Publié le 16 Oct 2014 - 23:53
TEMOIGNAGE DE VICTOR KANTOUSSAN

Le garde du corps de Karim Wade charge le Commandant Cheikh Sarr 

 

Troisième témoin à défiler à la barre de la CREI, Victor Kantoussan a cherché à blanchir son patron Karim Wade, non sans charger le Commandant Cheikh Sarr de la Section de recherches de Colobane. Il a fait une révélation sur Moustapha Niasse.

 

A  l’instar de son collègue et ex-frère d’arme, Victor Tendeng, l’ex-gendarme Victor Kantoussan n’a pas fait dans la dentelle pour tenter de disculper Karim Wade accusé d’enrichissement illicite. Le garde du corps de Karim Wade n’a pas tari d’éloges à l’endroit de son patron. Il lui a fallu de multiples détours pour répondre enfin aux questions de la  Cour et du Parquet spécial. C’est avec beaucoup d’hésitations qu’il a finalement consenti à avouer avoir versé de l’argent dans le compte de Karim Wade, à deux reprises.

« On m’a posé la même question à la Section de recherches (SR)… Oui je l’ai fait. J’ai versé 50 millions, puis 36 millions de FCFA », a-t-il répondu au président Henri Grégoire Diop. Et de rétorquer, lorsque le juge a demandé qui lui a remis l’argent : « Il m’a été remis dans les locaux du palais de la République par le Président Wade en mains propres. Il m’a dit de le verser dans le compte de Karim, en me donnant les coordonnées bancaires ».

Selon ses explications, les versements ont eu lieu en 2002 et Karim Wade était hors du pays, en ce moment-là.  Sur sa lancée, le témoin a ajouté que c’était le seul acte qu’il a posé pour Karim Wade en dehors de sa mission de garde du corps. « Ce que j’ai fait pour Karim Wade n’a rien d’anormal, car  la mission service de sécurité est très large. Karim ne m’a jamais demandé un service afférant à l’argent. Il ne m’a jamais demandé de verser de l’argent dans son compte, mis à part ces deux versements», a-t-il ajouté. Avant de lâcher : «  Je n’ai jamais fait de retrait pour le compte de Karim. Je vous demande de ne pas verser mon patrimoine sur le sien, car j’ai travaillé avant lui et je travaillerai après lui, car je suis dans l’immobilier ».

Seulement le témoignage de Kantoussan sonne faux par rapport à certains propos d’Eli Manel Diop. L’ex-DG de AHS a soutenu lors de l’instruction que l’ex-gendarme a eu à poser d’autres actes pour le compte de Wade junior. Selon Eli Manel Diop, Kantoussan lui a apporté les dossiers pour le dépôt d’agrément de AHS, sur instructions de Karim. « Dites à ce monsieur d’apprendre à dire la vérité et ne pas accuser les gens gratuitement, car il n’y a jamais eu de contact, ni physique, ni téléphonique entre lui et moi », s’est défendu le garde du corps.

‘’Le Commandant Cheikh Sarr et le Lieutenant Malick Ngom ont proféré des insultes contre moi’’

S’il y a une chose sur laquelle s’accordent les deux ex-gendarmes Victor Tendeng et Victor Kantoussan, c’est leur détermination à défendre avec bec et ongles Karim Wade. Mais là où les deux employés de Karim Wade divergent, c’est dans le déroulement de leur audition à la gendarmerie. Le chauffeur assistant de Wade-fils, Victor Tendeng avait soutenu avoir été bien traité par ses ex-collègues gendarmes. Ce n’est pas de Victor Kantoussan. Celui-ci accuse ses frères d’armes, notamment le Commandant Cheikh Sarr et l’adjudant Malick Ngom, de l’avoir abreuvé d’insultes. « La Section de recherches ne m’a jamais remis une convocation et j’ai été pris manu militari par les gens qui m’ont dit que je devais être auditionné », a renseigné le témoin.

Le gendarme démissionnaire qui s’est lancé dans des déballages de révéler : «  j’ai été entendu par des agents enquêteurs qui se sont permis de proférer des insultes à mon endroit ». Très en verve, Kantoussan a cité nommément le Commandant Cheikh Sarr et l’adjudant Malick Ngom qui, dit-il, « m’ont traité de traitre, de brigand, de voleur de la République,  d’âne - J’avais quatre pattes ce jour-là ». Aussi Kantoussan a fait le procès des gendarmes.

« J’ai fait 22 ans et 4 mois de carrière. Aucun de nos formateurs ne nous a appris à proférer des insultes vis-à-vis des autres ». A l’en croire, il a même demandé aux enquêteurs que ces « insultes » soient mentionnées dans le carnet de déclarations. Toutefois, le témoin s’est dit convaincu les deux gendarmes n’agissaient pas pour le compte de la gendarmerie, mais «  pour leur propre compte ». A son avis, leur dessein était de lui « nuire ».

Moustapha Niasse aurait incité Karim Wade à quitter Londres

Durant sa déposition, Victor Kantoussan a demandé à la Cour et au Parquet spécial de ne pas le pousser à dévoiler les secrets qu’il détient, en tant qu’agent de sécurité. Il est même allé jusqu’à lancer à l’adjoint de Alioune Ndao : « Ne me poussez pas à violer mon droit de réserve. Car je connais des choses ». La réplique de  Antoine Félix Diome ne s’est pas fait attendre : « Rassurez-vous, on ne vous pousse pas.

Vous sautez tout seul », lui a lancé ironiquement le parquetier. Car tout en affichant sa volonté de se soumettre au droit de réserve, l’ex-gendarme a néanmoins rapporté des échanges intervenus entre Karim Wade et le premier Premier-ministre du Wade, Moustapha Niasse, pour expliquer les raisons qui ont poussé Karim à revenir au bercail. A l’en croire, l’actuel président de l’Assemblée nationale ne cessait de demander à Wade-fils de revenir au bercail, alors que celui-ci travaillait à Londres. « Tout le temps il le poussait à démissionner. Il lui disait : ‘démissionnez et venez aider votre père et le Sénégal’’’, a confié le témoin.

Selon Kantoussan, le fils de l’ex-président ne voulait pas de lui comme garde rapprochée. « La gendarmerie avait tous les problèmes, après l’accession de Wade au pouvoir, car d’octobre 2000 à 2003, Karim Wade a refusé qu’on lui assure sa sécurité, en tant que fils de président. J’avais énormément de problème avec lui, car il ne voulait de moi du fait qu’il travaillait à Londres », a soutenu le garde du corps. 

 

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