Publié le 21 Oct 2014 - 12:27
PROCÈS KARIM WADE ET CIE - AMBIANCE (INTÉRIEURE)

Ça se corse (enfin) pour Karim… ou pas tant que ça ?

 

L’audience d’hier, lundi, est forte en coups de théâtre avec deux témoins (eh oui !) qui n’ont cessé de faire des ‘’révélations’’ dans le cadre d’un procès qui s’enlisait jusque-là dans la ‘’quotidienneté’’, pour emprunter l’expression à Cheikh Oumar Diallo. Une journée comme on les aime !

 

Ce lundi, on l’espère, a pavé la route à une semaine moins soporifique que ce à quoi on a semblé un temps s’être résigné. En effet, que ce soit des ‘’révélations’’ tordantes de Victor Kantoussan quant à un duel nocturne entre un point d’eau (euphémisme !) et son patron ou du parler (très) coloré (et gesticulant) du pourtant immaculé Cheikh Diallo, on n’a pas eu le temps de s’ennuyer un seul instant !

Victor, iI nous fait mentir…

On le croyait bel et bien parti (NDLR : cf. notre papier d’ambiance du vendredi 17 octobre) mais c’est comme un bourgeon annonçant le retour du printemps que Victor Kantoussan vient, hier matin, se présenter devant les juges pour entamer l’ultime partie de son interrogatoire. Égal à lui-même, le très souriant garde du corps de Karim Wade porte, comme c’est le cas de la quasi-totalité du public, une écharpe blanche nouée à son cou en soutien à son bien aimé employeur alors qu’il répond aux ultimes questions de la défense, posées par Me Seydou Diagne.

Si des ‘’faits’’ intéressant ce dossier, à savoir des charges d’enrichissement illicite pesant sur l’inculpé et ses prétendus complices, on n’apprend rien de nouveau, cette pénultième audition de ‘’l’homme fort’’ Kantoussan n’est pas sans intérêt… Tout le contraire, puisqu’il a une dernière ‘’munition’’ fort croustillante à partager avant de tirer sa révérence !

… Et raconte comment Karim a touché le fond !

Dans son âpre combat à décrire son ancien ‘’tout’’ sous un jour meilleur et, peut-être, susciter en sa faveur un éventuel (bien que fort peu probable) surplus de clémence chez des juges, ce brave Katoussan a partagé une étonnante anecdote concernant l’ex super Ministre avec la Cour. Le plus drôle est que l’histoire en question, supposée faire passer le message selon lequel Karim Wade serait un ‘’bosseur’’ (pour reprendre les propres mots du témoin), est vraiment de ce type de mésaventure que n’importe quel homme voudrait taire jusqu’au jour de sa mort… et même après.

Pile poil au moment où on n’y croyait plusdonc, ce cher Kantoussan réussit une fois de plus à faire preuve de candeur : ‘’Un soir, à 3h du matin, Karim m’a appelé pour que je l’accompagne pour aller inspecter un chantier. Il est très brave et travaille quelle que soit l’heure. J’ai l’habitude de dire que c’est au moment où je suis fatigué que lui commence sa journée (…) Du fait de la nuit, il n’a pas bien vu où il mettait les pieds et est tombé… dans un égout’’, dévoile le fidèle Victor à la CREI, regardant le Président de la Cour droit dans les yeux.

Et alors qu’on pensait qu’il n’oserait pas, Victor d’ajouter : ‘’C’était très dur. Il s’est retrouvé au fond mais il est sorti en sautant sans presque que je l’aide. Il s’est alors retourné et m’a dit : «Victor, c’est le prix de la volonté» !’’

Brave Karim ! Espérons juste qu’à l’époque, il n’était pas perpétuellement vêtu de la couleur ‘’meïssaïque’’ comme aujourd’hui car sinon, c’est un boubou (et sans doute l’intérieur cuir d’une 4x4) qui aurait fini au fond… d’une poubelle !

