Publié le 23 Mar 2018 - 14:33
RECRUDESCENCE DES CAS D’ENLÈVEMENT D’ENFANTS

O. S. Delta, 7 ans, sauvée par ses pleurs

 

Face à la recrudescence des cas d’enlèvement et de meurtre d’enfants, la police est montée au créneau mardi pour déclarer la guerre aux ravisseurs. Ces derniers semblent ne pas être ébranlés par cette menace du directeur de la Sécurité publique, commissaire de police divisionnaire Abdoulaye Diop. Le phénomène persiste avec une dernière tentative enregistrée hier matin, en centre-ville, sur une élève de 7 ans.  

 

Pour peu, la jeune O. S. Delta allait allonger la longue liste d’enfants enlevés et, peut-être, tués. N’eût été ses pleurs qui ont intrigué un homme, elle aurait pu peut-être finir comme Serigne Fallou Diop, Mohamed Pouye, Fallou Ba, Mariétou Doumbia, des enfants enlevés puis tués. Agée de 7 ans, Melle Delta a échappé hier à une tentative d’enlèvement devant l’école Clémenceau de Dakar-Plateau où elle est en classe de CP. La victime a été sauvée par un témoin de la scène. Celui-ci a vu l’élève pleurer et se débattre contre une dame qui la tenait par la main. C’était aux environs de 8h. Lorsqu’il lui a demandé de calmer l’enfant, la dame lui a rétorqué que c’était sa fille. Mais elle a été trahie par la victime qui a lui fait savoir que ce n’était pas sa mère.

Du coup, la foule s’est massée autour de la ravisseuse pour lui faire sa fête. Alors que certains s’apprêtaient à la lyncher, elle a demandé qu’on la conduise à la police. Mais avant l’arrivée de l’agent en faction dans les parages, la femme de teint clair, moulée dans une djellaba, le visage dissimulé par un voile, a commencé à faire des gestes désordonnés pour se faire passer pour une déficiente mentale. Elle a été embarquée dans un taxi et conduite au commissariat de Rebeuss. Selon nos sources, elle a eu la même attitude devant les hommes du commissaire Niang. Après s’être exprimé en wolof, elle a commencé à parler dans une langue incompréhensible pour les hommes en tenue.

D’après les mêmes informations, la suspecte qui semble d’origine Hal pulaar a feint d’être une malade mentale et a refusé catégoriquement de répondre aux questions des enquêteurs. Mais elle a été démentie par le témoin qui a déclaré aux policiers avoir entendu la mise en cause s’exprimer en wolof. Ce qui conforte davantage les limiers convaincus que la dame essaie de les flouer. Quoi qu’il en soit, l’enquête se poursuit. La suspecte est toujours gardée à vue et les policiers seraient déjà sur une piste qu’ils sont en train d’exploiter, afin d’élucider cette énième tentative d’enlèvement avorté.

Des cas qui se multiplient, malgré les assurances de la police. En fait, suite aux nombreux cas de disparitions et de meurtres d’enfants, mardi dernier, le directeur de la Sécurité publique, le commissaire de police divisionnaire Abdoulaye Diop, est monté au créneau. Tout en rassurant les populations face à ‘’un sentiment d’insécurité’’, l’autorité policière a promis de mettre les délinquants hors d’état de nuire. Pour cela, le Commissaire divisionnaire Diop a fait savoir que des ‘’mesures fortes’’ ont été déjà prises. Il y a tout d’abord la mise en place d’une task force. Il regroupe la sécurité publique, la direction de la sûreté publique, la direction de la police judiciaire et les renseignements généraux. Ensuite, il y a le renforcement des effectifs et des moyens, notamment le matériel roulant, sans précision sur le nombre d’agents et de voitures. Seulement, les kidnappeurs semblent faire fi de ces menaces au regard des témoignages faits à travers la presse et dans les réseaux. Le dernier rapt avorté est survenu hier matin. Ce n’est pas la seule tentative échouée.

Idrissa Fall et son bébé de 4 mois

Dans une vidéo postée sur Facebook, un père de famille, nommé Idrissa Fall raconte comment des individus ont voulu enlever son bébé de quatre mois dans son propre appartement à Liberté VI. Les kidnappeurs ont exigé de son épouse qu’il leur remette le bébé. Fort heureusement, la mère et la fille ont été sauvées par la porte en fer. Il y a cet autre cas d’un enfant enlevé à la Gueule Tapée par un véhicule 4x4. Il s’est échappé lorsque ses ravisseurs faisaient le plein à une station d’essence à Bargny. Les témoignages foisonnent et viennent de différentes localités du pays. Cette situation fait planer davantage la psychose chez les populations devenues suspicieuses envers toute personne qui se promène avec un enfant.

D’un autre côté, la mobilisation pour une meilleure sensibilisation et prévention s’organise. Car, aux yeux de plusieurs Sénégalais, la riposte de l’Etat et surtout celle des forces de l’ordre est assez timide. Un argument que réfute un responsable de la police qui appelle à la prudence. Parce qu’il y a de nombreux cas de fugue que l’on assimile à un kidnapping. Notre interlocuteur soutient qu’il appartient certes à la police d’assurer la sécurité des personnes et de leurs biens, mais ‘’la responsabilité des parents est primordiale’’. Un argument que semble partager Thierno Bocoum.

Thierno Bocoum préconise des spots de sensibilisation

Dans une contribution, il invite les Sénégalais à commencer à trouver des solutions par eux-mêmes. Ces solutions passent par la sensibilisation des enfants sur le phénomène. L’ex-député propose aussi de parler aux mômes des dangers de s'adresser à des inconnus et de leur apprendre des réflexes de défense. Néanmoins, comme bon nombre de Sénégalais, Thierno Bocoum n’apprécie pas la posture de l’Etat dans ce drame qui frappe les enfants et que beaucoup lient à des sacrifices.  Ceux-ci sont-ils motivés par la quête du pouvoir politique ou celui de l’argent ? Seuls les auteurs de ces atrocités pourront justifier leurs actes. Mais dès à présent, l’ex-rewmiste estime qu’il y a un minimum à attendre d'un État responsable. C’est pour déplorer ‘’son mutisme face à ces morts atroces’’.

Aussi invite-t-il l’Etat à faire des spots de sensibilisation destinés aux parents et aux enfants. La prise en charge, d'une manière efficace, des déclarations de disparition d'enfants est proposée par M. Bocoum qui estime que ‘’l’Etat ne doit pas laisser les parents se débrouiller pour faire connaître leur désarroi ou chercher à retrouver leurs progénitures’’. Enfin, le responsable politique suggère la mise en place d’un numéro vert suffisamment médiatisé pour permettre aux populations de pouvoir signaler les comportements suspects...

FATOU SY

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