Publié le 7 Sep 2020 - 18:18
DIOURBEL

Les populations pataugent

 

Au Sénégal, saison des pluies rime le plus souvent avec calamités. La capitale du Baol offre un tableau peu reluisant, avec des maisons inondées, des canalisations saturées  et des routes impraticables. La faute à un système d’assainissement défaillant, mais aussi à l’entêtement des populations qui ont construit des maisons dans des zones non aedificandi.

 

134,8 mm de pluies et Diourbel se retrouve sous les eaux. Du quartier Thierno Kandji, en passant par Ngolombit, Keur Cheikh Ibra Fall, HLM Route de Gossas, Médinatoul, Ndar Bou Ndaw, Mboudaye, Cheikh Anta, marché Ndoumbé Diop, Grand Diourbel, rue d’Avignon, les pluies diluviennes tombées la veille ont dicté leur loi. Dans ces quartiers et sous-quartiers de Diourbel, le réveil a été dur et brutal pour ceux qui avaient pu dormir la veille. Et pour cause, l’eau y a tout englouti. ‘’Ce qui se passe ne s’explique pas. Jamais nous n’avons connu de telles inondations’’, dénonce Samson Niang, habitant le quartier Cheikh Anta.

Il pointe ainsi un doigt accusateur vers les responsables de la mairie. ‘’S’ils n’avaient pas morcelé et vendu cette partie du quartier, jamais il n’allait y avoir d’inondations’’, dit-il.  Mais ce n’est pas que dans son quartier qu’il y a des problèmes. La brigade de gendarmerie, l’inspection de l’éducation et de la formation sont inaccessibles. Interpellé sur ces données pluviométriques, le responsable de la météo renseigne que ‘’c’est une situation exceptionnelle. Je ne me souviens pas d’une quantité aussi énorme en une seule journée. Même dans les archives que j’ai eu à consulter, on ne retrouve pas une pluie aussi importante’’.

En tournée dans les zones sinistrées, le préfet du département de Diourbel, en compagnie de son adjoint et du maire de la commune, annonce qu’une vingtaine de sites inondés ont été visités et des mesures préconisées. ‘’D’une manière générale, ce qu’il faudrait retenir, c’est surtout le renforcement en moyens logistiques des sapeurs-pompiers, notamment en termes de motopompes, mais l’installation aussi d’une descente électrique sur certains points avec des électropompes. Il est prévu la mise à leur disposition d’hydrocureurs pour certains points qui ne sont pas très proches du réseau d’assainissement, mais également certains points où nous avons constaté un défaut d’assainissement. Ces hydrocureurs nous permettront d’évacuer les eaux pluviales. Pour le reste, à savoir le recensement des sinistrés, il va se faire en relation avec les forces de l’ordre et les délégués de quartier’’, dit le préfet.

Casse-tête du recasement des populations sinistrées

Interpellé sur le recasement des populations sinistrées, Ibrahima Fall déclare que ‘’la solidarité entre voisins aidera dans ce sens. Certains commencent à héberger des sinistrés, mais il y a également les établissements scolaires, notamment au niveau du quartier Cheikh Anta où l’école Keur Yelly a été mise à leur disposition et je pense qu’il y a des familles qui seront là-bas. L’essentiel, pour nous, de manière urgente, était de trouver une solution au problème de l’évacuation des eaux pluviales et, en deuxième lieu, d’identifier en cas de besoin des sites de recasement. Mais là également, il faudrait des mesures d’accompagnement, voir est-ce que les conditions sont réunies, parce qu’il ne suffit pas tout simplement de loger des gens et de les laisser à eux-mêmes. C’est pour cela que nous privilégions la solidarité entre voisins’’, indique M. Fall.

Présent aux côtés du préfet, le député-maire Malick Fall parle d’une ‘’situation difficile’’. ‘’On ne peut pas, sur le coup, prendre une décision, mais on va rendre compte à l’autorité pour que des réponses idoines puissent être apportées’’, fait-il savoir. En urgence, ils vont tout de même essayer de régler le problème du curage des canaux. Il plaide également pour la réhabilitation des bassins de Cheikh Anta, de Ndar Bou Ndaw et de Keur Cheikh.

Dans l’après-midi d’hier, le ministre de l’Emploi, de l’Artisanat et de la Formation professionnelle a rallié la capitale du Baol pour venir réconforter, à son tour, les sinistrés. S’exprimant sur les 750 milliards que l’Etat aurait dégagés depuis 2012 pour financer le Plan décennal des inondations, le ministre confie : ‘’Nous sommes en train de travailler pour évaluer combien Diourbel a besoin dans le plan Orsec. Je dois d’ailleurs dire que l’Etat du Sénégal a fait d’énormes efforts dans la lutte contre les inondations. Bien évidemment, ça demande beaucoup de moyens. Nous parlons de plus de 700 milliards qui ont déjà été mis dans cette lutte contre les inondations sur l’ensemble du territoire sénégalais. Mais pour cette année particulière, les préfets et les autorités administratives, à la suite de leur tournée, ont évalué les besoins nécessaires pour faire face à cette situation d’aujourd’hui.’’

Fraîchement élu à la tête du pays, le président Macky Sall avait fait adopter, en septembre 2012, un Plan décennal de lutte contre les inondations, financé à hauteur de 767 milliards de francs CFA (plus de 1 milliard d'euros). Ce plan prévoit la construction de réseaux de canalisations supplémentaires, de pompes à eau, de bassins de rétention et de dispositifs de drainage et d’infiltration. Mais à Diourbel, les populations se demandent comment cet argent a été utilisé.

Boucar Aliou Diallo   

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