Publié le 13 Feb 2012 - 13:50
STRATEGIE DE LUTTE CONTRE WADE

De l'impréparation notable du M23 au système Macky

Pendant une semaine de campagne électorale, le M23 a erré à la recherche d'une stratégie unitaire acceptable par tous : contrer la candidature du chef de l'Etat sortant tout en déclinant les projets présidentiels. En privilégiant le premier terme pour sacrifier le second, ses candidats ont constaté que la mayonnaise ne prenait pas. D'où le changement de cap qui rejoint finalement la tactique de Macky Sall.

 

 

Après tergiversations, mésententes, mésalliances et conflits par presse interposée, les candidats membres du Mouvement du 23 juin, tous opposés à la candidature du président de la République sortant, semblent avoir trouvé le bon tempo pour enfin lancer leur campagne électorale en direction des échéances du 26 février. A l'exception notable de Macky Sall, les grosses pointures de l'opposition au régime semblaient jusqu'à ce week-end naviguer dans les eaux troubles d'un grand écart qui manquait de pertinence. Comment affronter le candidat Abdoulaye Wade, adversaire commun, sans revenir sur une décennie de gouvernance politique, économique, sociale, culturelle dont on sait ce qu'elle a apporté au Sénégal, en bien et en mal ? Comment demander les suffrages des électeurs sénégalais en faisant de la non-candidature de Me Wade un principe sacro-saint alors même que le candidat contesté est légalement sur le terrain en train de dérouler sa campagne électorale ?

 

Dans les deux cas de figure, on peut subodorer que les candidats ''radicaux'' du M23 estiment déjà acquise la décision des Sénégalais de ne pas réélire le chef de l'Etat sortant. Mais dans tous les cas, le M23 valide ce qui avait été souligné il y a quelques jours entre ces lignes : il fédère un trop-plein d'infantilismes et de contradictions cumulé à une absence inquiétante de stratégie unitaire efficace et acceptable par tous ses membres. Du reste, l'impasse qu'elle a développée pendant une semaine de campagne électorale en se focalisant absolument sur l'impossible candidature de Me Wade est une confirmation des difficultés que rencontre l'opposition depuis 10 ans.

 

La plupart des Sénégalais en ont sans doute marre de Wade, mais ils ont montré en quelques jours qu'ils ne sont pas prêts à refiler un blanc-seing aux opposants politiques. Se battre avec comme seul argument une candidature inconstitutionnelle contre laquelle la majorité des opinions est déjà engagée paraît trop juste pour servir d'alternative programmatique dans le contexte d'un Etat dissolu à travers ses institutions, avec une économie transformée en casino, des services sociaux de base ravagés par la corruption... Il est donc heureux que les composantes essentielles du M23 aient très tôt décrypté le message de l'opinion et évalué une stratégie du vide qui aurait pu s'avérer extrêmement improductive au soir du scrutin.

 

Aujourd'hui que les tirs semblent avoir été rectifiés, c'est Macky Sall qui apparaît bien malgré lui comme l'exemple de ce qu'il faudrait accomplir en terme d'organisation globale, tant dans le discours que dans l'exécution des tâches. A la fois dire aux Sénégalais pourquoi Abdoulaye Wade n'a pas sa place dans cette élection présidentielle, pourquoi il ne doit pas être réélu s'il se présente tout de même le 26 février, et comment neutraliser une ''machine à fraudes'' que tous mettent à l'index mais dont on ignore encore les mécanismes et le fonctionnement. Tels devraient être les grands axes de la quinzaine décisive qui s'ouvre à partir d'aujourd'hui. Sinon, il faudra que les uns et les autres aient le courage de demander publiquement le report de l'élection présidentielle aux calendes sénégalaises.

 

MOMAR DIENG

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