Publié le 19 Jan 2018 - 01:09
16 MILLIARDS DE DETTE RÉCLAMÉS À L’ETAT

Le privé menace ‘’d’orienter’’ les étudiants dans la rue

 

Si l’Etat ne paye pas aux établissements privés d’enseignement supérieur les 16 milliards de F CFA qu’ils lui réclament, ces derniers pourraient bientôt réorienter les étudiants dans la rue. La menace a été brandie hier en conférence de presse.

 

Si l’Etat ne réagit pas au plus vite, les 40 000 bacheliers orientés dans le privé depuis 2012 pourraient bientôt se retrouver dans la rue. La menace a été clairement brandie hier en conférence de presse par la Fédération des établissements privés d’enseignement supérieur. Si l’on en croit le vice-président Abass Fall, l’organisation était sur le point de durcir le ton, mais les instructions du président de la République mercredi dernier en conseil des ministres ont pu calmer les ardeurs. Par respect et espoir, suite à la parole du chef de l’Etat, les membres de la fédération ont décidé d’attendre ‘’quelques jours’’ pour voir si les  recommandations seront respectées. ‘’Si nous nous rendons compte que l’Etat n’est pas prêt à payer, nous serons obligés de renvoyer les étudiants’’, prévient M. Fall, entouré d’autres chefs d’établissements.

Si la fédération en arrive à ce point, la raison est double. D’abord l’Etat ne paye pas. Ensuite, il ne communique pas. Aujourd’hui, les privés réclament 16 milliards de dettes cumulées.    Si l’on se fie à M. Sall, depuis 2013, le gouvernement n’a jamais payé régulièrement les sommes dues. ‘’Chaque année, on nous donnait 25 à 50% de notre argent ; et le reste est reporté à l’année suivante’’, précise-t-il. Mais cette année-ci, il n’y a pas eu un seul sou versé dans le compte du privé. Il y a un mois pourtant, un décret d’avance a été signé par le Président Macky Sall, mais il n’y a pas eu de suite. De ce fait, les conséquences n’ont pas tardé à se faire ressentir. Les membres de la Fepes affirment que  les établissements ne peuvent plus fonctionner. Beaucoup d’enseignants ne viennent plus, disent-il, parce qu’ils n’ont pas de quoi payer le transport. Les managers se disent harcelés par leurs bailleurs, sans compter la perte de crédibilité auprès de la banque. ‘’Pas plus tard qu’hier, nous sommes allé à une banque qui nous a dit qu’elle ne peut plus nous faire des prêts’’, se désole M. Sall.

Le ministre fait le mort

L’autre problème est lié à l’absence de communication. Même si la Fepes écarte toute idée de problèmes personnels, il n’en demeure pas moins qu’elle affirme avoir écrit trois fois au ministre de l’Enseignement supérieur Mary Teuw  Niane, mais il n’y a même pas eu accusé de réception. Les chefs d’établissement ont également essayé de passer par de bonnes volontés, en vain. ‘’Il devait nous recevoir le 19 décembre dernier, mais le matin, on nous a appelés pour nous dire qu’il est malade, il revient de voyage, il ne peut pas nous recevoir’’, regrette M. Sall.

Ce dernier et ses camarades disent avoir fait pourtant preuve de patriotisme. Ils en veulent pour preuve le simple fait que l’Etat paye 400 000 par an par étudiant toute filières confondues jusqu’à la licence, alors que  les étudiants ‘’normaux’’ payent entre 800 000 et 1 200 000. Ainsi, ils invitent les autorités à ne pas oublier leur statut. ‘’Au-delà du service de formation que nous délivrons et qui est très utile pour le pays, nous sommes des entreprises, nous avons du personnel administratif et technique, nous avons du personnel enseignant, nous avons des obligations fiscales. L’Etat se doit de protéger ces emplois plutôt que de les fragiliser’’, proteste-t-on, à travers le texte préliminaire. Le gouvernement prévoit cette année aussi d’y envoyer 11 000 nouveaux bacheliers. Actuellement, 78 établissements sont concernés par l’orientation des bacheliers par l’Etat dans le privé. La Fepes elle, regroupe 52 établissements pour un total de 30 000 étudiants de l’Etat.

‘’Il n’y a jamais eu de rupture de dialogue’’

Joint par téléphone, le ministère de l’Enseignement supérieur assure qu’il n’y a jamais eu de rupture de dialogue avec la Fepes. À propos des correspondances, notre interlocuteur se demande où est-ce qu’elles ont été déposées ? Est-ce au ministère ou à la direction de l’enseignement supérieur privé ? Pour ce qui est du retard des paiements, le collaborateur de Mary Teuw Niane assure que le ministère a fait ce qui relève de sa compétence, le reste revenant au département des Finances. 

BABACAR WILLANE