Publié le 4 Sep 2019 - 01:26
SERIE DE PROCES POUR NON-INSCRIPTION DANS LE FICHIER SANITAIRE

La prostitution se masculinise

 

La prostitution masculine gagne du terrain, dans ce pays. En témoignent les nombreux procès pour non-inscription dans le fichier sanitaire impliquant des hommes. Celui d’hier a vu la condamnation de quatre jeunes hommes âgés entre 22 et 27 ans. Au cœur de cette affaire et des autres déjà notées, le site ‘’nexna.com’’.

 

La récente série de procès mettant en scène des hommes, dans le cadre d’affaire concernant le plus vieux métier au monde, montrent que la prostitution n’est plus uniquement le fait des femmes, dans ce pays. En effet, pendant longtemps, les regards se sont tournés vers les travailleuses du sexe. Pour le genre opposé, moins exposé, et pourtant s’adonnant à la même activité, les acteurs étaient considérés comme des gigolos. Ce n’est plus le cas. Ils peuvent s’adonner à la prostitution, à la condition de respecter les règles : se munir d’un carnet sanitaire.

Le phénomène a pris de l’ampleur, ces temps-ci, avec le concours des réseaux sociaux. Ainsi, plusieurs affaires de prostitution masculine ont été jugées devant le tribunal de grande instance hors classe de Dakar en flagrants délits. Et devant la barre, la plupart d’entre eux se disent surpris d’avoir été arrêtés, parce qu’ils ignoraient que ce à quoi ils s’adonnaient est réprimé par la loi, alors que d’autres reconnaissent les faits pour lesquels ils sont poursuivis et évoquent une situation de précarité.

Le procès d’hier, devant la juridiction des flagrants délits, ne déroge pas à cette nouvelle donne.  Abdou A. Guèye, Adama Pouye, El Hadj Dieng, Amadou Doumbouya, un quatuor de jeunes hommes âgés entre 22 et 27 ans, ont comparu pour la diffusion d’écrits contraires aux bonnes mœurs et prostitution sans être inscrits dans le fichier sanitaire. Après décision, ils ont écopé d’une peine exemplaire de 2 ans d’emprisonnement avec sursis.

Les deux premiers susnommés ne reconnaissent pas la prostitution, mais acceptent la première infraction. Ils soutiennent s’être inscrits sur le site, juste pour le plaisir. Déclaration en porte-à-faux avec la tarification de leurs prestations exposée sur ‘nexna.com’. Ils ont plaidé mordicus leur innocence et ont ajouté n’avoir jamais su que ce qu’ils faisaient était interdit par la loi. Les deux autres prévenus reconnaissent les deux chefs et plaident une situation financière instable. D. Doumbouya : ‘’C’était pour me faire un peu d’argent. Je dois subir une intervention chirurgicale et je m’étais dit que c’était un moyen de me faire un peu d’argent. Je suis docker et je n’ai pas de qualification.’’

Leurs avocats ont souligné que les forces de l’ordre ne devraient pas user de subterfuges pour les piéger et qu’ils n’ont pas concouru à la constatation d’une infraction déjà commise ou en cours d’exécution, mais plutôt ont provoqué ces jeunes à en commettre une. Puisqu’ils ont répondu au coup de fil d’une dame qui les a piégés.

Le tribunal a décidé d’une peine de 2 ans assortie de sursis et leur a ordonné de s’enregistrer dans le fichier sanitaire.

Le site ‘’nexna.com’’ au cœur des procès

Dans le procès d’hier et dans tous autres du même objet, le site ‘’nexna.com’’ est cité. Ce site permet aux travailleurs du sexe, tout genre confondu, d’y poster des annonces et d’avoir plus de visibilité, afin d’accroitre leurs chances de se dégoter plus de clients. Il n’en demeure pas moins que, même si les autorités compétentes arrivent à faire fermer ce site, un autre sera créé, et cela ne freinera nullement la progression de la prostitution.

‘’On ne vous interdit pas de vous prostituer, mais on exige de vous munir d’un carnet sanitaire afin de vous régulariser pour vous protéger ainsi les autres’’, ont martelé, à maintes reprises, les représentants du parquet.

Mais, dans notre société, il est mal vu ‘’un homme prostitué’’. Et pourtant, ils créent des comptes sur ‘’nexna.com’’, y font des annonces évocatrices, du genre : ‘‘Grand étalon noir pour femmes en manque’’ ou encore : ‘‘Je peux vous amener au septième ciel’’, en y laissant leur numéro de téléphone et les tarifs allant de 15 à 30 mille, souvent discutables. Les plus rusés ouvrent des salons de massages fictifs qui n’ont pour but que de passer inaperçus. Mais ils ne peuvent pas déjouer la vigilance des forces de l’ordre qui, presque chaque semaine, démantèlent un réseau de prostitués des deux genres.

Le Sénégal est un pays laïque et religieux, avec beaucoup de tabous. Donc, il est difficile, pour beaucoup, de parler de sexualité. Mais aux grands maux, les grands remèdes. Il est temps d’évoquer la prostitution masculine. Et ceci pour leur propre sécurité. On a déjà du mal à sensibiliser pour les maladies sexuellement transmissibles, alors où allons-nous si les hommes se mettent à vendre leur corps, sans savoir qu’ils se prostituent ? Pis, parmi ces travailleurs du sexe, il y a des hommes mariés qui disent s’y adonner pour le plaisir. Mais qu’en est-il de la rétribution ? S’est-il protégé pour éviter de contracter une maladie et la ramener dans son foyer ?

Messieurs, munissez-vous d’un carnet sanitaire.

FAMA TALL (STAGIAIRE)

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