Publié le 24 Jan 2021 - 01:22
ATTAQUE D’UNE PATROUILLE DE GENDARMES EN CIVIL

Le gendarme, le marchand ambulant et l’arme à feu 

 

Amputé d’une jambe, Mouhamed Fall a comparu, hier, pour avoir attaqué une patrouille de gendarmes en civil, selon l’accusation. Lui accuse le gendarme Seydina Daouda Thioub de bavure. L’affaire a été renvoyée, une deuxième fois, au 29 janvier, pour complément d’enquête.

 

L’affaire du présumé agresseur qui a attaqué une patrouille de gendarmes en civil, aux alentours de l’aéroport Léopold Sédar Senghor, a été évoquée une deuxième fois hier, à la barre du tribunal des flagrants délits de Dakar. Si le premier renvoi était dû à l’absence du gendarme Seydina Daouda Thioub, l’audience d’hier a été ajournée, car le tribunal a décidé de se rendre sur les lieux des faits pour conforter les déclarations des parties.

En effet, tandis que le prévenu Mouhamed Fall, qui s’en est tiré avec une jambe amputée, déclare que le gendarme habite à quelques encablures du lieu de l’incident, celui-ci soutient le contraire.

Les faits se sont déroulés le 17 juin 2020. Une patrouille du Groupe d'intervention de la gendarmerie nationale (GIGN), commandée par l'officier Seydina Daouda Thioub, a répondu à une demande d'appui de la brigade de la Foire, face à une série d'agressions qui sévissait dans ce secteur. Sur ces entrefaites, vers 22 h, les gendarmes ont effectué une patrouille sur les lieux. Une fois dans la rue qui longe le mur de l'aéroport, ils sont tombés sur une bande de jeunes dont la plupart détenaient des machettes et d'autres armes blanches. Ces derniers, en apercevant la patrouille, ont cru qu’il s’agissait des proies à dépouiller de leurs biens et ont commencé à polir leurs machettes sur les briques. Voyant qu’ils se dirigeaient vers eux, le chef de patrouille a fait savoir aux suspects qu'ils faisaient partie du GIGN et les a sommés de s'arrêter, en tirant en l'air. Ce qui ne les a pas découragés, car les jeunes continuaient à avancer.

Selon le gendarme Seydina Daouda Thioub, c’est ce qui l’a poussé à faire usage de son arme à feu et a tiré sur Mouhamed Fall. La balle a atteint sa jambe. A en croire le gendarme, le but était de l’immobiliser. Les autres présumés malfrats ont pris la tangente et le Gambien a été admis aux urgences de l’hôpital Principal de Dakar. Ce dernier ne sortira de cette structure que le 5 décembre 2020, sa jambe amputée. Le jour même de sa sortie, il a été placé sous mandat de dépôt, après sa garde à vue.

Venu comparaitre à la barre du tribunal des flagrants délits de Dakar, Mouhamed Fall, qui est poursuivi pour vol en réunion commis la nuit, détention illégale d’arme et rébellion, a contesté les faits. Béquilles à la main, le prévenu soutient : ‘’Je suis marchand ambulant. J’avais vendu des paires de chaussures à 24 000 F. L’acheteur me devait 5 000 F que j’étais parti récupérer. J'ai trouvé une foule qui se bagarrait. J’ai voulu intervenir, le gendarme est sorti de sa maison et a tiré un coup de sommation et la foule s’est dispersée’’, a-t-il raconté.

L’individu, condamné une fois à 15 jours pour usage de chanvre indien, poursuit : ‘’Il a administré des coups de crosse à Ibrahima Fall à la tête. Je lui ai dit qu'il n'en avait pas le droit, car je le prenais pour un vigile. Il s'est tourné vers moi en m’abreuvant d’injures. Alors que j'étais sur ma moto pour partir, il a visé ma cuisse et a tiré une balle.’’

Selon lui, le gendarme, après son acte, a pris peur et est entré chez lui pour ressortir avec une machette toute blanche. Ce que ce dernier a contesté en affirmant ne pas habiter la zone.  ‘’Je n'étais pas armé et il ne s’agissait pas d’agression. J'ignore ce que je lui ai fait pour qu'il tire sur moi’’, s’est défendu le prévenu. ‘’N'eût été Ibrahima Fall qui a appelé ma femme, j'allais mourir. Car les gendarmes m'avaient jeté dans leur fourgonnette et ont trainé avec moi jusqu'à 2 h du matin’’, a-t-il martelé.

Toutefois, avec leurs allégations contradictoires à propos de l’adresse du gendarme, le tribunal, sur demande des avocats de la défense, a ordonné la suspension des débats pour un déplacement le mardi 26 janvier. L’affaire est ainsi renvoyée au 29 janvier prochain.

Auparavant, la représentante du ministère public a estimé que le comportement du gendarme est déterminant par rapport aux déclarations du prévenu. Ainsi, elle a déclaré que la juridiction peut faire un transport sur les lieux pour en savoir plus.

MAGUETTE NDAO

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