Publié le 30 Mar 2020 - 20:37
CORONAVIRUS

Amadou Bâ dit stop à la stigmatisation

 

Depuis le début de la pandémie au Sénégal, des commentaires très négatifs ne cessent d’être faits à l’égard des personnes de nationalité étrangère. Une attitude que déplorent des autorités. Surtout avec les 12 cas que le pays a enregistrés hier dont 4 importés.

 

La pandémie du coronavirus fait ressortir les démons enfouis en nous. Elle est source de tension entre les familles, les communautés, les régions, les pays et les continents. Les gens se rejettent. Cette tournure grave, surtout avec certains Sénégalais qui, au début de la maladie, n’ont pas cessé de pointer du doigt les étrangers, n’est pas appréciée par les autorités. D’où l’appel du ministre des Affaires étrangères.

Selon Amadou Bâ, le Sénégal, à l’instar de la communauté internationale, est appelé à lutter contre un ennemi invisible qui, de la même manière qu’il traverse allègrement les frontières, ne fait aucune distinction de race, de religion, de statut social ou de genre. Dès lors, dit-il, aucune forme de stigmatisation ne doit être entretenue ‘’ni envers nos compatriotes vivant à l’étranger, encore moins envers les hôtes étrangers vivant parmi nous. Nous devons nous soutenir mutuellement, conjuguer nos efforts et livrer bataille, en multipliant les gestes barrières et en suivant les avis et recommandations des autorités sanitaires’’, conseille-t-il.

Au moment où notre pays a, hier, enregistré plus d’une dizaine de cas, sur 151 tests réalisés par l’Institut Pasteur de Dakar, 12 se sont révélés positifs. Il s’agit, selon Abdoulaye Diouf Sarr, de 4 cas importés et 8 cas contacts suivis. Pendant ce temps, 9 patients hospitalisés sont contrôlés négatifs et sont donc déclarés guéris. À ce jour, 142 patients sont déclarés positifs, dont 27 guéris et 115 encore sous traitement.

Le chef de la diplomatie sénégalaise assure à la diaspora qu’une part de choix leur a été réservée dans l’enveloppe du fonds dénommé Force-Covid-19 d’un montant 1 000 milliards de F CFA. ‘’Elle se déclinera en des mesures d’urgence concrètes pour assister nos compatriotes à l’étranger en situation de vulnérabilité, sans oublier nos étudiants. Une attention toute particulière sera accordée aux familles restées au pays de nos compatriotes de la diaspora. Enfin, les moyens d’action de nos missions diplomatiques et consulaires seront renforcés et le personnel soutenu pour lui permettre de remplir pleinement sa mission’’, rassure Amadou Bâ.

Le ministre des Affaires étrangères n’est pas le seul à dénoncer cette stigmatisation. Le coordinateur de la Cellule de prise en charge des malades du coronavirus, Professeur Moussa Sy, dit être choqué par certains commentaires. Surtout quand le pays a enregistré son premier cas. ‘’Le virus ne s’intéresse pas à la couleur de la peau. Les cas importés, c’est vrai, il y a des nationalités. On a des cas importés d’ailleurs, mais ce n’est pas toujours des personnes qui ne sont pas sénégalaises. Il ne faut pas, chaque fois qu’on entend importé, qu’on se dise, c’est un étranger. Cette manière de raisonner est catastrophique pour nous en médecine.

Imaginez, le malade est déjà stressé, confiné et il lit dans la presse qu’on est en train de le culpabiliser’’, fustige-t-il. Pour l’infectiologue, ce n’est pas au moment où la personne est en hospitalisation qu’on doit lancer des messages négatifs. ‘’J’étais particulièrement dérangé par les commentaires concernant le premier cas. Un patient consciencieux, qui a pris toutes les mesures, dès le début, pour ne contaminer personne dans sa famille. Il était prêt à venir à la télévision faire des témoignages, aider à sensibiliser contre cette maladie. Après, il voit ces messages hostiles. Il ne pouvait plus le faire. C’est vraiment malheureux’’, juge Pr. Seydi.

15 Sénégalais convoyés à Lomé

Par ailleurs, le ministre Amadou Bâ informe que son département a dû venir en aide à 25 Sénégalais bloqués à la frontière entre le Maroc et la Mauritanie, au moment où ces deux pays ont convenu de fermer leurs frontières terrestres. Des négociations entamées avec les autorités mauritaniennes ont permis de les convoyer vers notre pays où ils ont été pris en charge.

À ce jour, dit-il, le Sénégal compte de nombreux compatriotes bloqués en transit dans des pays qui ont suspendu leurs liaisons aériennes avec le nôtre. ‘’À titre d’exemple, 15 de nos compatriotes retenus à Addis Abeba ont été convoyés à Lomé où ils sont pris en charge par notre mission diplomatique. Le 25 mars 2020, 42 Sénégalais bloqués aux États-Unis d’Amérique ont été ramenés au pays, à leur demande, et actuellement confinés au lac Rose’’, renseigne-t-il.

Tout cela a été fait, déclare-t-il, en dépit de ces appels et compte tenu de la suspension du trafic aérien, en vue de contenir la chaîne de transmission de la maladie. Les mouvements aux frontières sénégalaises se sont accentués dans un contexte généralisé de fermeture des frontières. C’est ainsi qu’informé du blocage à Casablanca, au Maroc, de 172 compatriotes, le chef de l'État a affrété un aéronef pour les rapatrier. Ils sont actuellement pris en charge par les autorités sanitaires. ‘’Notre pays n’a pas su échapper à la vague de contagion qui touche le monde. Le 2 mars 2020, il a enregistré son premier cas infecté à la Covid-19. Depuis lors, des hommes et femmes du personnel soignant sacrifient leur vie pour en sauver d’autres. Je leur rends un hommage mérité et déférent, et loue leur courage et leur fidélité sans faille à leur profession’’.

VIVIANE DIATTA

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