Publié le 3 May 2020 - 07:57
BEULEUP - (ARTISTE DESSINATEUR)

‘’Je serai le plus grand peintre sénégalais’’

 

Abdou Ndao, qui signe ses dessins de son nom d'artiste "Beuleup", développe un talent exceptionnel. Ses œuvres ressemblent à des photographies, tellement elles semblent réelles. Il a fait les portraits de personnalités bien connues. Il est convaincu qu’il sera ‘’le plus grand peintre du Sénégal’’. Son rêve le plus fou, c’est de réaliser des bandes dessinées.  Sa passion lui permet, en partie, de financer ses études.

 

Son ambition est grande, son rêve fou, mais pas impossible. Originaire de la région de Fatick, même si son nom d’artiste rappelle les rois du Saloum, Abdou Ndao dit ‘’Beuleup’’ est un artiste dessinateur. Il croit en son talent et est convaincu qu’il deviendra le plus grand artiste du pays. Dessiner est une passion, pour ne pas dire sa vie. A l’école élémentaire Moustapha Sarr de Tattaguine, où le professeur Iba Der Thiam était enseignant et où le professeur et homme politique Issa Sall a fait ses débuts, le petit Ndao gribouillait sur des feuilles, encouragé par son maître. De là est née sa passion. Il n’a eu de cesse d’en vouloir plus et de se bonifier. Chanceux, il avait un voisin artiste.  ‘’Je me suis rapproché d’un voisin qui était un grand dessinateur. Ses enseignements m’ont beaucoup aidé’’, partage-t-il.

Aujourd’hui, Beuleup dessine avec une fine précision. Ses œuvres sont de véritables photographies. Chaque trait, chaque mimique, chaque ride, aussi minuscule soit-il, est scrupuleusement reproduit. Entre la photographie et le dessin, Beuleup n’y voit pas de rivalité, mais une complémentarité. Il est doué à tel point qu’on croirait qu’il est sorti d’une prestigieuse école d’art. S’il reproduit parfaitement des visages à coups de crayon, ce n’est pas seulement par simple plaisir, c'est aussi pour de l’argent. Les services qu’il rend lui permettent de couvrir ses dépenses scolaires. ‘’Au début, c’était juste une passion ; et au fil du temps, j’ai remarqué que les gens arrivent à gagner de l’argent alors qu'ils ne sont pas plus talentueux que moi. C’est à partir de ce moment que j’ai véritablement décidé de me lancer’’, confie-t-il.

Abdou Ndao, teint noir, taille moyenne avec une barbe toujours bien entretenue, est aussi un étudiant en génie civil. Il est en 2e année dans un institut de formation de la place et a passé 3 ans à l’Ucad avant d’abandonner cette université publique pour se concentrer sur sa formation professionnelle. Un domaine qui se rapproche de sa passion. ’’La seule différence, c’est qu’on est plus libre en dessin artistique qu’en dessin technique’’, fait savoir l’apprenti ingénieur. Non boursier, l’étudiant s’arrange donc pour dessiner afin de couvrir ses dépenses. Il dévoile son talent et diversifie son offre : portrait au crayon ou à la peinture, tableau d’art décoratif, œuvre thématique. L’artiste confie que c’est le portrait qui domine. Car ‘’les Sénégalais n’ont pas toujours la culture d’acheter des tableaux d’art’’.

Il arrive à Beuleup d’avoir beaucoup de commandes de portraits. Néanmoins, la fréquence moyenne est de 5 œuvres par mois. Le prix dépend du format et du cadre. Il varie aussi selon la technique utilisée. Toutefois, ‘’il n’y as pas de prix fixe. Quand j’ai besoin d’argent, je peux dessiner pour n’importe quelle somme, puisqu’à chaque fois les gens disent que c’est cher’’, a fait savoir l’artiste. ‘’Ils demandent d’abord le prix de la peinture qu’il trouve trop coûteux avant de se contenter du crayonnage’’, ajoute-t-il. La tarification est alors entre 15 000 et 35 000 F CFA. Un gain qui lui permet, entre autres, de payer le transport pour aller l’école, la documentation, les repas…’’ Ça aide beaucoup pour la scolarité’’, sourit le portraitiste.

 Allier études et art, ce n’est pas facile. Pour y arriver, Beuleup fait beaucoup de sacrifices. ‘’Pour un tableau bien réussi, il me faut 3 jours avec 10 heures de travail par jour. Mais lorsque j’ai une commande d’urgence, je peux terminer mon travail en une journée et demie. Dans ce cas, je vais me priver de sommeil.  Mais ça vaut le coup’’, dit-il.

Pas de répit pour cet artiste. Il n’y a pas de vacances pour l’art. La fermeture des portes de l’école, même partiellement, est une occasion pour multiplier les commandes. Grâce aux beaux portraits qu’il réalise, Beuleup s’est fait un nom. Des célébrités attendent leur commande : Xuman, Momo Dieng, Bass Thioung. ’’Il a beaucoup de talent. Son travail est remarquable. Je lui conseille de continuer sur cette lancée en alliant art et études. 

J’ai vu les plans de bâtiments qu’il conçoit en ce moment et c’est formidable’’, a témoigné la chanteuse Mamy Cruz. L’interprète de ‘’Boul ma fowé’’ la B.O de la série ‘’Maitresse d’un homme marié’’, se dit satisfaite, après avoir reçu son portrait. Elle n’est pas la seule. Elles sont nombreuses les personnes n’ayant pas tari d’éloges à l’égard du travail de Beuleup. ‘’C’est propre, vite et beau. Je ferai une autre commande pour ma mère’’, a dit Fanta Niang, une jeune comédienne de Kaolack, heureuse d’avoir constaté la parfaite reproduction de son visage sur un tableau.

Beuleup ne se limite pas seulement au dessin. ‘’J’ai écrit un scénario et je suis en train de dessiner pour réaliser une bande dessinée. L’idée est de montrer que nous savons faire cela. Je suis un peu bloqué par les études, mais je compte le terminer durant les grandes vacances’’, promet-il.

BABACAR SY SEYE 

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