Publié le 21 Mar 2020 - 17:36

Yeumbeul Nord ferme ses mosquées

 

Avec l’arrêté du ministre de l’Intérieur notifiant la suspension des fréquentations des lieux de culte, ceux-ci n’ont pas ouvert leurs portes dans la commune de Yeumbeul Nord, à quelques exceptions près. Quant à la mesure, les opinions divergent.

 

En cette matinée de vendredi, le soleil est au zénith. Les populations du quartier de Darou Salam 6 de Yeumbeul vaquent à leurs occupations quotidiennes. La vie semble suivre son cours, dans cette contrée de la banlieue dakaroise. À un coin de la rue, un groupe d’enfants s’adonnent à leur jeu favori : le football. Une femme franchit le seuil du portail de sa maison près de l’aire de jeu et lance : ‘’Arrêtez le jeu et préparez-vous pour la prière du vendredi.’’ Les enfants rigolent et répondent en chœur : ‘’Les mosquées sont fermées.’’

La mosquée de Darou Salam 6 n’a pas ouvert ses portes. C’est le calme plat ou presque. Les maçons qui s’y affairent confient qu’ils profitent de la fermeture provisoire pour continuer les travaux dans la mosquée. C’est dans sa maison que l’imam Dramé a effectué la prière de la mi-journée. Celui qui, d’habitude, officie la prière du vendredi à la mosquée dite des ‘’Ibadous’’ de Darou Salam, se conforme à la décision de l’Etat. ‘’Il est interdit à celui qui a consommé de l’ail d’aller à la prière. En effet, il cause du tort aux autres avec sa mauvaise haleine’’, dit-il. Avant d’ajouter : ‘’Si le fait d’aller à la mosquée peut causer un quelconque tort à la communauté comme c’est le cas, il est nécessaire de ne pas s’y rendre.’’

Des fidèles peu convaincus

Son collègue du quartier qui est l’imam de la grande mosquée de Darou Salam 6, dit qu’il accepte cette décision à son corps défendant : ‘’C’est le préfet de Pikine qui nous a donné l’ordre à tous les imams de la commune de Yeumbeul de ne pas ouvrir les lieux de culte. Nous sommes au nombre de 80.’’

D’après lui, le préfet ne leur a pas laissé le choix. ‘’Il (le préfet) dit que la décision vient du président. Mais il devait discuter au préalable avec tous les imams. C’est mon avis’’, estime-t-il. Le septuagénaire qualifie même d’excessif cette décision. Comme s’il voulait donner de la solennité à son propos, l’imam Seydi change de position sur sa natte de prière. ‘’Le chef de quartier dit qu’il va informer la police, si quelqu’un ouvre la mosquée. Dans ce cas, je suis directement menacé’’.

La mosquée du Coran et de la Sunna de Darou Khoudoss Malika fait exception. Celle-ci a ouvert ses portes. A l’entrée de la cour, les talibés (apprenants) puisent de l’eau dans le puits creusé dans l’enceinte de la mosquée. Ils s’apprêtent à s’acquitter de la prière de la mi-journée. Oumar est effaré par cette décision de fermer les lieux de culte. ‘’Il est hors de question de ne pas effectuer la prière dans la maison de Dieu’’. Le jeune se dirige dans la salle de prière, accompagné d’un groupe de gamins. Il dit être conscient qu’il peut être arrêté par la police. Mais, dit-il, ‘’l’ordre divin est au-dessus de toute autre émanation’’. Abdou, un fidèle de la mosquée, lui emboîte le pas : ‘’Les gens ont peur de la police, mais pas du Tout-Puissant’’, fulmine-t-il.

AMADOU SAMOURA (STAGIAIRE)

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