Publié le 26 Oct 2019 - 17:44
AVIS D’INEXPERT PAR JEAN MEÏSSA DIOP

Une autre couverture presse du Magal de Touba

 

Les ‘’berndé’’, un méchoui de tout un chameau, les festins presque gargantuesques, Adja Aida Diallo... Mille journalistes accrédités pour qu’on n’ait du Grand Magal de Touba que des aspects fêtards et des faits-divers. Oui, mille journalistes pour ça, rien que ça ! ‘’Et, bizarrement, on ne parle que d’Aida Diallo. On dirait qu’il y a un truc qui n'a pas marché’’, commente, sur sa page Facebook, Cheikh Abdou Khadr Seck, un jeune journaliste taquin, qui sait soulever de bonnes questions.

La rédaction a-t-elle préparé la mission de couverture du Magal confiée au reporter ? Quels aspects importants traiter et sous quel angle ? Tout cela peut être le fruit d’une réflexion collective et à haute voix, plutôt que le résultat du flair et de l’improvisation d’un reporter laissé à lui-même, sans briefing, ni viatique, sans autres idées que les siennes propres.

Certes, il y a de ces thèmes intéressants à traiter et que le reporter ne découvre que sur le terrain. Mais il y a l’apport collectif de la rédaction à l’identification et à la définition des différents angles de couverture d’un événement d’envergure et même d’un banal fait-divers. La couverture média d’un événement, ça se prépare à la rédaction et par les journalistes, même ceux qui ne vont pas sur le terrain y prennent part. Et le plan de couverture ne sera riche que des idées des uns et des autres. Et il appartiendra au reporter de les traduire en acte et en écriture après une collecte rigoureuse et sagace d’informations.

Il est très instructif le message Facebook du journaliste Bamba Kassé à ses ‘’confrères et consœurs’’ préposés à la couverture du Magal : ‘’(…) Je voudrais faire part de mes attentes en tant que désormais ‘consommateur’ d'informations venant de Touba. J'ai remarqué qu'il n’y a presque pas de sujets portant sur le spirituel. J'aimerais (des curieux certainement avec moi) avoir des contenus portant sur le pourquoi des millions de Sénégalais et autres font le trajet, dans des conditions difficiles le plus souvent, pour se rendre à Touba. 

Je voudrais ensuite savoir, au-delà du spirituel, où en est le legs en termes de philosophie nationaliste de Serigne Touba. Au-delà du nombre de bœufs immolés ici et là, la philosophie du travail et les bonnes pratiques mourides du temps du Cheikh ne doivent-elles pas être remises au goût du jour ? Une actualisation de la pensée de Cheikh Ahmadou Bamba, à la loupe des réalités culturelles et cultuelles du moment, me semble être humblement la trame du travail journalistique en période de couverture du Magal. Le tout emmitouflé dans les flux des faits et actes constitutifs de l'actualité de Touba.’’

Ce sont là des points, parmi tant d’autres, qu’un reporter envoyé ne devrait point négliger, ni escamoter au profit de faits sans portée spirituelle – entre angles aussi. Pourquoi ne pas expliquer au public la ‘’division du travail’’ mouride entre les familles Mbacké, Bousso, Diakhaté et Lô ?

En effet, il paraît qu’à chacune de ces familles échoit une mission au service de la confrérie mouride. Il ne serait pas ‘’inintéressant’’ d’en parler. Parler aussi de cette sorte de congrégation au sein de la communauté mouride et dénommée Hizbut Tarqiyya. Par-delà la présentation de ses infrastructures luxueuses à Touba, qu’est-ce que ce mouvement incarne en matière de spiritualité et d’engagement mourides ? On aimerait bien découvrir…

‘’Les Sénégalais sont friands de buzz et non de spiritualité, alors que l'événement est avant tout spirituel, réagit Elhadj Madabo Wade au post de Cheikh Abdou Khadr Seck. Les journaux en ligne se sont engouffrés dans la brèche et ne parlent que d’Adja Aida Diallo. Beaucoup de talibés et autres quidams les ont suivis, oubliant de parler du miracle Bamba et de son désir de remercier son Seigneur’’.

 ‘’Nous accordons trop d’importance aux faits-divers, se navre Floriant Ndiaye , un facebooker commentant le même post. Les journalistes ne font que nous suivre’’. Hélas !

 

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