Publié le 6 Mar 2024 - 15:48
PROJET DE LOI D’AMNISTIE

Une porte ouverte à l’impunité pour des crimes graves, selon « Human Rights Watch »

 

Les députés examinent depuis ce matin le projet de loi no 05/2024 portant amnistie des faits criminels et correctionnels suite aux violentes manifestations politiques au lourd bilan macabre et matériel commis entre le 1er février 2021 et le 25 février 2024, « indépendamment de leur qualification légale et de la juridiction sous laquelle ils sont survenus ». Selon « Human Rights Watch » (Hrw), ce projet de loi soumis par le président Macky Sall à la représentation nationale « ouvre la porte à l’impunité pour des crimes graves ».

 

Le projet de loi portant amnistie no 05/2024 examiné en plénière ce mercredi 6 mars 2024 par la représentation nationale suivant une procédure accélérée n’agrée pas l’Ong « Human Rights Watch » (Hrw). « Le projet de loi, s’il est adopté, pourrait effectivement accorder l’impunité aux responsables responsables de graves violations des droits humains. Toute amnistie qui renforce l’impunité en exonérant les responsables du gouvernement et des forces de sécurité dans de graves violations des droits humains est incompatible avec les obligations nationales et internationales du Sénégal », a déclaré ce mardi Mme Ilaria Allegrozzi, chercheuse principale sur le Sahel à l’organisation de défense des droits humains.

Selon elle, « le président Macky Sall a déclaré que l’amnistie serait accordée dans un esprit de réconciliation nationale. Mais les tentatives de réconciliation générale ne doivent pas être un moyen d’échapper aux responsabilités ». Par conséquent, « accorder une amnistie générale, y compris à certains membres des forces de défense et de sécurité qui ont été accusés de manière crédible de violences meurtrières lors des manifestations, constitue une trahison envers les victimes et compromet leur accès à la justice », a-t-elle poursuivi. En effet, le « recours excessif inapproprié à la force en mars 2021, juin 2023 et février 2024 par les forces de sécurité sénégalaises » avec l’usage de balles réelles et de gaz lacrymogènes documenté par Human Rights Watch renseigne qu’au moins 40 personnes ont été tuées depuis lors sans que personne n’ait à rendre de comptes ».

S’y ajoute « l’emprisonnement de plus d’un millier de membres de l’opposition et de la société civile dont des chefs de parti et des candidats à la présidentielle, des journalistes et des militants ont été arrêtés dans tout le pays durant ces trois dernières années ». HRW a également documenté « le manque de respect du droit à une procédure régulière des personnes arrêtées dans le cadre de manifestations dirigées par l’opposition depuis 2021, notamment des accusations fabriquées de toutes pièces, le manque de preuves pour étayer les accusations, la détention provisoire prolongée et les mauvais traitements et la torture » dans les brigades de gendarmerie, les commissariats de police et les prisons.

Malgré le dégel marqué par une première vague de libération de centaines de détenus dans le cadre de la pacification de l’espace partisan, plusieurs victimes des violences depuis 2021 ont également exprimé de sérieuses inquiétudes à Human Rights Watch quant au fait que la loi d’amnistie pourrait entraver leurs chances d’établir la responsabilité des violences et exactions qu’elles ont subies.  Sur ce point, « il existe des preuves solides indiquant que l’écrasante majorité des personnes arrêtées dans le cadre de manifestations menées par l’opposition l’ont été de manière arbitraire et que les accusations portées contre elles étaient politiquement motivées. Mettre fin aux poursuites judiciaires contre ces personnes est donc une étape positive », a déclaré un défenseur des droits humains sénégalais. » a signalé Me Moussa Sarr à HRW.

 

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