Publié le 14 Apr 2016 - 13:34
ROFIL SOMEN DEBNATH

Cycliste contre le Sida

 

Chacun a sa manière d’appréhender les événements de la vie. Ce globe-trotter original a choisi de faire le tour du monde en vélo pour montrer son engagement à vaincre la pandémie.

 

Ce n’est pas un contre-la-montre, puisqu’il se propose de faire le tour du monde en vélo en 13 ans. Et c’est à 14 ans que cette révélation lui est venue en lisant un article de presse où il était question d’un sidéen mort par délaissement devant le collège médical de Calcutta.

Somen Debnath venait de trouver un sens à son existence. Laissant derrière lui la réticence d’un père d’une famille nombreuse de 10 personnes, ce diplômé en zoologie quitte son Sundarbans natal et part à la conquête du monde, son idéal humaniste en bandoulière et les bénédictions de sa mère pour aller communier avec ceux qu’ils appellent ‘‘ses frères’’. En escale ‘‘forcée’’ à Dakar depuis que son engin fétiche s’est disloqué à Bissau, la venue de sa nouvelle bicyclette d’Afrique du Sud devrait lui permettre de continuer son chemin bientôt. L’initiative n’est pas inédite. Mais pour une fois que c’est un ressortissant du Sud, un Indien, qui s’y prête, le jeu revêt un caractère particulier.

Somen Debnath est un globe-trotter d’un genre singulier. Cheveux noirs en cascade encadrant un visage rond et souriant, qui contraste avec son sabador blanc, ce quidam de 32 ans en est à sa 121e destination, le Sénégal, sur 191 au total. Auparavant, deux années à faire le tour de l’Inde, trois ans dans 22 pays d’Asie, trois autres dans 45 pays européens ont ponctué son parcours. La série en cours pour 60 pays du Moyen-Orient et de l’Afrique, 2012-2016, a connu un léger décalage. Mais qu’importe ! Somen est d’abord préoccupé par le contenu de ses messages. ‘‘Je donne des conférences et des séminaires partout où je vais sur ce thème. Le but est d’éveiller les consciences des masses sur le Sida. Ce sont les populations rurales qui sont visées en général’’, déclare-t-il.

Le cycliste indien continue de drainer des civilisations du monde entier vers lui, avec une multitude de bracelets bigarrés qui vont de ses poignets à mi-bras. ‘‘Certains ont voulu faire le voyage. Mais comme c’était impossible pour une raison ou une autre, ils voyagent avec moi à travers ces objets’’, déclare-t-il en exhibant également les colliers au cou, cadeaux de ses pérégrinations à travers les différentes contrées où il se sent partout chez lui. Un tour du monde pas toujours commode. Comme cette détention de 24 jours chez les Talibans, en Afghanistan, soupçonné de travailler pour les services de renseignements indiens. Ou l’acclimatation à -45 degrés du Pôle Nord en 2011. Ou, malheureusement, un...passage à tabac par les skinheads (suprémacistes blancs). Ce qui lui semble une concession minime par rapport à la richesse de ses rencontres : 6 rois, 26 présidents, 56 Premiers ministres...‘‘L’un des hommes les plus heureux que j’ai rencontrés est un Bengalais qui pourtant arrivait à vivre avec 25 roupies (moins d’1 dollar) quotidiennes avec sa famille’’, témoigne-t-il.

 Pour atteindre un tour complet, il lui reste encore les Amériques, le voisin chinois, le sud-est asiatique, l’Australie et la Nouvelle-Zélande qu’il se propose de finir d’ici quatre ans. Ceux qui seront en Inde le 27 mai 2020 pourront avoir la chance de voir Somen Debnath clôturer un tour du monde en vélo contre le Sida, entamée, jour pour jour, treize années plus tôt.

OUSMANE LAYE DIOP

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