Publié le 7 Aug 2019 - 02:58
SALIOU BEAU TOURE SUR LES ELIMINATOIRES DU CHAN-2020 :

‘’En petite catégorie, la Guinée nous fatigue beaucoup’’

 

L’équipe du Sénégal a obtenu sa qualification au second tour des éliminatoires du Chan-2020, en battant (3-0), samedi dernier, une équipe du Liberia largement à sa portée, de l’avis de Saliou Beau Touré. Pour le coach de Jamono Fatick, le prochain match contre la Guinée sera plus difficile, car le Syli local est d’un autre calibre.

 

Quels enseignements tirer du match Sénégal-Liberia, samedi dernier, comptant pour le premier tour des éliminatoires du Chan-2020 ?

Le Sénégal avait en face une équipe très faible. Mais on a failli tomber dans leur piège, en ratant pas mal d’occasions en première période. Heureusement qu’en seconde période, on a marqué très tôt le but libérateur. L’équipe libérienne a montré des signes de fatigue. Je ne sais pas dans quelles conditions ils ont voyagé, mais ils étaient très fatigués après la mi-temps. En les voyant jouer, j’ai su que cette équipe allait prendre beaucoup de buts. Maintenant, notre équipe doit travailler la précision devant les buts, parce qu’on manque beaucoup d’occasions.

Justement, par rapport à ces occasions manquées, on a vécu le même scénario avec l’équipe A, lors de la Can-2019. C’est quoi le problème avec les attaquants sénégalais ?

Ce qu’il faut savoir, aujourd’hui, c’est qu’il y a un problème d’attaquants dans le football. Cela est valable même dans le haut niveau. Quand tu es un bon attaquant, tu ne chômes jamais. En ce moment, il est difficile, pour nous qui faisons les recrutements, de trouver un ‘’tueur’’. C’est un problème général. Néanmoins, il faut continuer à travailler sur cet aspect.

Pourquoi cette carence ? Est-ce au niveau de la formation ou sont-ce les joueurs qui n’ont pas cette aptitude ?

Actuellement, le football a beaucoup changé. Les équipes cherchent à se renforcer tactiquement. C’est-à-dire que les gens ont l’habitude de jouer avec beaucoup de milieux de terrain et de renforcer leur défense. Au niveau de la ligne offensive, on aura un attaquant, maximum deux. Il faut beaucoup travailler sur l’attaque. Le football est devenu trop défensif. Cela se confirme quand une équipe joue avec quatre défenseurs et deux milieux récupérateurs. Même notre équipe locale, malgré les nombreuses occasions, a joué en première période avec quatre défenseurs et deux milieux récupérateurs, en l’occurrence Jon Lopy et Madické Kane.

A l’heure actuelle, les gens se soucient de ne pas prendre de buts, en renforçant leur défense, avant de se préoccuper de la phase d'attaque.

Sur les balles arrêtées aussi, il y a un déficit, même si le 3e but du Sénégal a été marqué sur coup franc…

Ça, c’est vrai. Même dans notre championnat, il y a le même problème. Ce que je peux dire, dans tout ça, c’est qu’il ne faut pas se décourager et continuer à travailler. Mais ce n’est pas évident, parce que c’est des gestes techniques individuels. On voit des gosses qui savent tirer. Il faut maintenant les encadrer. Peut-être, d’ici peu de temps, on pourra changer les choses.

Pour le prochain match, le coach devra encore réorganiser son effectif, parce qu’il y a le risque que certains joueurs signent à l’étranger et d’autres vont participer à d’autres compétitions comme les Jeux africains. N’est-ce pas l’éternel recommencement du football sénégalais ?

La sélection nationale la plus difficile à gérer, c’est l’équipe locale. J’étais à Mbour, la semaine dernière, pour le match amical contre la Mauritanie. J’ai rencontré les coaches qui m’ont confié qu’il y avait au moins une dizaine de départs, avant la rencontre contre le Liberia. Notre problème, c’est que notre football n’a pas de moyens. Quand un gosse obtient un contrat avec un salaire même d’un million, c’est impossible de le retenir. Ce n’est pas facile parce qu’au Sénégal, on ne peut pas payer un joueur jusqu’à 500 000 F Cfa.

Pour l’équipe nationale locale, c’est trop compliqué. Chaque année, on prépare un groupe et avant la compétition, il y a des départs. On est obligé de recommencer. Tout le temps, c’est l’éternel recommencement.

Le match prochain, c’est au mois d’octobre 2019. Et d’ici là, le championnat n’aura pas encore démarré. Cela ne risque-t-il pas d’avoir un impact physique négatif sur le jeu de l’équipe ?

Absolument ! Comme je le dis souvent, on ne peut pas faire un football sans l’accompagnement de l’Etat. C’est difficile pour les présidents qui vont sortir de l’argent de leurs poches. Si on veut avoir un football de très haut niveau, on ne peut pas rester quatre à cinq mois sans jouer. Le championnat est terminé depuis mai et on va reprendre qu’en novembre. Dans le haut niveau, on ne peut pas rester trois mois sans compétition. On va jouer contre une équipe qui a terminé tout récemment son championnat. Encore que la fédération guinéenne a initié un tournoi entre les clubs qui vont participer aux compétitions africaines. Leur sélection locale est basée sur ces clubs. Ils ont plus de compétitions par rapport à nos joueurs. Bangoura (l’entraineur de l’équipe locale guinéenne) va puiser dans ces équipes pour faire sa sélection.

Le fait de faire face encore à une équipe guinéenne qui avait éliminé le Sénégal, il y a deux ans, à la même étape de la compétition, ne va-t-il pas constituer un handicap psychologique pour les joueurs ?

Le footballeur doit avoir un mental de fer et être prêt psychologiquement. Maintenant, c’est vrai qu’en petite catégorie, la Guinée nous fatigue beaucoup. Le constat est qu’à Dakar, il n’y a plus de stade. On ne joue pratiquement pas en petite catégorie. Les clubs de Dakar sont obligés d’aller à Pikine, au stade Alassane Djigo, à Guédiawaye, au stade Amadou Barry, ou à Rufisque, au stade Ngalandou Diouf, pour jouer.

Auparavant, les équipes de Dakar dominaient, parce qu’il y avait les stades Demba Diop et Iba Mar Diop qui fonctionnaient. Actuellement, il n’y a rien. On ne peut pas jouer au football dans la capitale. Malheureusement, on est obligé de faire avec.

En Guinée, même si ce ne sont pas des stades, ils ont des terrains gazonnés un peu partout. Même en Gambie, c’est pareil. C’est compliqué pour les techniciens de football. En Guinée, ils sont en train de faire du bon travail dans le football local. Il y a même une chaine de télévision qui diffuse les matches du championnat tous les week-ends. Quand leurs équipes rencontrent celles du Sénégal, elles sont hyper motivées. Cela va être un match difficile, parce qu’ils sont toujours en compétition avec le tournoi initié avec la fédération.

Néanmoins, on a un bon groupe qui est là. Il suffit de les booster mentalement pour qu’ils décrochent la qualification. Espérons que cette fois-ci sera la bonne. Serigne Saliou est en train de faire du bon travail, malgré les difficultés.  

LOUIS GEORGES DIATTA

Section: