Publié le 14 Jul 2015 - 17:21
PROFIL – KILLA ACE RAPPEUR GAMBIEN

Le fusilleur de Jammeh

 

Avant lui, presque aucun chanteur gambien n’a osé, sur le sol de Babili Mansa, l’affronter à travers sa plume. Il a été le premier et cela lui a valu l’exil. Ali Cham alias Killa Ace a été obligé de quitter en catastrophe la Gambie pour le Sénégal où il séjourne actuellement. EnQuête retrace une partie de son parcours.

 

Il est jeune et a du cran. Il ferait une bonne recrue pour Y en a Marre qui souhaite étendre ses tentacules partout. Ali Cham aka Killa Ace aka Ali Baba se veut rebelle et le ‘’tueur’’ du régime  Babili Mansa. Il a entamé un combat contre le Président, plutôt le ‘’roi’’ gambien, tel qu’il le voit et de surcroît dictateur Yaya Jahmeh. Pour dénoncer les faits infâmes et avilissants de Jammeh, il a composé une chanson intitulée ‘’Ku boka C Geta G’’. Son opus a fait trembler le palais présidentiel gambien. Et très rapidement, le jeune aux lyrics tueurs et aux textes véridiques dont les parents vivent aux USA a dû quitter sa terre natale pour se réfugier d’abord à Ziguinchor, avant de déposer ses baluchons à Dakar.

Killa Ace est bien connu dans le monde hip-hop, non pas seulement grâce aux récents événements qui l’ont forcé à s’installer au Sénégal. Depuis 2012, il participe régulièrement au plus grand festival de hip-hop du Sénégal, le Festa2H. Déjà en 2013, sur l’une des scènes de cette rencontre à Pikine initiée par Africulturban, structure dirigée par le rappeur Matador, il s’attaquait ouvertement au régime de Yaya Jammeh. Décrit comme ‘’impulsif’’, il était déjà assez rebelle enfant. D’après lignedirecte.sn, c’est à l’âge de 4 ans qu’il est parti vivre aux USA avec ses parents. Le rap prenant le pas sur sa scolarité, ses géniteurs se sont sentis obligés de le renvoyer en Gambie, afin qu’ils n’adoptent pas les comportements ‘’guerriers’’ des jeunes Américains. D’ailleurs, son surnom Killa lui viendrait de ses jeunes amis de quartier qui l’ont rebaptisé ainsi, au détour d’un battle de hip-hop au cours duquel ses lyrics ont ‘’tué’’ son adversaire. ACE est le surnom que lui donnaient ses camarades de classe. Ce sont les initiales de son nom à l’état-civil : Ali Cham.

Renvoyé en Afrique, il a continué tout de même ce qu’il avait déjà entamé aux USA. Il a mis sur le marché national un premier album baptisé ‘’another critical experiment’’ (ACE) et produit par G-Trix. Un album de 16 titres dont un featuring avec le rappeur médinois Books de Sen Kumpë. N’attendant rien du gouvernement de son pays, Ali Baba a posé des actes concrets, en organisant régulièrement des plateaux pour la jeunesse et pour la promotion du hip-hop gambien. Ceux qui y ont déjà assisté affirment que les jeunes répondaient en masse à toutes ses invitations. Ce qui lui avait valu d’ailleurs un contrat avec Africell (ndlr une société de téléphonie gambienne). Contrat qui a été rompu au lendemain de la sortie du single ‘’Ku boka C Geta G’’.

Réclusion

Marié et père d’un enfant, Killa Ace cherche aujourd’hui asile au Sénégal, pour échapper aux foudres du dictateur gambien. C’est pourquoi il a décidé de s’emmurer dans le silence après une sortie un peu timide dans le journal rappé animé par Keyti et Xuman. Il aurait ‘’très peur’’ actuellement et ne veut rien faire ou dire ouvertement qui puisse irriter Yaya Jammeh et obligeant ce dernier à demander son extradition. C’est dans cette logique d’ailleurs que sa planque est secrète. Personne ne veut dire où vit le ‘’ndialabane soldier’’. Tous nos interlocuteurs vivent dans la psychose de voir Killa Ace disparaître mystérieusement ou être attaqué, s’ils venaient à dire où il crèche actuellement. ‘’Yaya Jahmmeh est dangereux et fait du mal régulièrement à certains Gambiens vivant sur le sol sénégalais et personne n’en parle. On ne veut pas que la même chose arrive à Ace’’, rétorque d’ailleurs une des personnes câblées par EnQuête pour avoir des informations.

BIGUE BOB

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