Publié le 25 Jul 2017 - 20:37
SAISINE DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL PAR LE PRESIDENT MACKY SALL

La saison des cafouillages

 

Si ce n’est pas un aveu d’échec, ça en a tous les attributs. Après le report prôné par Moustapha Diakhaté, c’est au tour de Macky Sall de saisir le Conseil constitutionnel pour permettre aux citoyens de voter avec des pièces autres que la nouvelle carte biométrique Cédeao. Une proposition vite rejetée par les partisans de Me Wade et Khalifa Sall.

 

Les élections législatives de dimanche prochain sont parties pour battre tous les records d’une organisation chaotique accompagnée de polémiques. Le retard sur le retrait des cartes électeurs reste le principal nœud gordien que le pouvoir n’arrive pas à trancher. Ce qui veut dire que bon nombre de citoyens pourraient ne pas voter le jour du scrutin, faute de disposer du sésame. Ainsi, après avoir annoncé l’acheminement des cartes directement vers les lieux de vote, le régime actuel vient de prendre une nouvelle initiative pour contourner l’obstacle qui parait désormais insurmontable. Dans un communiqué, le président de la République, après avoir rappelé les dispositions de l’article 3 et 4 de la constitution qui donne le droit de vote à tout citoyen, annonce la mesure prise pour que ce droit ne soit pas violé.

‘’Au regard des lenteurs notées dans le retrait des cartes d'identité biométriques, le président de la République a saisi le Conseil constitutionnel, par lettre en date du 24 juillet 2017, conformément à l'article 72 de la Constitution, sur la possibilité que les électeurs n'ayant pu retirer leur carte puissent voter aux élections législatives du 30 juillet 2017 (…)’’, fait savoir le Palais. Dans cette proposition, il est prévu que le citoyen puisse se présenter à son bureau de vote avec l’une des pièces qui suit : une carte d’identité nationale numérisée, une carte d’électeur numérisée, un passeport, un permis de conduire ou un document d’immatriculation pour les primo-inscrits non détenteurs d’un des quatre premiers documents administratifs. ‘’Il faut rappeler qu'une telle éventualité avait été proposée par la société civile’’, se justifie Macky Sall, non sans préciser son attachement à ‘’d'élections transparentes, libres et démocratiques’’.

À peine, le Palais a fini de rédiger le document que les opposants l’ont déchiré. De Koumpentoum où il est en campagne, la tête de liste de la Coalition Gagnante Wattu Senegaal n’a pas tardé à réagir. Selon le communiqué du PDS, Abdoulaye Wade ‘’a rejeté tout vote par l'utilisation de document ne pouvant permettre d'identifier un électeur ou prouver son inscription sur les listes électorales’’. Le Pape du Sopi a ajouté que cette juridiction ne saurait ‘’permettre à Macky de rouvrir frauduleusement la période d'inscription sur le fichier électoral ou de modifier illégalement, par le règlement, les conditions d'exercice du droit électoral qui sont déterminées exclusivement par la loi’’.

‘’Un énième coup de grâce aux acquis démocratiques’’

À la coalition Mankoo Taxawu Senegaal, on ne dit pas autre chose. Les partisans et alliés de Khalifa Sall soutiennent que ‘’le Président Macky Sall tente aujourd’hui de porter un énième coup de grâce aux acquis démocratiques’’ du pays ‘’après avoir démantelé les piliers de cette démocratie par une série de tripatouillages de la loi électorale au gré de ses intérêts partisans’’.  D’après les rédacteurs du communiqué parvenu à EnQuête, en passant par le Conseil constitutionnel pour valider sa volonté, ‘’le président de la République décide unilatéralement de violer les articles L 53 alinéa 1er et L 78 alinéa 1er du Code électoral qui disposent que seule la carte d’identité biométrique CEDEAO fait office de carte d’électeur et qu’à son entrée dans le bureau de vote ce dernier doit présenter sa carte d’électeur’’.

De ce fait, cette entité, en plus de dénoncer une ‘’forfaiture’’, prend le chef de l’Etat pour responsable des conséquences qui pourraient découler d’une décision non concertée. C’est donc parti pour un nouveau et énième bras de fer dans le cadre de l’organisation de ces élections qui n’a pratiquement jamais connu un point sur lequel il y a eu consensus du début à la fin. Il est à noter que cette initiative du Président Macky Sall intervient 24 heures après la proposition de report des élections faite par un responsable du parti présidentiel, Moustapha Diakhaté en l’occurrence. Ce dernier, invité dimanche de l’émission ‘’Objection’’ de Sud Fm avait préconisé un décalage d’une ou de deux semaine(s), le temps que les citoyens récupèrent leurs cartes.   

BABACAR WILLANE

 

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