Publié le 26 Jul 2018 - 13:01
REGLE DU BAILLON MONDIAL

Le chaos d’une politique 

 

L’administration Trump-Pence a initié, le 23 janvier 2017, une politique ‘’règle du bâillon mondial’’ (Global Gag Rule-Ggr) qui contraint les Ong étrangères financées par les Etats-Unis à aider les pays dans les soins de la santé sexuelle et reproductive. Une décision qui a beaucoup d’impacts négatifs en Afrique.

 

Dans le cadre de son programme de sensibilisation et de plaidoyer, Pai, une Ong américaine dont la mission est de promouvoir l’accès universel à la santé de la reproduction et aux droits en santé sexuelle et reproductive, a organisé, les 25 et 26 juillet, une rencontre au Sénégal. Elle a pour objet d’analyser la politique de la ‘’règle du bâillon mondial’’ (Global Gag Rule-Ggr) prônée en 2017 par l’administration Trump-Pence, d’étudier ses impacts sur la santé de la reproduction et de discuter de l’importance d’une appropriation, par les communautés, de la santé et des droits sexuels et reproductifs. Selon Janie Vernaelle de Pai, Donald Trump a établi une politique qui contraint les Ong étrangères à choisir entre l’obtention d’une aide pour la santé mondiale allouée par les Etats-Unis et l’administration de soins de santé sexuelle et reproductive complets. Cette politique, indique-t-elle, oblige les prestataires, comme condition d’accès à l’aide du gouvernement américain, à ne pas offrir, avec leurs fonds propres, des services d’avortements légaux et des conseils pour l’avortement, à ne pas plaider en faveur de la législation ou de la libéralisation des politiques d’avortement.

Les projets impactés par cette règle sont ceux financés pour l’accès à la contraception, la santé maternelle et infantile, le Vih/sida, la tuberculose, le paludisme, la nutrition. ‘’La règle du bâillon mondial du Président Trump s’applique à l’aide octroyée par l’agence des Etats-Unis pour le développement international (Usaid), le département d’Etat et le département de la santé et des services sociaux des Etats-Unis, alors que les Ong reçoivent l’aide du gouvernement américain pour lutter contre plusieurs maladies dans les pays africains. Ils pensent que  les 8,8 milliards de dollars d’aide pour la santé mondiale pour l’ensemble du gouvernement constituent une perte pour ce dernier. Alors que c’est faux’’, dénonce Mme Vernaelle.

Les priorités du gouvernement du Président Trump, selon elle, sont ailleurs que l’abandon des populations vulnérables. Car, poursuit-elle, plusieurs pays ont montré que la règle du bâillon mondial perturbe les services. Cela porte préjudice aux programmes de santé intégrés, aux ministères de santé des différents pays, et détourne les ressources qui auraient pu être affectées à la prestation de service direct. ‘’Cette règle a mis en péril les progrès par rapport aux politiques relatives à la santé et aux droits sexuels et reproductifs. Elle a entraîné la clôture des projets au service des communautés vulnérables, notamment les jeunes, les personnes qui vivent avec le Vih/sida et les populations rurales, entre autres. Cette règle a également créé une insécurité en matière de produits contraceptifs et affaibli les projets financés par l’Europe’’, fustige-t-elle.

Conséquences

Janie Vernaelle explique que cette politique a provoqué une baisse des ressources pour les interventions clés lors des crises humanitaires. C’est ce qui est arrivé en Ouganda, ou la Rhu est présente dans près de 50% des camps des refugiés. Etant donné que cette Ong n’est plus en mesure de prétendre à un financement des Etats-Unis, elle a été contrainte de réduire ses services humanitaires en réaffectant 100 000 dollars, par an, initialement consacrés aux soins de santé sexuelle et reproductive dispensés dans le centre. ‘’Marie Stopes International, au Kenya, a été forcée de fermer une clinique à Kisumu, la province ayant le taux de prévalence du Vih le plus élevé du pays. Les femmes représentaient 60% des cas de Vih au Kenya et la clinique fournissait des services de santé à près de 400 femmes, chaque mois, et soutenait également un groupe d’agents de santé communautaire’’, déplore-t-elle.

Severin Dilly de Pai d’ajouter qu’une fausse idée répandue veut que la règle du bâillon mondial réduise le financement de la part des Etats-Unis. Alors que ce n’est pas le cas. ‘’Cette politique est insidieuse, car elle prive les bénéficiaires de fonds initialement accordés, alors qu’ils étaient les prestataires les plus qualifiés qui refusent d’interdire aux patients d’avoir accès à des informations et services complets’’, dénonce-t-elle. Puisque, dans les faits, cela aboutit à priver les prestataires les plus efficaces de financements ; et ils sont parfois les seuls, au sein d’une communauté, à accorder ces fonds à ceux qui en ont besoin. ‘’La règle du bâillon ne modifie pas le financement de l’aide étrangère accordée par le gouvernement américain. Elle rend ces investissements moins efficaces’’, fulmine Mme Dilly.

VIVIANE DIATTA

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