Publié le 29 Mar 2024 - 20:03
AUTONOMISATION SOCIOÉCONOMIQUE - NORD DE BIGNONA

Des milliers de femmes retrouvent la joie de vivre

 

L’espoir a fini de renaitre dans une quinzaine de villages de la commune d’Oulampane où des blocs maraichers ont été réalisés pour contribuer à l’autonomisation socioéconomique et sociopolitique, mais également à la résilience écologique des femmes de cette partie nord du département de Bignona, frontalière avec la Gambie.

 

En ces temps de ramadan, manger une salade bien garnie après la rupture du jeûne n’est plus un luxe à Mampalago comme dans une quinzaine de villages du nord du département de Bignona qui a souffert du conflit en Casamance. ‘’Ici, les familles ne mangeaient pas de la salade. Mais depuis que Kharonghen est arrivé, nous mangeons régulièrement de la salade et des légumes frais. Nous venons de découvrir le haricot vert, mais également la betterave. Nous ne connaissions pas tout cela’’.

C’est avec un visage radieux que Fatou Sané, secrétaire générale du groupement de promotion féminine (GPF) Dissofor du village de Kiondiong, situé dans la commune d’Oulampane, nous a fait cette révélation. Retrouvée dans le bloc maraicher dudit village en compagnie d’une trentaine de ces collègues, elle se réjouit, par ailleurs, du fait que leurs dépenses quotidiennes ont largement été réduites parce qu’elles produisent désormais leurs propres légumes pour l’alimentation et pour la commercialisation. Les femmes de ce village qui, comme l’ensemble des bourgades situées au nord du département de Bignona, a souffert de la crise en Casamance ne sont pas les seules à bénéficier d’un bloc maraicher réalisé dans le cadre de la mise en œuvre du programme Karonghen 4 (PK4).

Lancé le 14 mars 2023 à Oulampane par l’ambassadrice d’Espagne au Sénégal Son Excellence Olga Cabarga Gomez en présence des autorités administratives, politiques, coutumières et militaires du département de Bignona, le programme d’une durée de quatre ans et d’un cout estimé à 1 853 078 525 F CFA, est financé par l’Agence espagnole de coopération internationale au développement (Aecid) en partenariat avec Manos Unidas. Il a fini de susciter l’espoir et la joie de vivre dans cette partie du département de Bignona frontalière avec la Gambie, participant ainsi à la consolidation de la paix.

Porté par le Centre de promotion agricole et sociale basé à Ziguinchor, le programme vise à contribuer à l’autonomisation socioéconomique et sociopolitique, et à la résilience écologique de près de 15 302 femmes. Dans le village de Mampalago, à une trentaine de kilomètres de la commune de Bignona où le programme intervient, 82 femmes exploitent leur unité maraichère. Chacune dispose d’une dizaine de planches pour sa propre consommation et la commercialisation.

‘’Auparavant, nous étions obligées de nous rendre à Bignona ou au marché hebdomadaire (‘Louma’) de Bounkiling, dans la région de Sédhiou, pour nous approvisionner en légumes. À défaut, nous nous soumettons à la rigueur du riz tout blanc (‘niankatang’). Ce casse-tête est désormais un vieux souvenir, depuis que le programme Karonghen a réhabilité notre bloc maraicher’’, se réjouit Awa Tamba, la présidente du GIE Soforal des femmes de ce village tristement réputé à cause des braquages récurrents que perpétraient les bandes armées supposées appartenir au Mouvement des forces démocratiques de Casamance (MFDC).

Dans ce bloc, l’essentiel des légumes qui entrent dans l’alimentation y est produit pour la consommation et la vente. Il s’agit de l’oignon, du haricot vert, la carotte, le chou, la salade, le navet, le poivron, le concombre, le gombo, la tomate, la pomme de terre, l’aubergine et même la betterave. ‘’Maintenant, on mange bien. Nos repas sont variés et diversifiés. Nous avons la paix et la joie dans nos foyers.  Ce bloc contribue largement à l’amélioration des repas. On note une cohésion sociale au niveau des femmes et des populations’’, explique Awa Dasylva, la secrétaire générale du GIE de Mampalago.

Outre l’aspect sécurité alimentaire, elle révèle que le programme contribue aussi à l’autonomisation financière des femmes. ‘’Désormais, nous participons pleinement à la prise en charge des problèmes familiaux. C’est avec la vente de ces légumes que nous subvenons aux besoins de la famille. Nous prenons en charge la scolarité des enfants et leurs soins médicaux. Nous contribuons largement aux activités sociales du village. La dépense quotidienne qui s’élevait à 1000 F CFA est passée maintenant à 500 F CFA’’, se réjouit-elle.

L’impact du programme qui vise également l’amélioration de la bonne gouvernance et la gestion des ressources naturelles de cette partie nord du département de Bignona est réel. ‘’Les responsables de famille sont heureux de l’implantation du bloc. Ils nous disaient qu’à des moments de l’année, certaines de leurs épouses étaient obligées de quitter le village pour se rendre à Dakar à la recherche d’un emploi. Avec le bloc, elles préfèrent rester au village où elles vivent en communauté. Elles passent presque toute la journée ensemble. Le village a retrouvé cette cohésion sociale perdue. Certains maris viennent même aider leurs femmes dans l’exploitation de leurs planches’’, souligne Léon Manga, l’animateur chargé de l’encadrement des femmes du bloc maraicher de Kindiong.

De l’avis de l’ambassadrice d’Espagne au Sénégal, ce programme s’inscrit dans la longue tradition de la coopération espagnole en Casamance, région prioritaire de l’Agence espagnole de coopération internationale au développement (Aecid) et des agences ou ONG espagnoles présentes.

HUBERT SAGNA (ZIGUINCHOR)

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