Publié le 17 Dec 2018 - 23:33
TENSIONS BUDGETAIRES

Karim exige un audit des finances publiques    

 

Le candidat libéral de l’opposition a invité les bailleurs de fonds du Sénégal à faire un audit de la gestion des finances publiques sous Macky Sall, dans une lettre ouverte rendue publique hier.

 

Acculé sur une question à incidence financière, Karim Wade rend la pareille. Il s’est invité, à sa manière, à la table du Groupe consultatif de Paris. ‘‘(...) Je sollicite l'implication des partenaires privilégiés pour réaliser, avant la prochaine élection présidentielle, un état des lieux sans complaisance et en toute transparence des finances publiques, un audit de la dette publique sénégalaise et un recensement des nombreux arriérés publics, dont personne ne connaît aujourd'hui le montant réel’’, a-t-il signé. Dans une lettre ouverte qui nous est parvenue hier, adressée aux bailleurs de fonds du Sénégal qui se réunissent à Paris, aujourd’hui et demain, pour un financement de plus de 2 800 milliards de francs Cfa, Karim Wade souhaite que ces partenaires au développement viennent fouiller dans la gestion de Macky Sall.

‘‘La plupart de nos indicateurs économiques et financiers sont dans le rouge, la situation est alarmante et les Sénégalais le ressentent fortement dans leur vie quotidienne. Nos finances publiques accusent une tension de trésorerie extrême, les arriérés de dette intérieure et extérieure atteignent un niveau record, la situation monétaire est caractérisée par une grave crise de liquidité bancaire qui affecte surtout les banques les plus engagées dans le financement de l'économie et menace l’existence des Pme-Pmi’’, a-t-il ajouté.

Adjoignant dans son énumération ‘‘chute du volume des exportations’’, ‘‘ralentissement de l’activité industrielle’’ et ‘‘quasi-arrêt des projets de l’Etat qui n’arrive plus à payer ses prestataires et ses fournisseurs’’, l’exilé, qui se définit candidat du premier parti d’opposition, exige ‘‘la réalisation immédiate d’un audit des finances publiques et d’un état des lieux de la situation économique et financière’’. Une adresse épistolaire qui participe de la confrontation à distance à laquelle se livre ce candidat de la coalition Karim Président 2019 et les tenants du pouvoir actuel.

Ces derniers agitent l’épée de Damoclès, depuis quelques mois, d’une contrainte par corps, si les 138 milliards de l’amende consécutive à un verdict juridique en 2015, ne sont pas remboursés par Karim Wade. Une position réitérée hier par le porte-parole du gouvernement, Seydou Guèye, dans une émission radiodiffusée. Le candidat du Pds semble faire fi de ces mises en garde et prévoit même de déposer sa candidature, aujourd’hui, via ses mandataires, au Conseil constitutionnel.

Encore la dette 

Karim Wade n’a pas hésité à mettre à profit les failles gouvernementales sur l’épineuse question de la dette. ‘‘Il (Ndlr : Macky Sall) a également fortement endetté notre pays depuis son arrivée au pouvoir en 2012, hypothéquant l’avenir des générations futures et de notre vaillante jeunesse. Dès 2014, il a accéléré cet endettement, en mettant le Sénégal en danger d'insolvabilité et de défaillance vis-à-vis de ses créanciers. Il a également créé de la dette en toute illégalité, sans autorisation de l’Assemblée nationale, en contournant le Code des marchés publics afin de donner des marchés surfacturés à son clan, en émettant pour des centaines de milliards de francs Cfa de lettres de confort’’, a-t-il dit dans la correspondance.

Le problème de la dette a déjà été soulevé par son ancien président de père, Abdoulaye Wade, en novembre 2017, juste avant le Magal de Touba, provoquant un branle-bas de combat dans les services de l’Economie, des Finances et du Plan. Des dénégations de l’argentier de l’Etat qui n’ont manifestement pas servi à grand-chose, puisque le ministre Amadou Ba lui-même concédera, à la suite de la Banque mondiale et du Fmi, qu’il y a bel et bien des ‘‘tensions de trésorerie’’, à la mi-novembre 2018.

Une brèche dans laquelle s’engouffre Karim. ‘‘M. Macky Sall a commis de très graves erreurs, notamment dans la gestion du secteur de l’énergie, qui menace, à très court terme, l'approvisionnement du pays en hydrocarbures et, par conséquent, la fourniture de la population en électricité. Des créances importantes des acteurs du secteur privé national sont aujourd'hui impayées, ce qui ralentit fortement l’activité économique et engendre un chômage devenu endémique’’, martèle Karim Wade.

Austérité ?

Des options de conduite budgétaire qui ont, entre autres conséquences, croit savoir le candidat de l’opposition, le non-financement des deux dernières campagnes de commercialisation des produits agricoles, le sous-emploi, la dette de 16 milliards due aux établissements privés d’enseignement supérieur...

L’objectif principal du Groupe consultatif, qui s’ouvre ce lundi pour deux jours, est de mobiliser tous les partenaires autour de la phase II du Plan Sénégal émergent (Pse) et de converger vers un développement durable décliné dans le Plan d’actions prioritaires (Pap 2019-2023).

Karim Wade, lui, est d’un tout autre avis. Exilé au Qatar depuis 2016 et annoncé incessamment au Sénégal, en perspective de la présidentielle de 2019, il jette un dernier pavé dans la mare. Wade-fils annonce que l’urgence d’un tel audit se justifie du fait qu’une politique d’austérité pourrait guetter le Sénégal, en cas de reconduction du pouvoir actuel. Le candidat du Pds croit que la réalisation de cet audit ‘‘sera d’autant plus nécessaire que M. Macky Sall aurait donné son accord pour que l’Etat, après l’élection présidentielle, applique un programme sévère d’austérité comportant notamment l’augmentation du prix des carburants, du prix de l’électricité et des prix de certaines denrées de première nécessité, ainsi que l’augmentation des prélèvements sociaux pour financer les dérives de ses graves erreurs de gestion’’.

OUSMANE LAYE DIOP

 

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