Publié le 26 Feb 2020 - 23:23
POUR AVOIR BATTU A MORT SON ELEVE

Le maitre coranique sadique risque une réclusion criminelle de 15 ans

 

Samba Ndao alias ‘’Bathie’’ a été jugé, hier, devant la chambre criminelle, pour coups et blessures ayant entrainé la mort d’Ameth Niang. Cheikh Syll, Ousmane Syll et Alioune Guèye ont comparu pour non-assistance à une personne en danger. Ils officient dans un ‘’daara’’ où une amende de 10 000 F est infligée au maitre coranique qui envoie un enfant à l’hôpital. 

 

Le 26 janvier 2016, les éléments de la police de Yeumbeul se sont rendus prestement au ‘’daara’’ de Mactar Syll, après avoir été informés d’une perte en vie humaine. Sur les lieux, ils ont découvert le corps d’Ameth Dame Niang gisant sur un matelas posé à même le sol, dans un piteux état. Le garçon de 12 ans venait de succomber, suite aux sévices infligés par son maitre coranique. D’après le rapport de l’homme de l’art, ses blessures ont entrainé une contusion thoracique et abdominale de grande abondance, une plaie à la rate commise par un objet dur contondant. Entendus, les témoins ont, dans l’ensemble, désigné Samba Ndao comme l’auteur des faits.

En fait, ce jour-là, vers 5 h du matin, comme à l’accoutumé, les pensionnaires du ‘’daara’’ se sont réveillés pour un récital coranique des cours de la veille. Ameth Niang avait du mal à se concentrer et piquait de la tête de temps à autre. Ce qui a énervé Bathie qui l’a sommé de réviser ses leçons. Après plusieurs mises en garde, le petit garçon n’arrivait toujours pas à résister au sommeil. Bathie lui a alors donné quelques coups de cravache pour le rappeler à l’ordre. Mais c’était sans succès.

A 7 h, l’heure de la pause, après le petit-déjeuner, pendant que ses pairs étaient au repos, Ameth a reçu l’ordre de son maitre de retourner réviser et s’y est attelé avec un autre élève qui avait le même problème d’assimilation. Bathie est venu les superviser et le grand frère du directeur de l’école coranique, Cheikh Syll, qui faisait aussi office de directeur des programmes, était avec eux.

Ne pouvant plus supporter de voir Ameth somnoler, alors qu’il devait, dans le même mois, passer l’examen de récital, il a commencé à sérieusement le battre. Cheikh Syll est intervenu quelques minutes après et a repris des mains de Bathie la cravache.

Mais il faut croire que le maitre coranique s’était levé du mauvais pied, ce jour-là, car il a invité l’enfant à venir s’asseoir auprès de lui. Puis, il a recommencé à lui donner des coups, mais cette fois-ci avec ses poings, au visage, au ventre et au dos. Le petit a perdu connaissance, selon les témoignages des autres élèves alertés par les cris, mais Bathie a continué à s’acharner sur lui. Quand il a arrêté ses coups, il a demandé aux élèves de l’emmener dans l’une des chambres où il est resté 1 heure 30 minutes, avant que Cheikh Syll ne demande à l’un des apprenants de lui donner de l’eau à boire. Trente minutes après, il a perdu la vie.

Un autre enfant a sauté du 3e étage, pour échapper au maitre

Hier, comparaissant pour coups et blessures volontaires ayant entrainé la mort d’un mineur de moins de 15 ans, commis par une personne ayant ascendance sur la victime, devant la barre de chambre criminelle, Samba Ndao alias ‘’Bathie’’ a soutenu n’avoir donné que de légers coups de cravache à la main de la victime. Puis, a-t-il ajouté, ‘’je n’ai fait que le gifler et il n’y avait rien de méchant dans ce que je faisais. C’était juste un enfant, je ne lui ai jamais donné de coups de poing’’.

Le maitre coranique âgé de 30 ans a, ensuite, été interrogé par le juge Boubacar Ndiaye Fall, sur le cas d’un autre de ses élèves qui, du haut de ses 10 ans, avait sauté du 3e étage pour échapper à des sévices corporels. Il avait eu les deux jambes fracturées. L’accusé a répondu qu’‘’il essayait de fuguer de l’internat, c’est pourquoi il a délibérément sauté d’aussi haut‘’.

Maitre Abdou Dialy Kane, l’un de ses avocats, a trouvé que les blessures décrites par le médecin ne peuvent en aucun cas résulter de coups à la main. A ses yeux, il n’y a pas de preuves pour attester que leur client est l’auteur des coups mortels. Il a sollicité une application bienveillante de la loi. 

Une amende de 10 000 F CFA pour chaque maître ayant blessé un enfant

Le directeur des programmes, Cheikh Syll, attrait pour non-assistance à une personne en danger, a déclaré qu’il ignorait que le petit était aussi mal-en-point. ‘’A un moment donné, j’ai ordonné qu’on lui donne de l’eau à boire. Quelques minutes après, on m’a rapporté qu’il était resté dans la même position pendant plus d’une heure.

C’est là que je suis allé le voir et j’ai appelé mon frère pour l’en informer‘’, a-t-il raconté. Ajoutant que son frère, directeur général de l’école, interdisait formellement les sévices et qu’il retirait 10 mille francs comme amende sur leur paie, à chaque fois qu’ils occasionnaient des blessures aux élèves. Comme pour dire que les séances de bastonnade étaient une règle dans le ‘’daara’’ et que des enfants étaient souvent maltraités jusqu’à ce que leur cas nécessite une consultation avec l’infirmier que l’école appelait au besoin. Dans ces cas, les élèves donnaient le nom de leur maitre pour constituer la liste des amendes de la fin du mois. Son conseil a demandé la clémence.

Hier, Ousmane Syll et Alioune Guèye ont justement comparu, parce que leurs noms figuraient sur ladite liste. En liberté provisoire, ils se sont présentés à la barre comme d’anciens pensionnaires de l’école devenus maitres. Leurs avocats respectifs ont dit leur incompréhension devant leur comparution, alors que les chefs jugés sont : coups et blessures volontaires ayant entrainé la mort imputés à Samba Ndao et la charge de non-assistance à une personne en danger reprochée à Cheikh Syll. Ils ont demandé à la chambre l’acquittement pur et simple.  

Le parquet a trouvé les faits constants et a requis une peine de 15 ans de réclusion criminelle pour Samba Ndao alias ‘’Bathie’’, 5 ans ferme pour Ousmane Syll et Alioune Guèye, et une peine de 3 ans ferme pour Cheikh Syll.

L’affaire est mise en délibéré. Les accusés seront édifiés le 10 mars 2020.

Fama Tall

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