Publié le 28 Jan 2015 - 17:14
TRAFIC DE CHANVRE INDIEN

Voyages en eaux troubles 

 

El hadj Guèye et Oumar Dembélé ont été condamnés hier à 10 ans de prison et à des amendes pour trafic de chanvre indien. Leurs deux histoires sont dignes de vrais scenarios de film.

 

La deuxième journée de cette 3e session des Assises a connu hier deux affaires de drogue  dignes d’un ‘’very bad trip‘’. Les deux scenarios ont relaté une histoire de transport de chanvre indien qui a mal tourné. Au final : passage à la case prison pour nos deux ‘’acteurs’’ du jour : El hadj Guèye et Oumar Dembélé, tous deux chauffeurs. Ils ont été condamnés chacun à 10 ans de travaux forcés, avec 20 000 francs d’amende pour le premier et 120 000 francs pour le second.

Mais devant la cour, la comparaison s’est arrêtée là. Car, en ce qui concerne le chauffeur Oumar Dembélé, âgé de 32 ans, les débats ont rapidement pris les allures d’un court-métrage. En effet, au cours de l’audition, à aucun moment, l’accusé n’a cherché à se disculper. Poursuivi pour trafic de drogue international, il a reconnu être le propriétaire des 2 kilos de chanvre pour lesquels il a été interpellé par la brigade de recherches de Bel Air en compagnie de ses complices. ‘’Je suis le propriétaire du chanvre indien que j’ai acheté à Bamako, que j’ai ramené à Dakar via le train Dakar-Bamako’’, a-t-il déclaré de manière respectueuse devant le juge. Ainsi, le parquet à requis la peine minimale qui est de 10 ans de travaux forcés et 3 millions de francs d’amende.

Panique

Dans l’autre affaire, le ‘’transporteur’’ El hadj Guèye, âgé de 54 ans et poursuivi de trafic de chanvre entre Bayakh et Sangalkam, a tenté de se disculper devant le tribunal.  En outre, il ne reconnaît qu’un rôle de figurant dans le script de cette nuit. Les rôles principaux revenant à ses deux passagers qui auraient abusé de sa confiance, a-t-il confié au juge. ‘’Les 5 briques de Chanvre ne m’appartiennent pas. Ils étaient la propriété de deux individus qui m’ont demandé de les transporter pour 2500 francs vers Sangalkam. Arrivé au check-point de la Gendarmerie, l’un de mes passagers m’a fait comprendre qu’il était en possession de chanvre indien dans son sac. J’ai alors pris la fuite’’.

Cette déclaration a eu le don de réveiller le président du tribunal, qui lui a rétorqué : ‘’Pourquoi ne pas avertir les gendarmes de cette cargaison illicite ?’’  Cette répartie a plongé l’accusé dans un abîme de silence, avant qu’il ne réponde : ‘’J’ai pris peur, parce que je n’avais jamais imaginé être mêlé à une affaire de trafic’’, a-t-il déclaré, en baissant les yeux. Le ballet des interrogatoires a petit à petit dessiné le film des événements.

‘’Lorsque je me suis embourbé près de Sangalkam, j’ai paniqué et abandonné la voiture, sans me soucier de mes passagers. Je suis allé avertir mon patron de la situation’’, a-t-il répondu d’un air résigné. Mais, c’était sans compter sur le Président du tribunal qui lui a rétorqué. ‘’Pourquoi avoir décidé de transporter de nuit, des inconnus au péril de votre sécurité ?’’ ‘’En tant que chauffeur de  taxi  (clando),  je n’ai pas d’heures fixes de travail.

Père de 8 enfants, j’ai voulu sauter sur cette occasion (2 500 francs), car  il m’arrive de finir mes heures de travail, sans pourtant avoir de quoi subvenir aux besoins de mes enfants’’, a-t-il déclaré, avec une pointe de regret dans la voix. Avant d’ajouter que s’il était le propriétaire des briques de chanvre, il ne se serait jamais arrêté au check-point ! ‘’Je me serais sauvé et ne me serais jamais arrêté à ce contrôle des gendarmes’’, s’est-il exclamé.

Contradictions

À ce stade, l’avocat général est entré en scène et déploré les nombreuses contradictions dans les déclarations de l’accusé, depuis l’entame de la procédure. Il a pointé sa disparition, après l’incident. Le chauffeur ne s’est présenté que le lendemain de sa convocation à la brigade de Sangalkam qui avait neutralisé le véhicule avec les 4,7 kg de chanvre indien. Non sans avoir  déclaré à son patron avoir été victime d’une agression, la nuit de l’incident. Ainsi, il a requis 10 ans de travaux forcés et 3 millions d’amende. Toutefois, l’avocat de la défense a soutenu qu’aucun élément ne prouve qu’El hadj Guèye soit un trafiquant. Son seul tort a été de fuir dans un moment de panique. Pour cela, il a demandé le relaxe pure et simple. Sur ces propos, la cour s’est retirée pour délibérer.

Mamadou Makhfouse Ngom

 

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