Publié le 31 Oct 2015 - 00:47
RESPECT DES ENGAGEMENTS, PROBLEME DE CONFIANCE

Le spectre de la grève plane à nouveau

 

Même si la grève était tuée au Sénégal, sans doute que son fantôme hanterait encore l’école publique. Le Conseil interministériel sur la rentrée scolaire a eu lieu hier, mais les acteurs, gouvernement et enseignants notamment, sont sortis plus divisés qu’unis. Dianté parle déjà de préavis à déposer.

 

Le Conseil interministériel sur la rentrée scolaire a eu lieu hier. Mais les positions divergent plus qu’elles ne convergent. L’un des Grands Cadres parle même de dépôt de préavis de grève. En fait, à la suite de la rencontre entre les acteurs de l’école, le Premier ministre a arrêté 21 directives. Ces dernières sont, si l’on en croit le ministre de l’Education Serigne Mbaye Thiam, relatives à la qualité des enseignements-apprentissages, à l’accès et à la paix dans l’espace scolaire.

Pour ce qui est de la qualité, il est prévu l’utilisation du numérique et le renforcement des équipements scientifiques des établissements scolaires. À propos de l’accès équitable, il y a le programme de construction de 8 collèges et la réhabilitation de 9 autres dans la région de Dakar.  Dans les régions de Ziguinchor et Sédhiou, le gouvernement compte  démarrer la construction de 30 établissements, collèges et écoles primaires, en 2016. S’y ajoute la finalisation des 50 écoles primaires faisant partie du lot de 200 écoles primaires à construire. Pour l’enseignement coranique, il est attendu la construction de 64 daara. Côté matériel, ‘’le Premier ministre a demandé que l’on mette 1,6 million de manuels à la disposition des élèves de la première étape. Et 1,7 million de manuels d’intégration pour les classes de l’élémentaire’’, fait savoir le ministre. Pour cela, une somme de 3 milliards est prévue dans le budget 2016. 

Cependant, ces directives n’emballent nullement les syndicats d’enseignants. En fait, le point d’achoppement est le troisième point qui est la paix sociale. ‘’Parmi les objectifs déclinés, il y a le bon déroulement des enseignements. Pour nous, cela doit passer par la restauration de la confiance. Nous avons dit au gouvernement que le premier facteur qui garantit la stabilité dans le secteur de l’éducation, c’est le respect des engagements pris avec les syndicats d’enseignants’’, a déclaré Abdoulaye Ndoye, le patron du CUSEMS, au sortir de la rencontre. Même son de cloche du côté d’Amadou Diaouné du SUDES. ‘’Il y a des engagements qui sont pris au plus haut niveau. Il faut aller dans le sens de la matérialisation’’, recommande-t-il.

Mamadou Lamine Dianté pour sa part ne s’attend plus à un respect des engagements. Il est déjà convaincu que l’école est partie pour revivre la même situation. Le secrétaire général du SAEMS-CUSEMS révèle que sur les 30 directives de l’année dernière qui concernaient le ministère de l’Education, seules cinq ont été effectivement réalisées. ‘’Il semblerait que les 23 autres sont en cours de réalisation. Si cette année on nous promet de nouvelles directives, vous comprendrez que nous soyons sceptiques quant à leur réalisation’’, se démarque-t-il.

‘’C’est la priorité au PSE, au détriment de l’école sénégalaise’’

Visiblement, les manquements sur les objectifs de l’année dernière ne sont pas de nature à rassurer. Les propos du ministre du Budget Birima Mangara non plus. ‘’Nous n’avons pas senti dans les directives une volonté d’aller dans le sens de la pacification de l’espace scolaire. Toutes les directives relatives aux ressources allouées aux établissements scolaires et les ressources allouées aux structures déconcentrées du ministère de l’Education nationale n’ont pas été respectées. Cela veut dire que c’est un choix délibéré de ne pas investir dans le fonctionnement de ces structures-là. Et d’après ce que nous avons compris du ministre du Budget, c’est la priorité au PSE, au détriment de l’école sénégalaise. C’est ce que nous retenons.’’

Autre point d’inquiétude, c’est que  les instructions données par le président de la République, lors de sa rencontre avec les enseignants, n’ont pas été respectées un mois après. Jusqu’à hier, le 29 octobre, ‘’il n’y a eu aucune liste de mise en œuvre des enseignants nouvellement intégrés. Cela veut dire qu’il n’y aura pas de mise en solde ce mois-ci. Il n’y a pas de paiement des rappels, alors que le président de la République avait donné l’échéance du 31 décembre pour l’ensemble des rappels’’. Fort de tout cela, Dianté en conclut que le monde scolaire est loin d’être à l’abri du réchauffement du front social. ‘’Ce serait même imprudent pour nous de ne pas déposer un préavis de grève. Nous allons déposer un préavis.’’ À la question de savoir quand, il répond : ‘’Le moment venu, nous vous aviserons.’’

En voilà une preuve que l’école est loin d’être sortie de l’ornière. De quoi pousser encore les parents, malgré eux, à aller vers les écoles privées. 

BABACAR WILLANE

 

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