Publié le 22 Feb 2017 - 18:03
POUR VENGER SON PETIT FRERE BLESSE

Mamadou Barry assène 7 coups de couteau à Alassane Keïta, âgé de 15 ans

 

Hier, le footballeur Mamadou Barry, la trentaine, a été jugé devant la Chambre criminelle de Dakar pour assassinat sur la personne d’Alassane Keïta, 15 ans. Il lui a administré 7 coups de couteau au bas-ventre. Le Parquet a requis les travaux forcés à perpétuité. Le délibéré est attendu le 21 mars.

 

L’émotion était palpable hier, à la salle 4 du tribunal hors classe de Dakar abritant la Chambre criminelle. Surtout au moment d’évoquer les circonstances de la mort tragique d’Alassane Keïta, âgé de 15 ans, le 30 juillet 2011 à Derklé. L’adolescent a reçu, ce jour-là, 7 coups de couteau. Toujours sous le choc, la mère de la victime, Seynabou Fall, a retracé le film de ce ‘’crime crapuleux’’ qui a emporté son fils cadet. Selon ses dires, cet après-midi-là,  vers 17 heures, son enfant a été pris à partie par 3 de ses amis dont Sidy Mouhamed Makka Barry dit Macky. Trois heures de temps après la bagarre, elle égrenait son chapelet au balcon, lorsqu’elle aperçut le footballeur Moustapha Barry, grand frère de Macky, vêtu d’un pantalon jean bleu et d’un tee-shirt Lacoste blanc.

Les rues étaient désertes puisqu’il y avait un combat de lutte à la télé. Le joueur est entré dans la maison pour s’entretenir avec Ousmane Keïta, grand frère de la victime. Il lui a dit qu’il était venu arranger les choses. Que ce sont des jeunes du même quartier et qu’ils se devaient de régler cette affaire à l’amiable, dans la mesure où son père menaçait de porter plainte contre Alassane Keïta qui avait gravement blessé son antagoniste au cou et au dos. Ne voulant pas que son mari soit mis au courant de la bagarre, Seynabou Fall l’a accompagné à la terrasse où dormait son fils. Moustapha Barry l’a invité à le suivre sous prétexte de le réconcilier avec son petit frère

 ‘’Mon mari ne pouvait plus supporter la perte subite de notre cadet, il est mort’’

5 minutes après, l’irréparable s’est produit sur un terrain vague. Les cris ont fusé de partout et Moustapha Barry a pris la fuite, emportant l’arme avec lui. C’est le nommé Arona Sow qui a avisé les éléments du commissariat de Dieuppeul qui se sont transportés à la morgue de l’hôpital général de Grand-Yoff où ils ont trouvé le corps sans vie d’Alassane Keïta. Puis, ils se sont rendus sur la scène du crime pour y constater d’abondantes traces de sang. Le certificat de genre de mort établi par le professeur Mendes a révélé ‘’des plaies cutanées multiples longitudinales et profondes sur toutes les parties sensibles du corps, ayant entraîné 16 points de sutures et plusieurs blessures superficielles au niveau du bras gauche, de la cuisse gauche et des membres supérieurs dont une blessure profonde de 11 cm causées par une arme blanche’’.

Interrogé en premier, Ibou Sène a expliqué que le samedi précédant les faits, après avoir fini de jouer un match de football, lui et ses camarades, prenaient l’air dans un coin de la rue. Alassane les a dépassés en buvant de l’alcool. Lamine Diop, qui entretenait d’étroites relations avec lui, a pris la bouteille de bière et versé tout le contenu au sol. Ensuite, il lui a demandé d’arrêter de boire. Mais Alassane a vu rouge. Il l’a abreuvé d’injures avant d’aller prendre une arme blanche pour en découdre avec eux. A son retour, Lamine n’était plus là. Le défunt a voulu le blesser. Se tenant non loin de là, Makka Barry est venu les séparer. Par malchance, il a reçu plusieurs coups de couteau. C’est à ce moment que Moustapha Barry est venu aux nouvelles. Non sans révéler qu’Alassane Keïta était toujours en état d’ébriété.

‘’C’est faux ! Mon fils ne se saoulait pas’’, a rétorqué Seynabou Fall. Aussi, a-t-elle affirmé que depuis qu’on a tué leur enfant, son époux était inconsolable. Il est mort de chagrin. ‘’Sa tension baissait toutes les 5 minutes. Agonisant, il laissait entendre que Moustapha Barry pouvait juste corriger Alassane, en le bastonnant, mais pas mettre fin à ses jours. Parfois, il se réveillait tard dans la nuit pour prononcer le nom de son fils. Il l’a rejoint quelques jours après’’, a-t-elle laissé entendre, le cœur meurtri.

