Publié le 19 Jul 2018 - 13:19
VIOL ET DETOURNEMENT DE MINEURE

La renversante histoire de la petite O. Sarr

 

Attrait devant le tribunal de grande instance de Pikine-Guédiawaye, le commerçant Médoune Ndao a répondu des fins de viol et de détournement de mineure. Toutefois, il encourt seulement 2 ans d’emprisonnement pour le second délit à la suite du réquisitoire du Parquet, même si le prévenu a reconnu avoir abusé de la fille de 16 ans, O. Sarr.

 

La mésaventure d’O. Sarr est assez singulière. La fillette de 16 ans, domestique de son état, a bien caché la vérité dans cette affaire de mœurs et ce, depuis le début. Pis, elle a tergiversé tout au long de la procédure. Mardi dernier, à la barre du tribunal de grande instance de Pikine-Guédiawaye, la plaignante a, une nouvelle fois, changé de version. La raison, balance-t-elle sans sourciller, ‘’je ne voulais pas que ma famille sache je suis allée rendre visite à un homme qui a fini par entretenir une relation sexuelle avec moi’’. Debout à côté du prévenu Médoune Ndao, l’image renvoie à celle de l’histoire biblique David et Goliath. O. Sarr est petite de taille, alors que le mis en cause est son contraire. Mieux, il est fort et corpulent. 

En tout état de cause, cette affaire de viol et de détournement de mineure visée par le maître des poursuites a éclaté, suite à une plainte de la nommée F. Diome, l’une des tutrices de l’adolescente. Elle a été informée par sa nièce. ‘’Elle m’a appelée pour me demander de venir la chercher. Elle me disait qu’elle venait d’être violée par un individu, que ce dernier l’avait invitée dans son véhicule alors qu’elle attendait le bus pour se rendre à Guédiawaye.  Elle m’a dit que son bourreau a usé d’une pompe à gaz afin qu’elle perde connaissance. Ce n’est qu’à son réveil qu’elle a su qu’elle a été violée’’, a raconté la dame qui a ajouté l’avoir emmenée, manu militari, à l’hôpital Roi Baudoin pour y être examinée. Le certificat médical a établi une déchirure hyménale récente.

Face aux enquêteurs, O. Sarr paniquée, a commencé à dévoiler un pan de l’histoire, dès sa seconde audition. La petite a livré le nom de l’auteur des faits : le commerçant Médoune Ndao. Elle a expliqué qu’il l’a connu via le réseau social WhatsApp. Ainsi, lors de leur première rencontre, ils se sont donné rendez-vous à la boutique du sieur Ndao à Sicap Foire. Par la suite, il lui a proposé de venir lui rendre visite chez lui à Cambérène, le 1er juillet dernier. Ce qu’elle a accepté. A son arrivée au domicile familial de son nouvel ami vers 19 heures, O. Sarr a soutenu que celui-ci l’a introduit directement dans sa chambre à coucher. ‘’Après une discussion qui a duré quelques minutes, Médoune Ndao m’a bâillonnée et m’a rouée de coups. Il a abusé de moi, avant de me remettre la somme de 2 500 F CFA pour payer mon transport’’, a-t-elle déclaré.

Après son ‘’viol’’, la domestique n’est pas rentrée chez elle. ‘’En cours de route, j’ai tout expliqué à un taximan et il a refusé de me conduire jusque chez moi, parce qu’il avait peur qu’on l’accuse des faits. J’étais désorientée, c’est ainsi qu’un chauffeur a proposé de me louer une chambre dans une auberge sise à la Cité Aliou Sow pour y passer la nuit et je devais rentrer le matin chez moi. Ce que j’ai fait’’, a-t-elle révélé. Là, la parquetière lui a demandé : ‘’Vous dites que vous veniez de subir un viol, donc pourquoi avoir accepté de partir avec un autre homme dans une auberge ? N’avez-vous pas eu peur d’être agressée sexuellement à nouveau ?’’ A cette question, O. Sarr a rétorqué qu’elle était désemparée et ne savait pas ce qu’elle faisait.

Entendu à son tour, le commerçant n’a pas nié avoir entretenu un rapport sexuel avec la fille. Il affirme que c’était une relation consentante. De plus, il ignorait l’âge de O. Sarr. ‘’Sinon elle allait crier. La maison n’était pas déserte et elle dit devant votre barre que je ne l’avais pas bâillonnée. Tout ce qu’elle a raconté à la police était faux’’, a martelé le prévenu.

Le réquisitoire indulgent du Parquet contre le prévenu

Dans son réquisitoire, le substitut du procureur a indiqué que la partie civile a signalé qu’elle a été violentée, ce que le sieur Ndao a battu en brèche. Cependant, ce qui est constant dans ce dossier, argue-t-elle, est qu’il y a un rapport sexuel. ‘’Ma conviction personnelle ne me permet pas de soutenir qu’il y a eu viol. Mon entendement et les débats d’audience ne m’ont pas convaincue.

De plus, le certificat médical peut établir une déchirure pour asseoir la thèse de la violence, mais vu la grande différence de corpulence entre le prévenu et la partie civile, le résultat ne peut qu’être ainsi’’, a-t-elle affirmé. Avant de continuer : ‘’La fille a toujours changé de version. Tantôt, elle dit qu’elle a été bâillonnée, tantôt non et cela m’étonnerait qu’une fille violée rencontre un inconnu qui la conduise dans une auberge.’’ Le Parquet a, de ce fait, retenu le détournement de mineure pour ainsi requérir 2 ans de prison à l’encontre du commerçant. ‘’En l’espèce, il ne savait pas l’âge de la victime, mais en regardant la partie civile, on sait qu’elle est mineure. Donc, cela ne saurait le dédouaner’’, a-t-elle avancé.

De son côté l’avocat de la défense a plaidé le renvoi des fins de la poursuite pour Médoune Ndao. ‘’Lorsqu’on voit la différence de taille entre les 2 parties, on ne peut pas exagérer en soutenant que le prévenu l’aurait violée. O. Sarr a dit qu’elle n’a pas été bâillonnée, battue et détournée et qu’elle n’a pas crié’’, a souligné le conseil. A propos de l’âge de la plaignante, il a fait savoir : ‘’Nous sommes des juristes. L’âge de la personne ne peut pas être déterminé par l’apparence. Dans cette procédure, on n’a pas produit un acte d’état civil qui prouve que la fille est mineure’’.

A la suite de cette plaidoirie, le juge a mis l’affaire en délibéré pour rendre son jugement demain.

 AWA FAYE

 

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