Publié le 3 May 2018 - 14:34
RAPPORTS MACKY SALL-SYNDICALISTES

Des relations heurtées

 

Les syndicalistes ne sont pas contents des propos tenus par Macky Sall, à l’occasion de la remise des cahiers de doléances le 1er mai dernier. Certains responsables syndicaux contactés par EnQuête renseignent que leurs revendications sont légitimes.  

 

Entre le président de la République et les syndicalistes, ce n’est pas toujours le grand amour. Macky Sall est encore monté au créneau, à l’occasion du 1er mai, pour remettre les pendules à l’heure. Les syndicalistes qui sont venus déposer leurs cahiers de doléances sur la table du chef de l’Etat en ont pris pour leur grade. ‘’Certaines questions ne se règlent pas sur la place publique, le gouvernement est en train de tout mettre en œuvre pour gérer la situation. Si des gens ont des choses à dire, qu’ils le fassent devant les instances habilitées, mais non dans la presse’’, a-t-il martelé, parlant de la situation qui prévaut à la Sar, entre autres réparties bien senties qui font grincer quelques dents du côté des syndicalistes.

Mais ce n’est pas le cas du secrétaire exécutif national de la Confédération des syndicats autonome (Csa) qui trouve normale l’attitude du Président Sall, lors de la réception des cahiers de doléances. Elimane Diouf estime que Macky Sall n’a fait que se défendre pour faire le bilan de ses réalisations. Mais, poursuit-il, ‘’en tant que secrétaire général de syndicat, à propos des cahiers de doléances déposés en 2017, je peux dire que, malgré les réalisations, beaucoup restent à faire dans la satisfaction des préoccupations des travailleurs’’.

Autre son de cloche chez le coordonnateur de la Feder qui estime que le président de la République est coutumier des faits, qu’il avait manifesté du mépris à l’endroit des travailleurs lorsqu’il était Premier ministre du gouvernement de Wade. ‘’C’est lui qui nous a dit, pendant la grève : si vous voulez aller à l’année blanche, on y va. Il a traité les enseignants de terroristes, de maîtres chanteurs. Il a toujours considéré les travailleurs comme ses ennemis et ceux de la nation, alors qu’il ne comprend pas que c’est le travail qui produit la richesse’’, fulmine Dame Mbodji. Selon l’enseignant, un pays ne peut être émergent que lorsque les travailleurs sont bien traités.

‘’Il a dit que des enseignants membres de notre syndicat, le Cusems authentique, ont déchiré des emplois du temps. Ce n’est pas exact.  C’est son ministre de l’Education Serigne Mbaye Thiam qui a raconté des contrevérités. Ils ont déroulé des plans d’actions et pour les faire sortir du lycée, Serigne Mbaye Thiam les a affectés de façon arbitraire et ils ont refusé de déférer à cette convocation. C’est sur cette base que, depuis cinq ans, ils ne touchent pas leurs salaires, alors qu’aucune procédure n’est enclenchée à leur encontre’’, poursuit M. Mbodji.

De son côté, le secrétaire général du Sutsas estime que les propos de Macky Sall sont ceux qu’un employeur adopte devant des revendications. Mballo Dia Thiam déclare toutefois que ce discours ne les fera pas fléchir. ‘’Cela ne nous fera pas démordre, parce que nous sommes dans notre rôle : celui de défendre nos intérêts matériels et moraux‘’, argue le membre de l’Unsas. Le camarade de Mademba Sock pense que le chef de l’Etat doit s’en prendre à son gouvernement qui, à son avis, est à l’origine de cette situation.  

‘’Quand on négociait en 2014, ses plénipotentiaires avaient dit qu’ils étaient un gouvernement de rupture et qu’ils n’allaient pas négocier sous pression. Qu’ils allaient négocier avant toutes pressions et ne retenir que des accords réalistes et réalisables. Je pense que si on reprend ces propos, on se rend compte que, même si on avait demandé l’impossible, on s’est accordé au moins sur le possible. Si après 4 ans, on court derrière ces accords, il y a quelque part un non-respect des engagements’’, dénonce-t-il.

Lors du Conseil présidentiel consacré au plan d’actions du pacte national de stabilité sociale et d’émergence économique, Macky Sall avait sévèrement tancé les enseignants. Aux yeux du chef de l’Etat, les syndicalistes constituent une minorité qui bénéficie des largesses de l’Etat. Selon lui, la moitié de nos ressources est consommée par 1% de la population que constituent les syndicats et cela ne peut pas continuer. A ces propos, Dame Mbodji rétorque : ‘’Les enseignants n’ont jamais demandé des choses qu’on ne leur doit pas. Le véritable contentieux qui les oppose au président de la République, c’est 100 milliards que l’Etat leur doit en termes de rappel d’avancement. Ce n’est pas de l’aumône qu’il nous donne.  Macky Sall doit balayer devant sa porte, car depuis qu’il est là, il a créé des institutions budgétivores qui ne servent à rien du tout.’’

Pendant ce temps, Mballo Dia Thiam déclare qu’ils ne représentent pas 1% de mendiants ou de quémandeurs, mais de travailleurs qui sont des salariés et qui méritent un avancement. ‘’S’il a des responsabilités gouvernementales, nous avons des responsabilités familiales et de ce point de vue, nous avons le devoir de revendiquer et nous le faisons en toute légalité’’, conclut le syndicaliste.

HABIBATOU TRAORE

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