La partie civile réclame 300 millions de F CFA en guise de dommages et intérêts

L’accusé, marié et père de famille, a renseigné qu’il était parti à la maison des Keita, non pas pour un règlement à l’amiable, mais plutôt pour faire une récrimination auprès des parents de l’enfant. ‘’Mais une fois dehors, a-t-il dit, Alassane a sorti un couteau de cuisine et a voulu me blesser avec. Il a dit qu’il pouvait me faire la même chose qu’il a faite à mon frère. Nous nous sommes battus. Je l’ai maîtrisé et je lui ai arraché l’arme. C’est au cours de la bagarre que la victime s’est blessée elle-même’’, s’est-il défendu. Avant de faire remarquer : ‘’Je ne lui avais pas asséné des coups de couteau. Je ne savais même pas qu’il avait des blessures’’. Pourtant, devant le juge d’instruction, l’inculpé avait dit qu’il voulait que le différend ayant opposé les jeunes aboutisse à une réconciliation. ‘’J’ai rétabli la vérité des faits, car j’en étais le témoin. Et comme Macky a été acheminé à l’hôpital pour soigner ses blessures, le nommé Boubacar Sidibé m’a demandé d’aller voir les parents d’Alassane Keïta. Je n’ai jamais eu l’intention de le poignarder. Son grand frère Ousmane était présent au terrain‘’, avait-il servi au juge. Non sans reconnaître qu’il ‘’était plus fort que la victime’’.

Appelé à titre de simples renseignements, Ousmane Keïta a expliqué que c’est Moustapha Barry qui a ouvert les hostilités. ‘’Je venais fraîchement de sortir de l’hôpital. Je l’ai laissé partir avec mon petit frère, parce qu’on lui faisait confiance. Le temps de quitter chez moi pour les rejoindre, j’ai vu qu’il portait des coups de couteau à mon frère. Qui s’est mis à courir sur une distance de 10 mètres. Moustapha l’a rattrapé et l’a fauché, avant de lui porter l’estocade’’. Ousmane d’ajouter : ‘’Je l’ai entendu dire à mon frère qu’il allait l’éliminer. Je n’ai pas eu le temps de réagir. Ensuite, il a pris la poudre d’escampette. J’étais impuissant face à cette situation.’’

Me Bamba Cissé : ‘’Un crime d’une lâcheté sans commune mesure’’

Après ce témoignage, le conseil de la partie civile, Me Bamba Cissé, a indiqué que les faits ont créé un choc émotionnel. D’autant que le projet de l’accusé était de venger son frère. ‘’Le garçon a été froidement assassiné. Moustapha Barry a assouvi sa soif de vengeance. Il a manipulé la famille. C’est un crime d’une lâcheté sans commune mesure’’, a dit la robe noire. L’avocat de noter que l’accusé se moque même de la victime, en disant qu’elle était ivre morte. Pis, ‘’c’est avec un air dédaigneux et colérique qu’il revient sur les faits’’. A l’en croire, les conditions dans lesquelles Alassane est parti de la concession ne lui permettait pas de sortir avec un couteau. Mieux, qu’il n’est pas censé dormir avec une arme. ‘’Les blessures sur la main montrent que la victime s’est défendue jusqu’à son dernier souffle’’, a encore relevé Me Cissé, en réclamant la somme de 300 millions de FCFA en guise de dommages et intérêts.

Le Parquet requiert la prison à vie

La parquetière Ramatoulaye Ly Ndiaye dira que l’accusé n’a pas de contradicteur. ‘’Celui qui devait le faire a été réduit au silence par lui-même’’. Soutenant que le sieur Barry est réputé être quelqu’un de violent dans le quartier, elle a poursuivi qu’en ‘’aucun moment des faits, la victime, mince et gringalet, ne pouvait constituer un danger pour lui et pour sa famille. Il n’y a eu aucune bagarre entre lui et la victime. L’accusé n’a pas fait amende honorable. Il n’a pas regretté son acte’’. De plus, a précisé le Parquet, le père de l’accusé n’envisageait pas de poursuites judiciaires contre le défunt. Sur ce, Ramatoulaye Ly Ndiaye a dit que les arguments développés par l’accusé ne sauraient prospérer. Elle a requis les travaux forcés à perpétuité.

Mais la défense a soutenu que rien ne prouve qu’en donnant la mort, l’accusé avait prémédité son acte. Les avocats ont demandé la disqualification des faits reprochés à Barry en coups et blessures volontaires ayant entraîné la mort sans l’intention de la donner. Ils ont également demandé au juge de faire bénéficier leur client des circonstances atténuantes, car ‘’c’est un père de famille qui n’a jamais eu maille à partir avec la justice et que c’était un accident’’. Tout en demandant à la Chambre criminelle de ‘’s’écarter du sentier de l’émotion qui éloigne de la vérité’’. L’affaire sera vidée le 21 mars prochain.

AWA FAYE

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