Publié le 29 Oct 2014 - 03:42
PROCÈS KARIM MEISSA WADE

Une journée très ‘’Presse’’

 

«La presse» ceci, «la presse» cela… Il semble qu’avec les deux témoins à la barre auditionnés hier quant aux groupes CD-Médias et Terra Vision, on n’ait parlé que de «journalisteries» toute la journée ! Le tout sur fond de rapports tendus entre le Président de la Cour, Henry Grégoire Diop, et les avocats de Wade Jr., alias Rimka-Singapour…

 

C’est à croire que les juges aiment la Presse… En effet, sur les trois personnes s’étant présentées hier à la barre, deux sont des journalistes (même si, techniquement, l’un est un administrateur de société)… Sans compter celui qui a joué les prolongations depuis la salle des témoins, le très esseulé Cheikh Diallo !

Des états généraux peu reluisants pour le secteur économique «Presse»Avec ‘’Me Diop’’, les avocats de la défense, notamment Me Amadou Sall, ont parlé des ‘’états généraux’’ de la presse. Il en ressort deux choses : La première, que financer une entreprise de presse, plus précisément presse écrite, est un coup à perdre de l’argent… Donc, point d’enrichissement illicite pour son client dans ce cas précis… Deuxièmement, que CD-Médias ne vaudrait plus rien puisque, selon ‘’Me Diop’’, si on devait vendre le groupe de presse aujourd’hui, le prix de cession équivaudrait au capital libéré, à l’origine… À savoir dix millions de francs CFA, «rëk» ! Ainsi, à en croire le témoin, investir dans les médias n’équivaudrait, au Sénégal, à rien de ce qui ressemble à un enrichissement… licite ou pas.

Pauvre de nous, misérables journalistes !

Me Diagne se sent entravé, Henry Grégoire Diop sort de ses gonds

Le troisième round de l’audition de Mamadou Diop a plus été un échange de coups entre la Cour et la Défense, qu’entre le témoin et les conseils de Karim ! En effet, lassé d’avoir à marcher sur des œufs, alors qu’il interroge le témoin, Me Seydou Diagne s’est comme à l’accoutumée emporté contre le Président de la Cour : «On est entravé dans notre défense ! Si c’est comme ça, vous n’avez qu’à nous expulser de la salle et on vous le livre (NDLR : Karim Wade) pieds et poings liés!», a explosé l’avocat. En effet, quelques minutes plus tôt, il avait été accusé d’avoir «traité les juges de menteurs» par Henry Grégoire Diop, alors que, dans les faits, il a textuellement dit qu’une déclaration antérieure «n’était pas conforme à la vérité»…  

Ce coup d’humeur de notre Président préféré n’était pas le premier de la journée puisqu’il avait eu auparavant un début de bisque avec Me Amadou Sall, allant même jusqu’à qualifier l’attitude de l’avocat de «lâche»… En voilà un qui déteste les lundis, d’après nous !

Karim Wade évoque encore Singapour et est (presque) «manu militarisé»

Un autre qui a le début de semaine difficile : Karim Meïssa Wade ! Appelé à la barre pour poser des questions à «Me Diop», l’ex-ministre a tout fait, sauf poser des questions… au témoin, du moins ! Passant, toujours «respectueusement» (tu parles!), par le biais de la Cour, Rimka-Singapour a donc demandé au Parquet des nouvelles du fameux rapport d’évaluation afférant à la société CD-Média qui, à ce qu’il en sait de l’arrêt de renvoi, n’est toujours pas disponible :  «C’est (NDLR : le fait que CD-Média soit toujours en cours d’évaluation) ce qui démontre bien aux Sénégalais qu’on est là en face d’un processus politique (…), puisqu’à la manière de Singapour, on n’a toujours pas de réponse sur la question», a ainsi bougonné Wade junior une fois que la parole lui a été donnée.

Évidemment, c’est sans surprise qu’il a été interrompu par Grégoire l’Auguste (qui a compris «juge politique» et non «processus politique») et, après plusieurs tentatives infructueuses d’en placer une, coûte que coûte, (excusez-nous la familiarité), s’est vu tout simplement sommé de «retourner à sa place»…

Sauf que le cancre de la classe (alias l’inculpé) en question a dit niet ! Ou plutôt refusé muettement de bouger d’un iota et, toute chose confondue, mis l’agent EPI chargé de l’accompagner dans une situation diantrement inconfortable, puisque ce dernier a bien compris qu’assommer Karim Wade et le traîner dans son box (la procédure qu’on suppose habituelle) n’était, dans le contexte actuel, pas une option. Ainsi, profitant du fait que son garde pénitentiaire attitré n’osait faire plus que le pousser gentiment dans la direction voulue, malgré les cris du Président de la CREI qui a ordonné à plusieurs reprises qu’on «le ramène», Karim Wade est resté une bonne minute, avant de faire volte-face, en bougonnant ce qu’on devine être un flot de piques acerbes à l’intention de la CREI dans son ensemble et du régime en place, par extension.

Attention, Karim méchant !

El Hadj Malick Sy, émotionnellement vôtre…

Alors qu’on croyait avoir tout vu, la journée d’hier réservait une dernière surprise de taille. Celle-ci, en la personnalité même du deuxième témoin du jour, El Hadj Malick Sy, qui s’est présenté tout de vert. L’homme (âgé, notons-le bien, de 53 ans) s’est révélé être une vraie madeleine à la barre, puisqu’à cinq ou six reprises, il s’est surpris à verser des larmes, suite aux questions de la Cour, du Parquet Spécial et de la partie civile !

Ainsi, Malick Sy a pleuré en expliquant pourquoi, «par conviction personnelle», il a quitté la cellule de communication alors «amorphe» de son ministre…  Il a également pleuré quand il a révélé «habiter chez ses parents», pour expliquer qu’il n’a rien reçu de l’inculpé alors qu’il aurait pu…. Une fois encore, il a pleuré, quand il a presque hurlé un «vous voulez quoi?» à Félix Antoine Diome suite à une question afférant à ses biens. Il a remis cela en déclarant «ne pas être prêt à payer le prix» d’une potentielle affectation à Dakar, alors qu’il est présentement en poste à Tambacounda…

De toutes ces larmes, on a un peu perdu le compte, mais notons qu’il a pleuré (enfin) lorsqu’on lui a demandé «de décrire l’homme Karim Wade» (il faut compter sur Me Bathily pour poser cette damnée question).

Espérons ne pas être inondés, mardi, à la reprise dudit interrogatoire !

 

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