirigée par Michel André, directeur de laboratoire à l’université de Catalogne, a prouvé que sous l’eau marine, l’harmonie sonore d’antan a disparu. Les animaux marins sont aujourd’hui agressés par une cacophonie sonore perturbant leur développement voire leur durée de vie. C’est le cas entre autres des crustacés. Et le chercheur d’affirmer que la faune marine est menacée par ces bruits provenant de la recherche et du transport de pétrole et de toutes les nombreuses activités de l’homme sur la mer.

D’autres aspects mis en jeu

L’expédition comporte deux autres aspects, à savoir l’éducation et la culture. A ce sujet 58 adolescents dont 4 sud-africains ont pu voyager à bord du voilier, par petit groupe de quatre. Histoire de se familiariser avec les questions environnementales. Par ailleurs, la fondation a aussi accueilli plusieurs artistes à même de sensibiliser la communauté internationale sur les conséquences de la pollution marine par leurs illustrations.

Face à tous ces résultats jamais enregistrés auparavant la Fondation pacifique propose des solutions et souhaite une multiplication d’expériences de ce type, à travers le monde. Selon le vice-président de la fondation pacifique, Samuel Gardaz, « le bilan est très positif en ce sens que le voilier a démontré sa capacité d’accueillir des programmes scientifiques et d’offrir à des partenaires académiques la possibilité de développer des projets très pointus ».

L’escale de Dakar intervient dans le cadre de l’étroite collaboration entre la Suisse et le Sénégal. En effet, plusieurs enseignants de l’université Cheikh Anta Diop travaillent avec ceux de l’université de Genève sur des sujets tels que la médecine, le droit des enfants, l’archéologie. Il en est de même pour les étudiants. Si dans la recherche scientifique, la collaboration est concrète entre les deux pays, force est de constater que les résultats de l’expédition n’intéressent pas vraiment le corps professoral dakarois. Il a été le grand absent de ce partage de données bien qu’invité par la Fondation. Des visites d’écoliers et d’étudiants sont prévues, les jours à venir, avant le départ pour le Cap-Vert.

Après sa plus longue navigation de 28 jours sans toucher terre, entre Le Cap et Dakar, le voilier reprendra son voyage, le 08 avril prochain, pour y mettre un point final en Septembre 2019.  

EMMANUELLA MARAME FAYE

 

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