Publié le 27 Oct 2017 - 22:14
REVUE CONJOINTE DU SECTEUR AGRICOLE

Les interpellations de Pape Abdoulaye Seck

 

La place du privé dans le secteur agricole, les limites de l’Etat, le crédit, le foncier, la  recherche ainsi que l’assurance sont autant de questions abordées hier par le ministre Pape Abdoulaye Seck. À l’occasion de la revue conjointe sur l’agriculture, il a posé le débat, mais surtout apostrophé les acteurs sur les attitudes et les comportements.

 

La troisième revue conjointe du secteur de l’agriculture a été lancée hier au Grand Théâtre. À la place du discours préparé par le conseiller technique, le ministre de tutelle Pape Abdoulaye Seck a plutôt voulu mettre les pieds dans le plat. L’autorité a préféré interpeller les acteurs à travers des pistes de réflexion, des interpellations et des questionnements. Elle a fait comprendre aux participants que quand on parle de revue, il faut la contribution de chaque partie. Chacun doit donner sa lecture de la situation et exposer ses contraintes.

En fait, du point de vue du ministre, le Sénégal n’est pas dans une agriculture administrée, mais dans une gestion partagée.

D’après Pape Abdoulaye Seck, l’objectif du pays est d’arriver à une révolution agricole. Or, cela implique, d’abord, le changement d’hommes. Il a laissé entendre qu’on ne peut pas prétendre changer son environnement tout en étant soi-même. ‘’Je veux voir une grande révolution de l’agriculture précédée d’une grande révolution des attitudes et comportements’’, a-t-il lancé. De ce fait, le ministre invite à une rupture dans la démarche, la mise en œuvre, l’évaluation et le suivi-évaluation.

Dans ce même ordre d’idées, la tutelle appelle les uns et les autres à  se départir des idées qui voudraient que l’Etat ait des objectifs à atteindre en matière d’agriculture. Selon lui, un Etat ne peut pas, à lui seul, tout faire en la matière. Il est un acteur qui contribue à l’atteinte des objectifs. De ce fait, dit-il, on ne peut pas continuer à tout attendre de l’Etat. Ce dernier n’étant qu’un actionnaire du développement à côté d’autres actionnaires qui, eux aussi partenaires, sont parties prenantes. Par conséquent, chacun doit assumer son rôle dans la chaine de valeurs. ‘’En agriculture, un succès est toujours collectif. Je ne vois pas un acteur performant isolé d’un système performant’’, dixit-il.

Reste alors à savoir quelle est la part du privé dans l’agriculture sénégalaise ? Pas fameux, selon le ministre. ‘’Il faut reconnaitre que le secteur privé agricole n’occupe pas encore la place qui est attendue de lui’’, affirme-t-il. Pape Abdoulaye Seck de faire remarquer que  dans le système libéral, l’Etat le plus fort au monde ne peut ni produire encore moins vendre ou fixer les prix. Ce qu’il peut faire, c’est encadrer, créer les conditions favorables. Mais pour qu’une agriculture soit forte, il faut un secteur privé fort travaillant en bonne intelligence avec les exploitations familiales modernisées.

Le  ministre a tenu à rappeler que le gouvernement tient à cette cohabitation, car il est persuadé que pour un développement de l’agriculture, l’un ne saurait exclure l’autre. ‘’Le Sénégal n’est pas un marché foncier rural, mais nous tenons à l’investissement privé’’, a-t-il tranché. D’où son appel à la finalisation de la revue foncière.

30 % des intrants  pour les femmes

Une fois ces questions réglées, Pape Abdoulaye Seck pense qu’il faut aussi accroitre la recherche agricole, accompagnement indispensable pour un développement du secteur. De même, le ministre préconise la généralisation de l’assurance. ‘’Dans  ce contexte sahélien que nous vivons, avec la turbulence de l’environnement, la probabilité d’occurrence d’évènements défavorables est élevée. Il nous faut prévenir les risques’’, recommande-t-il.

Disposée à faire le tour des questions, l’autorité a aussi abordé la problématique du crédit. De son point de vue, il est nécessaire de repenser ce volet, afin surtout de s’éloigner de la logique de crédit de campagne pour penser au financement de l’agriculture de façon plus globale. Il se demande pourquoi ne pas trouver un financement pour faire une saison et une contre-saison, ou bien même aller au-delà et trouver un crédit sur deux ans. Ce qui ferait que même si une année ou une campagne n’a pas été bonne, le déficit peut être comblé par les résultats de l’autre année ou saison.

Le dernier point abordé a été relatif à la transparence et à l’équité dans les opérations de distribution des semences et des intrants. Pape Abdoulaye Seck voudrait que les jeunes, les femmes et les handicapés aient accès davantage aux dotations en matière d’agriculture. ‘’Nous avons dit et écrit que 30 % des intrants devaient revenir aux femmes, mais jusqu’à maintenant les femmes se plaignent du fait que ce sont les hommes qui prennent tout’’, se désole-t-il.

Dans sa conclusion, le ministre a invité les acteurs à réfléchir davantage sur toutes ces questions et de proposer des solutions pertinentes qui permettent d’aller de l’avant.   

BABACAR WILLANE 

 

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