Publié le 2 Jun 2016 - 12:47
RETROUVAILLES ENTRE LE PDS ET L’APR

Macky Sall neutralise Idrissa Seck

 

En scellant ses retrouvailles avec le Parti démocratique sénégalais (Pds), le leader de l’Alliance pour la République gâche tous les plans d’Idrissa Seck, en perspective des prochaines joutes électorales de 2017 et de 2019. De plus en plus isolé, le patron de Rewmi dénonce un deal entre Macky Sall et Abdoulaye Wade.

 

‘’La participation du Pds au dialogue national est une honte. L’opposition fait une campagne contre la révision constitutionnelle de Macky Sall, et dénonce son adoption. Et le lendemain, le chef de l’Etat envoie une lettre sans destinataire et les  gens courent répondre à l’appel soit pour échapper à la Cour de répression de l’enrichissement illicite (Crei) soit pour demander la libération de Karim Wade’’. Cette sortie d’Idrissa Seck d’avant-hier traduit une prise de conscience : que ses espoirs de récupérer l’appareil Pds s’effritent. Elle traduit aussi toute la symbolique politique derrière le dialogue national initié le samedi 28 mai 2016.

Le Leader de Rewmi considère donc que ce dialogue n’est rien d’autre qu’une ‘’circonstance de combine et de combinaisons’’ dont la seule finalité vise à comploter contre le peuple. ‘’Les même personnes qui étaient complices et auteurs du grand complot contre ma personne le font actuellement sur le dos des Sénégalais. Ils m’ont toujours accusé de deal alors que j’ai toujours défendu des questions de principes et des vertus, hier contre Abdoulaye Wade et aujourd’hui contre Macky Sall’’, fulmine-t-il. Mais, à travers cette diatribe, on comprend qu’il veut dire que les deux susnommés complotent contre lui.

Aussi cette sortie traduit-elle le coup porté à l’élan unitaire de l’opposition. Qui, pour les besoins du référendum du 20 mars 2016, s’est regroupée dans une seule entité (la coalition du NON/Gor ca wax ja). Depuis lors, une nouvelle cartographie politique se dessinait, avec d’une part la mouvance présidentielle réunie au sein de Benno bokk yaakaar, et d’autre part l’opposition avec des partis comme le Pds d’Abdoulaye Wade, le Rewmi d’Idrissa Seck, la Convergence libérale/Bokk gis gis de Pape Diop, le Grand parti de Malick Gackou. Cette dynamique unitaire, maintenue jusqu’aux prochaines élections législatives, pouvait donc faire mal au régime toujours en quête de plus de représentativité dans les capitales régionales comme Dakar, Diourbel, Touba, Sédhiou, Ziguinchor, entre autres localités qu’il a du mal à conquérir. D’où cette saillie amère d’Idrissa Seck : ‘’Macky Sall s’est rendu  compte de cette dynamique et a préféré faire diversion, en mettant sur la table des gadgets comme le dialogue national.’’

Toujours est-il que le président de la République continue de dérouler sa stratégie de dislocation de l’opposition à défaut de la réduire à sa plus simple expression. Le modus operandi utilisé cette fois-ci est d’une subtilité qui brouille tous les plans d’Idrissa Seck. Mieux, il tend même à l’isoler au sein de l’opposition. En effet, à travers ce dialogue dit national, Macky Sall est en passe de  rallier une bonne partie de l’establishment du parti de Me Wade à sa cause. Et ce, après avoir démantelé les bases du Pds, accueilli dans son escarcelle beaucoup de ses caciques et jeté le reste en prison, dans le cadre de la traque des biens dits mal acquis. On dirait que le leader de l’Alliance pour la République n’a plus qu’à claquer des doigts pour que le reste des libéraux accourent. Il faut dire que sa tâche est grandement facilitée par le personnel politique constitué en majorité de politiciens professionnels qui ne vivent que de prébendes et autres libéralités de l’Etat.

Ainsi, le président Sall continue-t-il allégrement son travail de sape. Et Idrissa Seck n’a pas tort de sortir les griffes en parlant d’un ‘’deal politique’’, non seulement sur le dos des Sénégalais, mais aussi et surtout de l’opposition.

Karim Wade, la monnaie de change

Ce ‘’deal politique’’, selon l’ancien Premier ministre, doit aboutir à la libération de Karim Wade. Les actes posés avant-hier par le régime laissent présager un tel scénario. La libération conditionnelle de Papa Mamadou Pouye et l’autorisation de sortie du territoire national accordée à Ibrahima Aboukhalil dit Bibo Bourgi et à Alioune Samba Diassé sont des actes qui placent dans la salle d’attente le fils de l’ancien président de la République. Qui, à défaut d’une libération prématurée, devra épuiser sa peine de six ans, après la présidentielle de 2019.

Cependant, si libérer Karim Wade est une chose, l’écarter du jeu politique sénégalais jusqu’après 2019 en est une autre. Macky Sall prendra-t-il le risque de libérer quelqu’un comme Karim Wade pour qu’il l’affronte en 2019 ? Le fils de l’ex-président de la République acceptera-t-il de renoncer à ses ambitions politiques et d’ouvrir le boulevard à Macky Sall en quête d’un second mandat ? Autant de questions qui risquent de constituer des points d’achoppement entre Abdoulaye Wade et son successeur engagés dans un jeu de poker qui n’est pas parti pour faire les affaires d’Idrissa Seck.   

ASSANE MBAYE

Section: