Publié le 14 Aug 2018 - 08:18
LUTTE CONTRE LES HEPATITES AU SENEGAL

La vérité sur  le PNLH, un programme pas  comme les autres   Son Histoire 

 

En Décembre 1998, j’ai  sollicité une audience auprès du second Président de la République du Sénégal, le Président Abdou Diouf pour lui expliquer, l’ampleur des hépatites au Sénégal, la morbidité et la mortalité associées à celles-ci  et le peu d’intérêt accordé à ces infections au niveau national et international.

Sur instruction du Chef de l’Etat, le Premier Ministre, feu Habib Thiam m’a reçu 2 jours après pour échanger avec moi des possibilités qui s’offraient au Sénégal pour prendre en charge ‘’ce fléau’’, je le cite.

Pour des raisons budgétaires évidentes et évoquées par le Ministre en charge de la santé  d’alors, le Ministre Assane Diop, l’Etat du Sénégal  a autorisé de déléguer cette mission de santé publique à une organisation non gouvernementale en  l‘occurrence la Fondation Elisabeth Diouf Solidarité Partage. Les objectifs assignés à la Fondation étaient très clairs : mobiliser des ressources pour mettre en œuvre le plan d’action de lutte contre les hépatites  que j’avais proposé,  qui dans un premier temps devait se focaliser sur la prévention primaire,  c’est à dire la vaccination, pour prévenir les nouvelles infections. Il était envisagé dans une seconde phase d’assurer la prévention secondaire  pour diminuer la morbidité et la mortalité de l’hépatite B,  et dans une troisième phase de traiter les réservoirs de virus que sont les porteurs chroniques.  Il était même prévu  dans ce projet de mettre en place un centre de référence pour les hépatites et une unité de production des vaccins.

Ce programme ambitieux a démarré en 1999 grâce à l’appui de la fondation Elisabeth Diouf solidarité partage (FEDSP),  ma détermination et ma ténacité en tant que coordinateur nommé par la Fondation.

Alors que tous les yeux étaient rivés sur le SIDA et des moyens colossaux dégagés et injectés dans la lutte contre cette pathologie, le programme de lutte contre les hépatites  avait une équipe de 4 personnes,  bénévoles,   engagées , patriotes :  Pr Aminata Sall Diallo, Le Colonel Cheikh Diagne, l’ex directeur de la santé des armées, le Dr Amadou Alpha Sall, actuel Administrateur Général de l’Institut Pasteur de Dakar, le Pr Mamadou Sarr  actuel directeur de la qualité de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar .

Je voudrais rendre un Hommage appuyé à ces personnes citées qui n’ont ménagé aucun effort pour m’accompagner bénévolement dans cette mission qui m’était confiée.  Mes remerciements vont également au personnel  de santé qui, très vite, a adhéré à ce programme et l’a opérationnalisé avec une mention spéciale  au Dr Marie Khemesse, actuel DGS, au Dr Talla ex médecin Chef de la région de Thiès, Dr Mbow   ex médecin Chef de la région de Dakar , le Dr Diack ex médecin chef du district de Mbao et ex DGS qui se sont particulièrement distingués dans la mise en œuvre de ce programme.

Le tournant : 2006 a été un tournant dans la lutte contre les hépatites au Sénégal. Le Ministre de la santé d’alors, Mr Abdou Fall m’avait demandé d’intégrer le programme de lutte contre les hépatites au sein du Ministère de la santé avec comme  corollaire un financement du programme par l’Etat du Sénégal.  Un budget d’une vingtaine de millions avait été inscrit et géré par la DAGE du Ministère de la Santé.

Sous le Magistère du Ministre Modou Diagne Fada, ce budget est passé à 35 millions de francs CFA sans que nous n’ayons quelque  responsabilité  que ce soit dans la gestion financière.

Plus récemment, depuis 2016, le budget du PNLH est passé à 27 millions de francs,  géré par la Direction de la lutte contre la maladie soit une baisse de près de 10%.

Malgré cette faible contribution, nous avons continué de mener les activités du PNLH avec succès

 Les réalisations du PNLH

Qu’avons-nous réalisé :

Une vaccination de 30% des enfants de 0 à 5 ans entre 1999 et 2004,  avant l’introduction de la vaccination dans le PEV, vaccination à la naissance,  s’il vous plait.  Notre reconnaissance à la FEDSP qui a consenti une subvention de 99% du prix du vaccin (500FCFA vs 10 000 FCFA le prix d’acquisition) et qui a permis de vacciner dans des coins reculés du Sénégal.

Je dois également préciser que nous avons largement contribué au montage du dossier  qui a permis l’éligibilité du Sénégal aux fonds GAVI  ,  à côté du Dr Pape Coumba Faye , ex directeur la prévention.

Nous avons porté le combat pour la vaccination à la naissance,   seul gage de contrôle de l’hépatite B,  par une production scientifique sans conteste ;  et parcouru l’Afrique et le monde pour présenter nos résultats. Ces recherches,  nous les avons mené en collaboration avec le Pr Mary Teuw Niane, actuel Ministre de l’enseignement supérieur , de la recherche et de l’Innovation , le Pr  Gautthier Sallet , et Dr Moustapha Fall dont le sujet de thèse de 3ème cycle était la modélisation de la transmission mère enfant-enfant du virus de l’Hépatite B.

Merci à ceux-là qui ont permis de démontrer  que la recherche devait éclairer les politiques publiques  et qui ont permis à l’Afrique toute entière de revenir à l’orthodoxie  c’est-à-dire la  vaccination  à la naissance.

