Publié le 23 Mar 2020 - 20:24
TRANSMISSION COMMUNAUTAIRE DE LA COVID-19

Un glissement dangereux

 

C’est la première fois, depuis l’apparition de la maladie au Sénégal, que les services du système de santé parlent de cas issus de la transmission communautaire. Cette évolution de la pandémie au Sénégal est lourde de dangers pour la lutte.

 

Ce samedi 20 mars, sur 31 tests réalisés par l’Institut Pasteur de Dakar, 9 sont revenus positifs. Il s’agit de 5 cas importés, 1 cas contact rattaché au patient n°5 déclaré positif le 11 mars 2020. Trois nouveaux cas sont issus de la transmission communautaire. Cette nouvelle transmission annoncée hier par le ministre de la Santé et de l’Action sociale, Abdoulaye Diouf Sarr, a semé la panique dans le pays. Ce qui pousse beaucoup de citoyens à proposer le confinement. Une probabilité qui n’est pas exclue.

Car, selon Abdoulaye Diouf Sarr, la situation est très sérieuse. ‘’Il ne faut donc ménager aucun dispositif de protection des populations. Le Comité national de gestion des urgences, compte tenu de l’urgence et de la nouvelle physionomie du nouveau comportement de l’épidémie, va rapidement, dès demain matin (aujourd’hui) apprécier la situation’’, déclare-t-il hier à la RTS.

Auparavant, il est revenu en détail sur cette transmission communautaire. ‘’Hier à Thiès, on a pu détecter 3 cas sans pouvoir systématiquement et de manière certaine les lier à des points de contamination. C’est là qu’il faut faire un travail important d’investigation, pour aller à l’origine de leur contamination. Pour éviter ce genre de situation, il faut que l’on soit ferme dans l’application des mesures qui ont été décidées. La riposte n’est pas une riposte médicale, c’est une riposte communautaire. Il faut une riposte qui exige la mobilisation de tous les Sénégalais pour stopper la circulation de cette pandémie’’, précise Diouf Sarr.

‘’Nous sommes tous potentiellement avec la maladie’’

Pour le parasitologue, chef du Service de parasitologie à l’hôpital Aristide Le Dantec, Professeur Daouda Ndiaye, la transmission communautaire est lorsque les personnes testées positives n’ont pas été en contact direct avec des personnes confirmées. Il s’agit, dit-il, de personnes dont la transmission a eu lieu au sein de la communauté. La personne n’a jamais voyagé et n’a pas été en contact avec une personne connue positive. Au niveau supérieur, souligne le chercheur, c’est une transmission sans un cas importé et que la personne ne semble pas avoir été en contact avec un cas connu et confirmé. Ce qui est important à connaître, dit-il, c’est qu’il est possible de remonter la chaîne de transmission jusqu’à connaître la provenance. ‘’Quand on arrive à ce stade, il faut dire que la situation est très sérieuse. On est aujourd’hui dans un pays où la confirmation de cas et la contamination peuvent se faire à tout moment. Il faut le noter, des personnes qui peuvent être infectées sans pour autant être entre les mailles des personnes suspectes. Nous sommes tous potentiellement avec la maladie du coronavirus, sans le savoir’’, analyse le parasitologue.

Revenant sur le masque porté par le ministre pour présenter la situation, il souligne que, quand on est en dehors de sa maison, il faut noter que toute personne peut être source de contamination. C’est pourquoi il faut renforcer les mesures de prévention. Parmi les mesures de prévention individuelle, énumère-t-il, il y a le port du masque, les solutions hydro-alcooliques. ‘’C’est une préoccupation individuelle, collective et obligatoire qui doit être appliquée dans toute sa rigueur. Chaque Sénégalais a un rôle primordial à jouer pour arrêter la contamination’’, conseille Prof Ndiaye.

Pour ce qui est du personnel de santé contaminé, Abdoulaye Diouf Sarr rassure qu’aucun moyen ne sera ménagé pour les mettre dans d’excellentes conditions de travail. A l’en croire, chaque région médicale a reçu sa dotation en équipements de protection individuelle, puisqu’ils ont reçu un don très important. ‘’Nous avons donné, de manière ferme, à la coordination opérationnelle d’être en relation systématique avec les régions médicales pour que l’ensemble des structures de santé devant intervenir soient correctement équipées’’, renseigne le ministre.

ABDOULAYE DIOUF SARR

‘’Il faut que la vigilance soit de mise au niveau terrestre’’

L’hôpital militaire de campagne à Touba est fin prêt pour la prise en charge des patients atteints par le virus de la Covid-19, annonce le ministre Abdoulaye Diouf Sarr. Quand des cas ont été enregistrés à Touba, la question de leur transfert s’est posée. ‘’L’option stratégique que nous avons retenue, c’est de transformer le centre de santé de Darou Marnane en un centre de prise en charge. À partir de ce moment, il fallait absolument que l’offre de santé de ce point soit transférée et prise en charge ailleurs. Mais l’armée a tout de suite installé un hôpital militaire pour la prise en charge de la demande de santé à Touba’’.  

Pour lui, en plus de l’application et de l’implication dans la prise en charge de l’épidémie, l’armée joue un rôle extrêmement important. Ce, au fur et à mesure de son déploiement un peu partout où le besoin sera exprimé, l’armée va s’interposer. Mais, dit-il, ils attendent surtout l’apport de l’armée au niveau de la gestion des frontières. ‘’Les frontières terrestres sont extrêmement poreuses. A ce niveau, les forces de défense et de sécurité jouent un rôle très important, pour permettre, pendant cette période de gestion de l’épidémie, d’assurer les choses. Il faut que la vigilance soit de mise. Cela, avec une collaboration entre l’armée et les services du ministère de la Santé’’.

VIVIANE DIATTA

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