Publié le 21 May 2019 - 20:01
TAMBACOUNDA - MEURTRE DE LA FILLE DU DG DE L’AD

Le bourreau de Bineta Camara tombe sur les lieux du crime

 

Présumé meurtrier de Bineta Camara, Pape Alioune Fall, militant de l’Apr et bras droit du directeur général de l’Adl, Malal Camara, a été appréhendé hier, alors qu’il s’affairait à monter la bâche devant abriter la cérémonie funèbre devant la maison de sa victime. Pendant les quarante-huit heures qui ont précédé son forfait, il était au chevet de la famille et assistait même les enquêteurs qui étaient sur les lieux pour déterminer les circonstances de ce meurtre odieux.

 

En termes d’ingratitude et de cruauté, Pape Alioune Fall a atteint des sommets. Grassement entretenu par le directeur général de l’Agence de développement local (Adl) dont il est d’ailleurs le bras droit, il n’a trouvé rien d’autre à faire que de tenter d’abuser de la fille de son mentor. Les choses ont viré à la tragédie. Puisque la fille a trouvé la mort. Aux hommes du commissaire Hamady Baldé, sous la houlette de son adjoint Alioune Fall, il n’a fallu que 48 heures pour démêler tout l’écheveau de ce meurtre crapuleux.

Le présumé meurtrier de Bineta Camara a été arrêté hier, devant le domicile même de sa victime, alors qu’il aidait à monter la bâche devant abriter la cérémonie funèbre. Ses relations avec la famille étaient tellement empreintes de confiance que toutes les portes de la maison lui étaient exceptionnellement ouvertes. D’ailleurs, il a abusé de la confiance de sa victime pour accéder à la maison, le jour du drame.

Des traces de sang de la victime retrouvées sur le caleçon de Pape Alioune Fall

Samedi, il est 20 h passées. Alors que le vigile s’est momentanément absenté pour aller chercher de quoi se mettre sous la dent, après une journée de jeûne, il appelle Bineta Camara sur son téléphone et lui demande de lui ouvrir la porte. La fille s’exécute sans arrière-pensée. Elle lui ouvre le portail de la maison et retourne tranquillement dans ses appartements. Pape Alioune Fall ferme le portail de la maison derrière lui et rejoint sa victime dans sa chambre. Là, il tente d’abuser d’elle. Alors que, expliquent nos interlocuteurs, c’est cette même fille qui lui servait souvent à manger, à chaque fois qu’il était de passage dans la maison.

Devant le refus de Bineta de satisfaire sa libido, il s’en est suivi une rude bagarre au cours de laquelle la fille a reçu un coup sur la tempe qui lui a été fatale. Lorsqu’elle s’est affalée, le bourreau s’est enfui. Un crime n’étant jamais parfait, il a commis l’erreur d’emporter avec lui le téléphone de sa victime.

Le concours du vigile

Au cours des investigations de la police, les enquêteurs se sont intéressés en premier au téléphone de la victime. C’est ainsi qu’ils ont sollicité l’aide de la Sonatel qui a retracé le portable. L’opérateur a fourni le numéro du dernier appel reçu par la victime. Selon des sources proches de l’enquête, les policiers sont retournés dans les locaux du commissariat urbain de Tambacounda où se trouvait toujours le vigile placé en garde à vue. Avec le téléphone de ce dernier, ils ont composé le numéro fourni par la Sonatel. L’identité du présumé meurtrier s’est aussitôt affiché. Questionné, le vigile a dit connaitre le bonhomme avec qui il a pris le thé devant la maison, la veille du meurtre.

Les enquêteurs lui ont alors demandé de les conduire chez Pape Alioune Fall qui loge à Sara Guilèle. Il n’était pas sur les lieux. Le vigile leur a conseillé, dès lors, de se rendre à la maison mortuaire. Sur place, ils ont trouvé Pape Alioune Fall en train de monter la bâche devant abriter les funérailles.

Dès qu’il a vu les limiers, dit-il, il a simulé un appel pour tenter de quitter les lieux. Mais il a été intercepté par les enquêteurs. Conduit au commissariat, il est aussitôt passé aux aveux.

‘’Je ne sais vraiment pas ce qui m’a poussé à poser cet acte’’

Non sans dire qu’il ne se sait pas réellement ce qui l’a poussé à commettre son forfait. ‘’Je ne sais vraiment pas ce qui m’a poussé à poser cet acte. Je ne comprends toujours pas ce qui s’est passé’’, a-t-il aux enquêteurs, lors de son interrogatoire. Selon des sources proches de l’enquête contactées hier par ‘’EnQuête’’, des traces de sang de la victime ont d’ailleurs été découvertes sur le caleçon de son bourreau. Ce qui conforte la thèse de la tentative de viol.

Mais, selon la famille, Pape Alioune Fall n’a pas pu abuser de Bineta Camara. Il n’a pas pu commettre son forfait, selon aussi le rapport du médecin-légiste qui a procédé à l’autopsie et qui a livré hier, au père de la victime, le certificat de genre de mort.

L’autopsie réalisée, la levée du corps de la victime est prévue aujourd’hui mardi 21 mai 2019, à la mosquée de Sara Guilèle, suivie de son enterrement au cimetière musulman du même quartier. D’ailleurs, une vidéo circulant sur les réseaux sociaux appelle les populations de Tambacounda à se mobiliser pour la circonstance, comme un seul homme, pour rendre un ultime hommage à Bineta Camara, réputée être une fille sociable, innocente et très pieuse.

Pape Alioune Fall, un partisan du moindre effort

Menuisier de son état, Pape Alioune Fall fréquentait la maison des Camara. Il en était presque devenu un familier. Selon les témoignages recueillis par ‘’EnQuête’’ auprès des proches de la famille, il mangeait et dormait même dans la maison de sa victime. Bineta Camara, selon des sources concordantes, lui servait toujours à manger, à chaque fois qu’il venait dans la maison. Pape Alioune Fall, qui était très proche de sa victime et des autres membres de la famille, était jusqu’à son forfait le bras droit du père de la victime, Malal Camara.

‘’C’est lui qui animait les thés-débats de Malal Camara. Il était tout le temps dans sa maison. Il habitait presque là-bas. Il était quasiment devenu un membre de la famille. Je ne sais vraiment ce qui l’a pris, mais il a vraiment merdé, cette fois-ci’’, confie un de ses amis joint par téléphone par ‘’EnQuête’’. Il ajoute que Pape Alioune Fall était un militant de l’Alliance pour la République, un pro-Malal Camara qui ne rechignait pas à la tâche, quand il s’agit de supporter ou de défendre son leader.

S’il est dépeint comme une personne sociable, zen en toute circonstance, des sources concordantes soutiennent que c’est quelqu’un qui aime aussi la facilité. ‘’Il m’appelait souvent pour me demander de l’argent. Il faisait le thé au vigile de la maison. Il est menuisier de formation, mais partisan du moindre effort. C’est un gars qui aime la facilité. Il appelait souvent les gens pour leur demander de l’argent, quitte parfois à inventer des histoires à dormir debout. Si ce n’est pas une maladie de sa femme, c’est celle de ses enfants qu’il servait. Je lui donnais de l’argent à chaque fois qu’il m’appelait, tout en sachant qu’il inventait des histoires’’, soutient un autre proche du père de la victime, lui aussi contacté par ‘’EnQuête’’.

ASSANE MBAYE

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