Si cela n’est pas un résultat, qu’est-ce qu’un résultat ?

En 2008, suite à la conférence internationale que nous avons organisée ici à Dakar et suite à l’appel que nous avons lancé à  l’OMS et à la communauté internationale pour que les hépatites soient érigées au rang de priorité à l’échelle internationale, bien connu sous le vocable ‘’appel de Dakar’’ ,   nous avons créé l’Initiative Panafricaine de lutte contre les hépatites (IPLH)  pour appuyer les pays à l’élaboration de plans d’action et faire le plaidoyer pour le financement de la lutte contre les hépatites en Afrique . Vingt  pays sont aujourd’hui membres de l’IPLH. Merci à Bertrand Livinec qui a développé une plateforme pour nous permettre d’échanger nos pratiques, de faire l’état des lieux  et d’appuyer à l‘élaboration de plan stratégique

Au plan de la communication, nous n’avons jamais disposé d’un budget, mais nous nous sommes toujours impliqués personnellement pour informer, sensibiliser, convaincre les Autorités, au point que notre image était systématiquement associée à la  lutte contre les hépatites au Sénégal et m’a valu d’être nommée comme conseiller  de la Directrice Générale de  l’OMS, Mme Marguerite Chan dans le cadre du STAC Hep.

 La journée mondiale a toujours  été célébrée depuis qu’elle a été institutionnalisée  par l’OMS en 2010, parfois sans moyens, quelques fois avec l’appui des laboratoires pharmaceutiques, mais toujours avec la même exigence : informer juste et vrai sur les hépatites. Je voudrais rendre un hommage mérité à la presse sénégalaise qui a toujours couvert cet événement phare de la lutte contre les hépatites  sans contrepartie aucune.

Nous avons appuyé  la création  de Safaara hépatites pour amplifier la communication ; nous l’avons hébergé pendant des années ; nous avons formé ses membres ; nous avons mobilisé des ressources en sa faveur, organisé des séances de sensibilisation des populations avec  des moyens personnels.

Par discrétion nous n’avons jamais voulu rendre publiques nos réalisations.et la question qui devait m’être posée est : Que n’avez-vous pas fait pour la lutte contre les hépatites ?

Par vos insinuations, vos déclarations infondées, M. le Président de Safaara hépatites ( élu par qui ? ) , vous m’offrez l’opportunité de dire ce que nous avons fait pour les malades infectés et affectés par les Hépatites et que nous continuerons de faire, par la grâce de Dieu

Pour le traitement des malades, nous avons rendu disponible l’interféron pégylé avec une réduction de 50%  et ce n’est pas vous M. le Président de Safaara  Hépatites qui allez me démentir, puisque bénéficiaire de la générosité du coordonnateur  du PNLH qui vous a remis à titre gracieux  toutes les  doses qui étaient nécessaires à votre traitement et qui se chiffrent en millions de FCFA.

Toujours dans le traitement des hépatites, en collaboration avec la Pharmacie Nationale d’Approvisionnement,  nous avons rendu disponible le  Ténofovir, molécule de référence dans le traitement de l’hépatite B,  avec une subvention de l’Etat et un modèle économique  pertinent  et  acceptable  socialement. Mention spéciale au Dr Annette Seck et son équipe.

Au plan du diagnostic, le PNLH a assuré le dépistage de milliers de personnes à risque (personnel de santé, étudiants en cours de formation dans les filières médicales et paramédicales, personnes vivant dans les collectivités fermées etc..)  

Nous avons régulièrement fourni des rapports à nos mandants et bailleurs, reçu des rapports des structures médicales et transmis aux autorités sanitaires. Nous avons effectué des supervisions sans moyens logistiques. Nous louions des taxis au risque de notre vie sans aucune contrepartie  car ce qui nous intéressait était la santé des populations. J’espère que le colonel Diagne pourra témoigner puisque toujours à mes côtés,  des fois dans des situations rocambolesques qu’il saura mieux raconter.

Oui, le PNLH n’est pas un programme comme les autres !

Son équipe actuelle est constituée de 5 personnes (le Coordinateur, 2 superviseurs, un responsable administratif et financier et d’un chauffeur converti en vaguemestre puisque nous n’avons pas de véhicule. Ce n’est que récemment que des commissions ad hoc ont été mises en place par le MSAS pour appuyer  l’élaboration  du Plan stratégique  national 2019-2023 de lutte contre les hépatites. Merci à tous ces acteurs qui ont apporté leur contribution à cette  mission qui nous a été  confié et dont on s’est acquitté avec responsabilité. Merci à l’équipe Pharos qui nous a permis aujourd’hui d’aller au-delà d’un plan classique , d’estimer les couts de la mise en œuvre  , de mesurer l’impact en termes de vies sauvées, de décès etc…et de disposer d’un document qui pourrait convaincre  les plus  sceptiques .

Perspectives

Nous avons élaboré un plan de mobilisation de ressources, fait un plaidoyer auprès des services compétents de l’Etat pour plus d’investissement dans la lutte contre les hépatites au Sénégal. Nous  nous dirigeons  résolument vers  l’organisation  d’une table ronde des bailleurs au mois de Septembre et je reste convaincue que  la lutte contre les hépatites est à la croisée des chemins. Canalisons notre énergie pour venir à bout de ce fléau dans l’intérêt exclusif des populations.    

Aminata Sall Diallo (Conseillère technique du

Ministre de l’Enseignement supérieur, de la

Recherche et de l’Innovation)

 

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