Publié le 3 Aug 2015 - 14:30
SANOUSSI DIAKITE (MEMBRE DE LA CONVERGENCE DES CADRES REPUBLICAINS)

‘’Macky Sall sait aller au-delà du danger et l’affronter’’

 

Après la visite du président de la République à l’université de Dakar, c’est le temps du bilan. Au moment où certains parlent d’échec, le directeur de l’Office national de la formation professionnelle (ONFP), Sanoussi Diakité, soutient lui le contraire. Dans cet entretien avec EnQuête, ce responsable politique de l’Apr à Kolda et membre de la Convergence des cadres républicains estime qu’en se rendant à l’Ucad, le chef de l’Etat a montré qu’il sait affronter le danger.

 

La visite du président de la République Macky Sall vendredi dernier à l’université de Dakar a été marquée par des jets de pierres. Quels enseignements tirez-vous de cela ?

Le président de la République a montré que c’est quelqu’un qui sait aller au devant du danger et l’affronter. Parce que l’université est un cadre qui est connu. Ce qui aurait étonné les gens, c’est qu’il n’y ait pas de réactions. Tout le monde sait que l’université est telle qu’il y a une ébullition intellectuelle et politique permanente. C’est le propre de l’université. Donc en y allant, il est tout à fait normal qu’on s’attende à des velléités d’opinions contraires, d’hostilités de partis d’opposition, etc.

Est-ce que cela ne traduit pas une perte de popularité de votre leader ?

Mais non ! La signification, c’est que, voilà un danger qu’on savait et il est allé au devant pour juste dire : je fais partie des étudiants. Il est retourné à l’université et voulait parler aux étudiants. Maintenant le danger étant là, ce n’est pas cela qui devait le faire reculer. Mais ces manifestations ne traduisent en rien une baisse de popularité. Autant il y a eu des manifestions hostiles, autant il y a eu des ovations.

Est-ce que cette image d’un Macky Sall barricadé derrière les forces de l’ordre pour éviter les pierres des étudiants ne va pas lui porter préjudice.

Je ne le pense pas. Au contraire, les gens retiendront que c’est quelqu’un qui a osé affronter le danger, la menace, le risque. Et quand on a un chef comme cela, ça rassure. Parce que si demain le Sénégal était devant des dangers, il descendrait et irait au charbon. Maintenant, ceux qui l’ont couvert, ils l’ont couvert par devoir. Mais lui, il n’a jamais reculé devant le danger. Le président de la République est allé à l’Université pour inaugurer des infrastructures. Ce qui est en soi  une bonne chose. Maintenant les gens vont se poser la question de savoir s’il mérite des jets de pierres. Cela va plutôt créer un flux de sympathie à sa faveur.

Vous êtes le directeur de l’Office national de la formation professionnelle. Comment appréciez-vous la situation au niveau de l’enseignement supérieur ?

C’est le troisième élément que je voulais évoquer comme enseignement de cette visite. Une réforme a été initiée pour sortir l’enseignement supérieur de sa situation de crise et cette réforme est aujourd’hui en marche. Cette réforme exige un portage énergique, du courage, de la perspicacité et de la témérité. Sinon on ne réussira pas la réforme alors que tout le monde sait que c’est une bonne réforme qui va créer une nouvelle carte universitaire. Elle va créer beaucoup d’universités, donner sa place aux formations en science et en technologie, permettre aux étudiants d’avoir plus de places, plus de lits et des enseignements de qualité. On ne demande pas mieux.

Mais cela va avec un certain nombre de mesures de restauration de la rigueur, de la discipline et de la bonne gouvernance. Et tout cela dérange. Si cela aboutit, tout le monde doit applaudir. C’est pourquoi il est important de maintenir le cap et c’est la meilleure manière aussi de rendre hommage à tous ceux qui se sont sacrifiés pour la réussite de cette réforme. La réforme est en cours et il faut la soutenir. Le président de la République est venu pour montrer qu’il a une option politique clairement affichée en faveur de l’enseignement supérieur. La manne financière qu’il a orientée vers l’enseignement supérieur est inédite au Sénégal.

Quelle est la situation au niveau de l’Office national de la formation professionnelle que vous dirigez ?

L’office se porte bien. Depuis mon arrivée, nous sommes en train de mettre en œuvre un plan stratégique qui normalement doit prendre fin en 2015 et a démarré en 2013. Dans ce plan, il y a cinq axes et l’un des axes porte justement sur l’objectif de couvrir le champ règlementaire des missions de l’ONFP. Jusqu’à mon arrivée, il y avait 1/5 des missions qui était assuré. L’ONFP s’est aujourd’hui déployé sur toutes ses missions sur la formation qualifiante, la construction de centres de formation, l’élaboration et l’édition de manuels scolaires et sur la recherche. Jusque-là, on faisait de la formation qualifiante mais on laissait un peu les autres. Quand on dit formation qualifiante, c’est qualifier le demandeur d’emploi, lui donner les aptitudes à occuper un emploi ou à exercer une activité professionnelle. Et on qualifie selon les règles d’une convention collective de branche qui comporte des catégories professionnelles.

Vous avez été lauréat en 2008 du prix Tech Awards. Pouvez-vous nous parler de ce sacre ?

C’est un prix qui récompense l’avènement de la machine à décortiquer le fonio que j’ai mise au point. C’est une machine qui est venue lever une contrainte de développement d’une filière qui est porteuse d’espoir pour les pays africains. Le fonio est une céréale qui est une chance pour l’Afrique de l’Ouest. On le cultive du Cap-Vert au Tchad en passant par le Nigeria, le Burkina et la Côte d’Ivoire. Mais c’est une céréale qui a été délaissée à cause de la pénibilité de la transformation. Mais c’est la céréale la plus nutritive. Sur le plan agronomique, il comporte énormément d’atouts puisque c’est un aliment de soudure qui mûrit avant les autres en hivernage. C’est une culture hâtive qui ne demande pas beaucoup d’eau et qui peut pousser sur des sols rocailleux et pauvres. Son seul problème, c’était au niveau de la transformation qui prenait du temps aux femmes qui mettaient 2h pour décortiquer 2,5 kg. La machine que j’ai mise au point permet de décortiquer 5 kg en 8 mn.

Ne pensez-vous pas que c’est ce volet innovation qui manque à notre développement économique ?

On ne donne pas à l’innovation sa place dans les stratégies de développement. Or, l’innovation porte la croissance parce qu’elle permet de créer une exclusivité de marché. Dès lors qu’on a une exclusivité de marché, on a une source de croissance parce qu’on est le seul à vendre. Justin Hughes, expert en innovation de l’Office américain des brevets, a dit : ‘’La richesse d’un pays le rend plus soucieux de préserver sa propriété intellectuelle, et l’attention accru d’un pays à sa propriété intellectuelle le rend riche.’’ C'est-à-dire que quand on prête attention à cette masse critique de brevets dans un pays, cela attire l’attention des investisseurs. Cela devient, dans une économie du savoir, un élément d’attraction. Parce que là où il y a de l’invention et des dépôts de titres de brevets, il y a une capacité qu’on montre à mettre en œuvre des innovations. C’est pourquoi nous, inventeurs, au sein de notre association, demandons à contribuer au PSE en apportant des solutions innovantes dans la mise en œuvre des programmes prioritaires.

PAR ASSANE MBAYE

 

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