Publié le 22 Mar 2019 - 00:51
RECRUDESCENCE DES INCENDIES DANS LES MARCHES

Les six mesures d’urgence du gouvernement

 

Face à la recrudescence des incendies dans les marchés, le gouvernement a, au détour d’un conseil interministériel convoqué autour de la question, décliné six mesures d’urgence allant toutes dans le sens de moderniser, de délimiter nos marchés et de réduire les risques de calamité.

 

La rencontre a tiré en longueur. Mais le jeu en valait bien la chandelle. Puisqu’il s’agissait, entre le gouvernement du Sénégal et les différents acteurs concernés, de réfléchir et de décliner ensemble des mesures d’urgence à même d’exorciser les démons des incendies, pour épargner nos marchés des sinistres. Ce Conseil interministériel présidé par le chef du gouvernement, fait ainsi suite à l’incendie qui a récemment fait des ravages au marché Petersen, allongeant ainsi la liste des marchés ayant connu ce sinistre.

Le phénomène étant devenu récurrent, agir était devenu donc urgent pour le gouvernement. Ainsi, sur instruction du président de la République, le Premier ministre Mahammed Boun Abdallah Dionne a convoqué, dans l’urgence, un conseil interministériel pour réfléchir avec tous les acteurs concernés sur les décisions à prendre. Dans une première partie de la rencontre, ils se sont épanchés sur les solutions d’urgence à prendre pour faire face à la recrudescence de ces incendies dans les marchés avant de se pencher sur l’esquisse d’un programme national de modernisation des marchés. ‘’Nous avons une claire conscience que la situation des marchés constitue une véritable menace sur la sécurité civile. C’est toujours des situations dramatiques, puisque les incendies sont marqués par des pertes importantes en matériel et des pertes regrettables en vies humaines’’, déclare le porte-parole du gouvernement à sa sortie de réunion.

Le dernier sinistre survenu dans nos marchés date, en effet, du vendredi 15 mars dernier. Un incendie d’une rare violence a réduit en cendre beaucoup de cantines au marché Petersen de Dakar. Mais, auparavant, d’autres incendies se sont déclarés au marché Tilène de Ziguinchor, au marché central de Kaolack, au marché Ocass de Touba et au marché de Ross Béthio, pour ne citer que ces exemples qui sont les plus récents.

C’est pour juguler le mal que le gouvernement du Sénégal et l’ensemble des acteurs concernés ont tenu, avant tout d’abord, à examiner les différentes causes qui sont à l’origine de ces incendies. Pour l’essentiel, ils pensent que ces sinistres sont souvent causés par des problèmes liés aux branchements électriques qui sont fréquemment clandestins, qui ne sont pas conformes ou qui sont défectueux et qui sont souvent surchargés.

D’autres raisons tiennent à l’absence ou à l’insuffisance de bouches ou de poteaux d’incendie ; ce qui gêne considérablement le travail des secouristes pour accéder à l’eau. Il y a également des phénomènes nouveaux qui ne sont pas spécifiquement prévus dans les marchés : c’est le fait d’y faire la cuisine, d’y avoir des gargotes, de tenir des restaurants et de manipuler des produits inflammables tels que le gaz. ‘’L’ensemble de nos marchés sont encombrés, encombrement qui ne facilite pas le passage entre deux clients qui vont dans des sens croisés, qui ne facilite pas les déplacements et qui déborde jusque sur la chaussée. Ce qui a pour conséquence de retarder parfois, en cas de nécessité, l’intervention des secouristes et des sapeurs-pompiers’’, déplore Seydou Guèye.

Répondre à une urgence

Au total, il est ressorti de cette réunion six décisions majeures qui, selon le porte-parole du gouvernement, ne sont pas de mêmes portées, puisque les unes ont comme perspective de répondre à une urgence. C’est dans ce cadre qu’il faut retenir le programme qui a été validé d’un coût de 300 millions de F Cfa qui, selon Seydou Guèye, est déjà engagé sur la base d’un accord entre le ministère de l’Intérieur et la Sde pour installer et remettre à niveau les bouches d’incendie afin de faciliter l’approvisionnement et la fourniture en eau. Ce programme entre, en effet, dans le cadre global du renforcement de la prévention, de la protection et de la mise à disposition de lutte contre les incendies.

Cette mesure d’urgence, souligne Seydou Guèye, fait écho à une autre qui est déjà mise en œuvre, mais qui est développée par la Senelec qui, dans le cadre d’un financement, a commencé la mise aux normes des systèmes électriques dans les différents marchés.

De portée beaucoup plus structurelle, la deuxième mesure d’urgence prise par le gouvernement a trait à un programme de modernisation des marchés. Dans ce cadre, le Pm a recommandé, après un exposé fait par le ministère du Commerce qui projette ce programme en tenant compte de notre structure administrative en découpant un marché d’intérêt régional, d’élargir davantage les concertations, en impliquant les différents ministères de l’Intérieur, de la Santé et de l’Action sociale, au regard des enjeux liés à l’hygiène sociale, le ministère de l’Urbanisme qui a son mot à dire, notamment sur les autorisations de construction, mais également sur la décision arrêtée par le chef de l’Etat d’avoir une sorte d’urbanisme commercial, l’Ordre des architectes qui a un rôle de conseil, le ministère de l’Environnement et du Développement durable, le Cerec qui est le centre qui fait des études et des expérimentations et qui a mis en place un modèle certifié de cantine et de modèle de construction unifiée, c’est-à-dire qui résiste sur une longue durée au feu.

Mais aussi le ministère des Investissements pour prendre en charge les différents aspects liés à ce programme de modernisation et des aspects financiers, le ministère de l’Economie et des Finances pour régler les problématiques liées à la programmation budgétaire et enfin les collectivités locales pour valider et intégrer leurs différentes initiatives et leur potentiel de financement dans le cadre de ce programme de portée nationale. L’objet de toutes ces mesures selon Seydou Guèye, est d’avoir des marchés aux normes et équitablement répartis sur le territoire national.

La troisième mesure qui est une des orientations ou des conclusions retenues à l’issue de cette rencontre, c’est la consolidation du cadre institutionnel de gestion des marchés. L’ensemble des intervenants ont déploré le fait que les différents marchés ne sont plus soumis au régime des heures d’ouverture et de fermeture. Ce qui laisse très peu de possibilités pour l’entretien et le nettoyage, mais également pour la réglementation. La gestion des déchets doit ainsi être un élément nouveau dans le cadre institutionnel à renforcer, de même que la modernisation des installations électriques avec tous les dispositifs de certification, de contrôle et de vérification de leur fonctionnalité. Mais aussi l’actualisation des relations entre l’Etat et les collectivités locales pour gérer et délimiter les périmètres des différents marchés.

La quatrième mesure porte sur une évaluation exhaustive nécessaire par rapport aux trois derniers marchés qui ont été l’objet d’incendie, en l’occurrence Petersen, Ocass et Ross Béthio. Le Pm a indiqué qu’il était impératif d’avoir une évaluation exhaustive du nombre de sinistrés et cela devra être conduit par le ministère de l’Intérieur qui prendra appui sur le système de l’administration territoriale pour que des décisions d’appui et de solidarité puissent être développées sur la base d’une connaissance exhaustive de la situation en cause.

Parallèlement à cela, Mahammed Boun Abdallah Dionne a demandé au gouvernement, dans sa cinquième mesure d’urgence, d’accélérer les procédures de construction et de modernisation des marchés Sandaga, Syndicat, Noumbé Diop, Tilène, Petersen, entre autres.

La sixième et dernière mesure porte sur le projet Brt. Le Pm appelle ainsi le gouvernement à veiller à ce qu’il n’y ait pas beaucoup d’impacts par rapport à ces différents marchés, notamment sur le tracé pour éviter d’être exposés à des dépenses élevées.

ASSANE MBAYE

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