Publié le 26 Jul 2017 - 08:28

Wade, un Jupiter sans foudre ! 

 

Gringottement d’extase de Robinson Crusoé, politiques sauvés par l’arrivée d’un messie, pour dit-on sauver le Sénégal l’on ne sait de quel naufrage. Trémolos de responsables du Pds et de leurs néo-croisés, plus que leurs coalisés, de  la Coalition gagnante Wattu Sénégal auxquels font écho les soupirs sublimés de cercles politico-médiatiques en pâmoison et esbaudis à effleurer la risée, voilà ce que l’effet d’un Wade, ancien président de la République en quête de députation, a réussi à produire. Juste un polar politique pour nostalgiques de ses vieux cinémas politiques. A moins que cette arrivée ponctuée d’une campagne aux délires déjà vues et entendues ne soit destinée à certains amnésiques. Avant que le vieux en mission ne les enserre dans les dents des pièges d’une répudiation en cas de victoire improbable ou de défaite prévisible.

En effet, la seule ambition de Wade qui justifie sa mission risquée de descendre, lui ancien président de la République aux 91 piges, dans l’arène des législatives est arrimé au rêve encore et toujours nourri de consacrer sa phobie naguère rejetée par le peuple sénégalais d’installer son fils Karim Wade sur le fauteuil présidentiel. Le machiavel renversé, celui-là pour qui, les moyens justifient la fin, distille insidieusement les germes de la violence, distribue déjà les raisins amers de l’insurrection populaire, derrière les tentatives de déconstruction du Plan Sénégal Emergent et le nihilisme sans retenue de la gouvernance de son successeur. 

Wade est dans les législatives, certes, mais Wade n’est pas venu pour les législatives. Il ne fait aucun doute que le président répudié politiquement en 2012 par l’écrasante majorité du peuple sénégalais porte un projet putschiste. La preuve : dès l’entame de sa tournée politique, son appel à faire partir son successeur Macky Sall que le peuple a souverainement, et de la manière la plus nette, porté au pouvoir à l’issue d’un scrutin dont lui-même Wade n’avait point contesté la limpidité de l’issue en l’appelant au téléphone pour le féliciter. C’était en 2012. Il y a de cela seulement cinq ans ! Vous ne vous  en souvenez pas ?

L’actuel projet putschiste, sur fond de recyclage de la vieille dévolution monarchique, qui avait été tenté lors du procès de Karim, quand le père avait menacé de mettre le Sénégal en sang, en feu et en larmes en cas d’emprisonnement de son fils, se (re)dope aujourd’hui à la camomille législative, cette fois en vendant l’emballage du messie venu sauver un pays que 12 ans  durant, il avait plongé dans des délestages intempestifs, des hausses vertigineuses de prix, des folies dépensières enfumées dans des réalisations où ont été vampirisées les finances publiques comme avec l’ANOCI, le tunnel de Soumbédioune, la VDN, le monument de la Renaissance, entre autres.

Serions-nous oublieux et resterons-nous taiseux face aux nombreuses violences politiques subies, à l’époque de la ‘’Wadologie’’ triomphante, par tous ceux qui étaient soupçonnés d’avoir une ambition politique autre que celle que Wade considérait alors comme son domaine réservé et/ou à réserver pour son fils ? Comment ne pas faire refluer dans nos mémoires, les géhennes judiciaires infligées et promises à des journalistes mal-pensants et à des gens de la Société civile dont le seul crime de lèse-majesté était de contrarier le plan d’émergence de Wade-fils au départ de son père ?  

Au-delà du fonds de commerce législatif qui sert aujourd’hui d’emballage à une stratégie putschiste, revancharde assortie de celle de restauration d’un système de gouvernance congédié il y a de cela seulement cinq ans, la vérité est que Wade n’a jamais abandonné son projet de dévolution monarchique quand il déclare, au détour de son interview sur la Sen-Tv que Macky Sall doit partir et que Karim Wade est candidat du Pds en 2019.

AU NOM ET POUR KARIM

Tout est là, dans cette avidité de reconquête du pouvoir, cette fois-ci pour le fiston resté en asile doré à Doha en attendant l’hypothétique Grand soir que son vieux lui fera savourer avec l’énergie et l’engagement des fils des autres. Il est vrai que Wade nous avait infligé, sous son magistère, à nous Sénégalais, la magistrale gifle déclinée à peu près en ces termes : ‘’Karim occupe beaucoup de postes ministériels parce qu’il est le seul à bien travailler, et il a si bien travaillé que je le dirai à sa mère’’. Sous cet angle du mépris à notre endroit, nous les paresseux, le jugement de Wade n’a subi aucune ride !

La vérité qu’il faut débusquer dans l’aventure politique actuelle de l’ancien Président, c’est qu’il est toujours dans la logique, remodelée et superficiellement revue et corrigée, de faire entrer son projet de dévolution monarchique par la petite fenêtre des législatives de 2017, après avoir échoué à le faire par la grande porte de la présidentielle de 2012. Sous ce rapport, ce projet revanchard ne vise pas uniquement le Président Macky Sall mais aussi au peuple sénégalais en général. Où sont donc passés les alerteurs ?

 Il faut alors avoir la lucidité de décrypter, derrière les marges silencieuses du discours accroché à la boutique de la Coalition gagnante Watt (rase) pardon Wattu…Sénégal, les menaces dirigées contre ceux qui avaient fait obstacle à Wade en 2012. C’est un avertissement sans frais surtout pour les partis de l’opposition aujourd’hui sous la bannière ‘’wadienne’’ mais aussi pour les deux mousquetaires de Khalifa Sall (Bamba Fall et Barthélémy Dias) qui ont réduit leur campagne en séances d’indignations. Comme si l’indignation faisait un programme politique ! Qu’ils se souviennent à l’instar de Niasse, Bathily, Dansokho, Landing et autres, comment Wade arrivé au pouvoir en 2002 les avait lâchés, sans même attendre, pour certains de ceux qui l’avaient aidé, le temps d’une saison…présidentielle !   

Que de jeunes et moins jeunes responsables du Pds en accointance avec certains dirigeants d’une partie de l’opposition, la plupart bien lilliputiens, s’accrochent à la photo de campagne du vieux, relookée au numérique, et ses flonflons politiques de campagne comme une bouée de sauvetage électorale, voilà bien qui illustre à l’envi l’ampleur de la désertion, par eux, de leur responsabilité historique. Un seul Wade leur manque et tout est dépeuplé ! Un seul Wade leur réapparait et tout est repeuplé ! Ils croient au miracle de Jupiter Wade. Mais à 91 ans et avec l’ambition du pouvoir bien derrière lui, c’est Jupiter sans foudre, même si ça soulève de la poussière dans des ‘’Marches bleues’’ aux flamboyances crépusculaires !  

Soro Diop (Journaliste)

 

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