Publié le 20 Jan 2017 - 21:39
POSTE - OPERATIONS FICTIVES, PONCTIONS ET MANIPULATIONS DE 52 COMPTES DE CLIENTS

Comment l’ex-receveur du bureau de Sébikotane a dissipé 98 millions F CFA

 

Accusé d’avoir détourné la somme de 98 millions de francs CFA, l’ex-receveur du bureau de poste de Sébikotane, Idrissa Ndong, encourt une peine de sept ans ferme et le paiement de la somme globale de 150 millions de francs CFA. Attrait hier à la barre du tribunal correctionnel de Dakar, il sera édifié sur son sort le 2 mars prochain.

 

Receveur au bureau de Poste de Sébikotane, au moment de son placement sous mandat de dépôt en octobre 2013, Idrissa Ndong fait partie de ces fonctionnaires qui confondent les deniers de l’Etat avec leur propre argent. La preuve, par un jeu de manipulation de comptes, il a réussi à détourner la somme de 98 millions de francs CFA. Attrait hier devant le Tribunal de grande instance de Dakar statuant en matière correctionnelle pour détournement de deniers publics, il n’a pas eu de mal à reconnaître les faits. Toutefois, il a tenté de se réfugier derrière un cambriolage pour justifier une partie du montant dissipé. ‘’J’ai été victime d’un cambriolage au cours duquel 20 millions avaient été emportés’’, a allégué le prévenu.

Pour le reste du montant, il a reconnu avoir fait des opérations fictives et des ponctions sur les comptes de clients pour combler un déficit, car il ne voulait pas être épinglé par un contrôle. Son modus operandi consistait, entre autres, à s’envoyer des mandats, à puiser ou à alimenter le compte de tiers. ‘’Après retrait, je comptabilisais l’argent comme recettes de dépenses’’, a révélé Idrissa Ndong qui a confié qu’il alimentait les caisses manipulées avec le paiement des factures Senelec. Seulement, l’audit que le receveur redoutait tant est arrivé le 24 octobre 2013.

Ce jour-là, les inspecteurs se sont pointés à son bureau à 7 heures du matin pour un contrôle inopiné. Alors que l’ex-agent n’est arrivé qu’à 14 heures. Après un premier contrôle, un gap de 10 millions a été découvert. En poussant leurs investigations, les inspecteurs se sont rendu compte qu’ils étaient loin du bon chiffre. En effet, selon les explications fournies par Moussa Gacko, cinq cas de fraude ont été découverts. Il s’agissait de 11 opérations fictives d’une somme globale 33 millions, soit 3 millions chacune, décelées avec Poste One. Selon les résultats de l’audit, le prévenu a manipulé au total 52 comptes, soit 32 millions détournés. Sans compter le montant de 290 000 F CFA provenant de 11 factures encaissées, mais pas reversées dans les caisses de la Poste.

10 millions virés dans le compte de sa femme

D’après toujours le contrôleur, Idrissa Ndong a effectué 19 opérations estimées à 10 millions pour alimenter les comptes de tiers. Le prévenu a viré 16 millions dans son compte et 10 millions dans celui de sa femme. Le pire, a ajouté M. Gacko, en prison, l’ex-receveur a mandaté une personne pour récupérer l'argent dans son compte. Après ces explications de l’inspecteur, le prévenu a tenté de limiter sa responsabilité pénale, en soutenant que tous ces montants se trouvaient dans le système car, après retrait, l’argent était reversé. ‘’J’avais même décidé de faire un prêt pour combler le déficit 15 millions que j’avais’’, a ajouté Idrissa Ndong. Mais pour l’Agent judiciaire de l’Etat et l’avocat de la Poste, il y a bel et bien détournement et la culpabilité du prévenu ne se discute pas. Pour la réparation, ils ont réclamé la somme de 150 millions.

Le parquet a abondé dans le même sens en soutenant que le déficit résultant du cambriolage relève de l’imagination du prévenu. Il a requis une peine de 7 ans ferme. ‘’ Il ne peut bénéficier ni de sursis ni de circonstances atténuantes’’, a conclu le substitut Aly Ciré Ndiaye. Mais Me Ndiéguene n’est pas du même avis. Il soutient que son client a participé à la manifestation de la vérité, puisqu’au moment de l'inspection, il a avoué le détournement et a même déclenché son arrestation.

Selon l’avocat, en dehors du déficit, il y a d'autres raisons que son client ne peut pas dire. A en croire le conseil, l’argent disparu lors du cambriolage appartient à des tiers qui n’étaient pas clients de la Poste. Par rapport à la constitution de l’Etat, Me Ndjéguène a demandé qu’elle soit écartée, car la Poste est une société nationale qui dispose d'une autonomie financière. Accusant la société d’avoir refusé de tenir compte de sa comptabilité, la robe noire estime que le rapport d'audit n'est pas la preuve du montant allégué. Fort de ces arguments, il a sollicité la bienveillance du Tribunal qui rend son délibéré le 2 mars prochain.

FATOU SY

 

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