L’habit ne fait pas le Cheikh…

Victor parti (et pour de bon, cette fois), c’est au tour du journaliste/conseiller en communication Cheikh Diallo de faire son entrée.

Tout de blanc vêtu et une écharpe immaculée nouée au cou (ce qui, de prime abord, semble être en concordance avec la ‘’mode’’ du jour), l’ancien inculpé reconverti en témoin se présente à la barre… Et ne se fait pas prier pour parler, passez-nous l’expression !

En effet, à peine lui a-t-on vérifié son identité et posé l’habituelle question sur son parcours professionnel que l’ex DG du groupe CD Media passe en pilotage automatique, s’agissant de révélations. ‘’Au sens figuré du terme, à savoir celui d’attribuer des qualités et possessions autres que les siennes à un individu, je suis l’exemple type et à 1000% de ce qu’on appelle prête-nom concernant M. Karim Wade’’, déclare, implacable, le témoin.

En effet, retraçant la ‘’bande annonce’’ de la constitution de CD Médias et de ses deux démembrements, le quotidien « Le Pays » et le site web Lesenegalais.net, l’ancien coïnculpé de Karim Wade (aujourd’hui, insiste-t-il, est ‘’blanchi’’ par un non-lieu) ne se prive pas de faire comprendre aux juges qu’il a entièrement été piloté par ce dernier et donc ne serait à l’origine d’aucun acte, encore moins propriétaire de quoi que ce soit.

Encore mieux, Cheikh Oumar Diallo (qui n’aurait pourtant pas ‘’la reconnaissance de mémoire courte’’), déclare avoir été victime ‘’d’un lâchage en règle’’ de la part de Wade Jr. qui lui aurait adressé une ‘’mise en demeure’’ lue par le témoin lui-même devant la cour : ‘’Je me suis senti poignardé dans le dos (…) Allah m’est témoin !’’, a conclu ainsi l’ancien ‘’frère’’ de l’inculpé, accompagnant le tout de deux mains levées au ciel.

Un coquin de journaliste

Pour certains, pratique professionnelle et éthique et déontologie font deux. En effet, c’est une vision bien personnelle de ses obligations morales en tant que journaliste que possède ledit témoin… Une vision qu’il a partagée avec la CREI.

Ainsi, selon ce dernier, ‘’le journalisme et la communication n’ont rien à voir avec la justice et la vérité’’. Voilà la réponse servie par le témoin pour justifier avoir déclaré, lors d’une émission télévisée, qu’il est bel et bien le propriétaire de CD Médias.

Mieux encore, ce dernier confond apparemment les notions de ‘’ligne éditoriale’’ et ‘’d’information commandée’’ car, dixit Cheikh Diallo, ‘’c’est celui qui paye (Karim Wade) qui décide (NDLR : ce qu’on met dans le journal)’’ : ‘’M. Karim Wade n’a pas créé Le Pays et Lesenegalais.net pour se faire insulter. Si on ne peut pas relater l’information sous un jour qui lui est favorable, la moindre des choses est de passer dessus.’’, déclare ainsi le ‘’journaleux’’ en question pour ensuite reconnaître avoir offert son organe comme plate-forme au PDS pour ‘’mettre en évidence ses activités’’. A priori, à l’Ecole supérieure de journalisme (ESJ) de Paris, on passe allègrement sur le chapitre du concept de la neutralité journalistique. Il n’y a pas d’autre explication autrement !

Enfin, cerise sur le gâteau journalistique,  l’anecdote du témoin quant à la cessation d’activités dudit groupe survenue pendant son incarcération : ‘’Quand Karim m’a envoyé son codétenu pour me dire de reprendre la publication du journal, je l’ai renvoyé en lui disant de bien signifier à M. Wade que ma priorité, c’était de sortir de ce trou (NDRL : Rebeuss) !’’ a déclaré, sans ambages aucun, Cheikh Diallo…

SOPHIANE  BENGELOUN

 
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